Mogok, la vallée des pierres précieuses : Emmanuel Fritsch raconte une exploration inédite.
Qui n’a pas entendu parler de Mogok ? Mogok, cette ville lointaine et mystérieuse située en haute Birmanie, la provenance la plus recherchée pour les rubis et les saphirs, le sésame des ventes de prestige, la destination dont rêve tout passionné de minéraux et de belles pierres.
Grâce à une personnalité éminente dans notre profession – Kennedy Ho – , et profitant d’une période d’ouverture aux étrangers, le Professeur Emmanuel Fritsch a conduit une expédition constituée de trois scientifiques et d’un photo-reporteur à travers la vallée entre 2016 et 2017, juste avant que les portes n’en soient abruptement refermées.
Mogok, la vallée des pierres précieuses est le livre écrit collectivement par cette petite équipe pour relater une formidable aventure humaine et scientifique. C’est aussi un des seuls témoignages complets sur ce lieu. S’adressant au grand public, le livre offre une compréhension globale de ce qu’est Mogok, de sa mythologie à l’analyse scientifique de sa géologie en passant par l’étude gemmologique des pierres précieuses issues de ses gisements extrêmement variés.
Peu avant sa parution en librairie – prévue le 24 octobre – le Professeur Fritsch nous raconte le contexte dans lequel ce livre a pu se réaliser et nous présente les principaux thèmes abordés, répondant aux questions que l’on se pose sur les gemmes d’exception qu’on y récolte.
Comment est né le projet de ce livre ?
En décembre 2013, Henri Ho, fondateur et Président émérite de l’Asian Institute of Gemological Sciences, a invité un groupe de gemmologues occidentaux – dont j’étais – à venir visiter Mogok. Je réalisais là un de mes rêves. Après ce premier aperçu de la vallée mythique, et pour remercier Henri, j’ai proposé de faire un livre et lui ai adressé un projet, mais cela ne s’est pas fait.
Étonnamment, il existe peu de livres sur les gemmes de la région de Mogok. Ceux parus jusqu’à présent traitent beaucoup de l’histoire du lieu, mais ils évoquent peu les gemmes à proprement parler, malgré les nombreuses couvertures illustrées de rubis et de saphirs !
Il se trouve cependant que mon ami Frank Notari souhaitait lui aussi écrire sur Mogok. Il co-dirige avec Thomas Hainschwang les Laboratoires de gemmologie GGTL. Peu de temps après ma propre visite, Franck est ainsi entré en contact avec Kennedy Ho, le jeune frère d’Henri Ho, et Président de l’Asian Institute of Gemological Sciences (AIGS). (En novembre 2017 l’AIGS et GGTL créaient Gem Alliance, une coopération fondée sur le partage d’informations et de données gemmologiques).
Kennedy Ho est un expert reconnu et influent dans toute l’Asie. Il a un style très particulier de management : il parle peu, sourit beaucoup et avec lui, les choses se font. Il fait dans l’efficacité. Grâce à lui, le projet a pu se réaliser.
Début 2016, j’ai donc pu monter une petite équipe de scientifiques composée de Candice Caplan, Thomas Hainschwang, Franck Notari et d’un photo-reporteur, Jean-Baptiste Rabouan. Au mois de mai, Kennedy Ho nous avait obtenu nos permis d’accès pour Mogok et notre expédition à « Rubyland » débutait. Deux autres séjours suivirent, en août 2016 à la saison des pluies, et en mars 2017.
Grâce à Kennedy Ho, nous avons ainsi pu parcourir la région de Mogok dans les meilleures conditions possibles, aidés d’un formidable guide, Jordan Aung Naing. Nous avons pu accéder à plusieurs mines de la vallée, et parfois y descendre, notamment dans la célèbre Ruby Dragon Mine. Il nous a été permis de collecter et de rapporter des échantillons de minéraux, dont de nombreuses gemmes rares.
Mogok, la célèbre « vallée des rubis » racontée par Joseph Kessel est-elle à la hauteur du mythe ?
Mogok est une « fabrique » naturelle incroyable de gemmes, un phénomène qui s’explique en grande partie par la géologie du site. J’en retiens aussi la beauté ineffable des paysages, la gentillesse de ses habitants, la luxuriance de la végétation et les pieux stupas d’or qui ponctuent les chemins.
Mais se rendre à Mogok relève du parcours du combattant !
Les conditions d’accès à la région ont peu changé depuis le voyage de Kessel en 1955. La région reste difficile d’accès à tous points de vue. Le gouvernement ferme régulièrement l’accès de cette vallée aux touristes étrangers. Depuis mars 2017 il n’est à nouveau plus possible d’aller à Mogok.
Géographiquement parlant, Mogok est nichée dans une vallée entourée de montagnes dans le district de Pyin Oo Lwin. Seules deux routes y conduisent depuis la ville de Mandalay, située à quelques deux cents kilomètres plus au sud. Et la plus récente et plus rapide des deux routes est réputée dangereuse puisque située en plein Pays Shan.
Rares sont les scientifiques qui jusqu’à présent ont eu la chance de pouvoir étudier avec précision les riches gisements gemmifères dont la vallée de Mogok est abondamment pourvue.
C’est pourquoi ce livre relate une expérience inédite.
Pouvez-vous nous présenter ce livre ?
Mogok, la vallée des pierres précieuses est publié en deux éditions : anglais et français, sous la direction de Kennedy Ho qui a d’ailleurs rédigé l’avant-propos du livre.
Je dirais qu’il s’agit d’un livre « grand public » avec un côté « nantais ». Je suis professeur à l’université de Nantes, et les autres auteurs de ce livre sont tous des anciens du Diplôme universitaire de gemmologie (DUG) de Nantes. Notre auteur et photo-reporter Jean-Baptiste Rabouan fait figure d’exception mais il a néanmoins étudié la gemmologie à Saumur, une formation co-créé par « notre véritable ancêtre », mon prédécesseur Bernard Lasnier ! Professeur Émérite, Bernard Lasnier a fondé en 1982 le programme de gemmologie à Nantes. Le DUG permet aux personnes formées en gemmologie classique de se hisser au niveau d’expert.
Le livre compte dix chapitres, qui présentent un large aperçu des diverses facettes de Mogok. Il y est question de géographie, de culture, de l’histoire huit fois centenaire de cette localité, et de celle plus ancienne encore des rubis. Nous y évoquons aussi la rude vie des mineurs, les différents types d’exploitations minières, le commerce des gemmes de la mine vers les marchands, et des marchands vers le reste du monde, sans oublier une description des marchés de Mogok qui animent la vie locale.
Quatre chapitres du livre sont assez techniques. L’un, que j’ai écrit, présente la géologie de la vallée, base de la compréhension de l’origine de ces multiples gisements gemmifères pour la plupart alluvionnaires qui sont rassemblés dans la région. Puis sont présentées successivement les analyses gemmologiques des rubis, des saphirs, des spinelles et des péridots.
Ces quatre gemmes sont les principales que l’on trouve à Mogok et sont reconnues comme parmi les plus belles au monde. Mais de très nombreuses autres gemmes sont aussi présentes dans la vallée : nous en faisons une description non-exhaustive dans le livre. Le lecteur y découvrira ce que j’appelle les « bizarreries » de Mogok !
Pouvez-vous nous dire un mot de l’étonnante couverture du livre ?
L’image de couverture a été réalisée sans aucun trucage, mais deux photos se superposent grâce au talent de la femme de Jean Baptiste Rabouan.
La photo au bas de la couverture montre Kennedy Ho de profil en train d’observer un péridot vert vif : c’est une image extraordinaire – le point focal se forme sur l’œil. La source lumineuse traverse en transparence la gemme, la loupe et concentre son faisceau sur l’œil qui a son tour renvoie la lumière.
Le choix de cette photo est particulier, parce que nous avons décidé de mettre en avant un péridot et non pas, comme on s’y attendrait lorsqu’on évoque Mogok, un corindon (le rubis étant la variété rouge de ce minéral et le saphir la variété bleue). Les gisements de péridots se situent au nord de Mogok, dans la zone de Pyaung Gaung. Ces gisements de péridots sont une des surprises de la vallée : il est inhabituel de trouver ce type de gisement à côté de gisements de rubis. Les cristaux birmans de péridots figurent parmi les grands au monde (derrière ceux provenant du Pakistan) et présentent de très belles couleurs avec d’importantes variations de teinte selon leur teneur en fer.
Quant à la partie haute de la couverture, elle évoque Mogok à merveille : la brume du matin – c’est époustouflant de beauté-, les stupas, les montagnes et la jungle.
Des découvertes sont-elles publiées pour la première fois dans ce livre ?
Quelques-unes y ont été consignées, mais nous avons tenu compte du fait qu’il s’agit d’un ouvrage grand public. Nous avons ainsi montré des inclusions inhabituelles de gros cristaux prismatiques de rutile dans les rubis (p.111). Nous avons aussi découvert que certains rubis rouge sombre (mais un peu pourpre) sont colorés par du vanadium seulement, et non par du chrome. Est-ce qu’on trouve ce type de cas ailleurs ? C’est possible, mais à ce jour, c’est une observation extrêmement rare.
Un autre scoop révèle, avec photos à l’appui, le traitement thermique des spinelles à Mogok pour en améliorer la couleur (p.180. 181.182). Bien d’autres encore figurent dans le livre !
« La vallée est probablement un cas géologique unique » : cela justifie-t-il la variété des gemmes qu’on y trouve ?
La richesse gemmifère de Mogok provient de la déformation qu’a subie l’ensemble du pays, depuis cinquante millions d’années. Cette déformation est due à la collision du sous-continent indien (toujours en mouvement) avec la plaque asiatique. Cet événement géologique, qui a engendré la chaîne de l’Himalaya, a eu un fort impact sur la géologie du Myanmar. Le pays se divise en trois blocs géologiques dont la ceinture métamorphique de la région de Mogok.
Dans le chapitre « Le dragons aux yeux rubis », une carte géologique montre l’actuelle juxtaposition du gneiss, du granite et des marbres qui constituent la géologie de la région de Mogok. C’est dans les marbres que cristallisent les rubis (marbres « bleus »), les spinelles (marbres blancs) et parfois même, mais c’est rare, des saphirs (mine de Dattaw).
Les éléments naturels font ensuite leur œuvre : L’eau – qui descend des montagnes -, l’air, le climat, ainsi que le passage des siècles érodent les marbres et y créent par endroit des espaces vides (gouffre, grotte, rivières souterraines) dans lesquels des roches gemmifères de lourde densité (3,6 pour les spinelles, 4 pour les corindons) se déposent. Les marbres sont les roches-mères des rubis et spinelle, et lorsqu’ils sont érodés, ils deviennent des coffres-forts naturels.
Les paysages de la vallée de Mogok qui s’offrent au promeneur sont hérissés de crêtes parallèles noires de karst (marbres érodés) sous lesquelles se cachent les marbres clairs et le gravier gemmifère local qu’on appelle le byon.
Les rubis birmans sont-ils si exceptionnels qu’on peut les reconnaître au premier coup d’œil ?
Prétendre reconnaître un rubis birman au premier regard n’est ni scientifique, ni honnête… c’est du baratin de pseudo-expert !
Lorsqu’ils sont sans inclusions, certains rubis Verneuil (de synthèse) ressemblent à s’y méprendre à des rubis birmans puisque le fer est absent de la composition chimique de ces oxydes d’aluminium.
Actuellement, la plus importante source de rubis au monde (près de 80% de la production mondiale) se situe à Montepuez, dans la province de Cabo Delgado au Mozambique. Certains rubis extraits de cette mine ressemblent aux rubis birmans. Après une observation scientifique, on se rend compte cependant que les rubis mozambicains ont trop de fer et trop de chrome par rapport aux rubis birmans.
Dans les pierres de très grande qualité, nous trouvons généralement très peu, voire aucune, inclusion. Seule une analyse en laboratoire peut déterminer un rubis birman exceptionnel.
Pour conclure, je dirais qu’il faut regarder tout rubis avec attention. Personne n’est en droit d’affirmer avec certitude qu’il s’agit d’un rubis birman, à moins qu’il ait été acquis au sortir de la mine, et à Mogok !
Existe-t-il des inclusions caractéristiques, qui graveraient du sceau de « Mogok » certaines gemmes ?
Je crois que rien n’est totalement unique donc je ne pense pas. Ce ne sont pas tant les inclusions prises séparément, que l’ensemble des inclusions, qui forment ce que E.J. Gübelin et J.J. Koivula ont appelé in Photoatlas of Inclusions in Gemstones un « paysage d’inclusions », qui permettent une identification des gemmes. Le paysage d’inclusions donne des informations sur le mode de formation de la gemme observée et renseigne sur son origine géographique. Hors contexte, ces inclusions prises séparément indiquent rarement une localité spécifique!
Nous retrouvons des inclusions similaires dans les rubis de la John Saul Mine au Kenya et dans ceux provenant des gisements historiques de Jagdelek en Afghanistan puisqu’ils ont en commun de provenir de marbres gemmifères.
Néanmoins, un ensemble caractéristique d’inclusions (cristaux corrodés de calcite, inclusions de pyrite, « soies » de rutile) et un manque d’homogénéité dans la répartition de la couleur avec des zones de couleur flexueuses laissent présager avec raison de l’origine birmane du rubis. Frank Notari estime que la majeure partie des rubis de Mogok est identifiable au microscope.
Certains rubis de Mogok, aux multiples nuances de rouges, se reconnaissent à leur faible teneur en impuretés de fer, et à la présence de vanadium, une impureté chromogène qui accentue la couleur induite par le chrome.
Mais il faut savoir qu’à Mogok, la plupart des rubis trouvés sont de couleur légèrement pourpre. Les rubis exceptionnels à la couleur imprécise et pourtant si recherchée dite « sang de pigeon » restent des trouvailles rares. Et lorsque le poids d’un rubis de couleur exceptionnelle dépasse les dix carats, ce qui est rarissime, alors son prix explose. A l’instar des diamants de couleur, le prix au carat d’un tel rubis avoisine le million de dollars !
Qu’est-ce qui explique l’extraordinaire luminosité des rubis birmans ?
La luminosité des rubis birmans est liée à cette absence de fer dans leur composition que nous venons d’évoquer ainsi qu’à une très forte luminescence, qui est le pendant de cette absence de fer. Ce phénomène de luminescence est difficile à observer à l’œil nu mais nous le percevons inconsciemment. Il est à l’origine de l’étonnante luminosité de certains rubis birmans qui nous rappellent le vieux terme d’escarboucle, « charbons ardents ».
Les saphirs birmans sont également très réputés : présentent-ils un aspect caractéristique ?
Mogok produit en effet des saphirs de très belle qualité qui se caractérisent par une couleur d’un bleu velouté. Ils ont rarement à subir des traitements pour améliorer leur couleur ou leur transparence. Les saphirs les plus réputés étaient ceux qui sont originaires du Cachemire, mais comme les gisements sont épuisés, ce sont les saphirs birmans qui sont aujourd’hui les plus recherchés. Mais la production est bien moins importante qu’auparavant.
Depuis la fin des années 1990 les mineurs ont découvert d’étonnants saphirs dans le gisement de Baw Mar, à l’ouest de Mogok. La qualité de ces saphirs ne correspond pas au standard des saphirs birmans, et leur analyse en laboratoire révèle une importante teneur en fer. En me promenant près de cette mine la veille de mon départ, j’ai découvert juste à côté une péridotite … donc la présence de fer dans la composition de ces saphirs n’est finalement pas si étonnante !
Les plus beaux saphirs ont été trouvés en même temps que les rubis, drainés par le byon. Pourquoi ? Comment se fait-il qu’ils proviennent d’un même gisement ? On ne sait pas trop, car il n’y a pas d’étude géologique détaillée à ce sujet.
Les bizarreries de Mogok
Rubis, spinelles, saphirs et péridots constituent les gemmes les plus recherchées de cette « vallée aux pierres précieuses », mais ce qui est vraiment étonnant, c’est qu’à l’exception des émeraudes, on trouve dans la région de Mogok une multitude d’autres gemmes !
Des petits diamants (qui proviendraient non pas de cheminées kimberlitiques, mais d’une roche-mère rare : la lamproïte), des petites aigues-marines et des apatites bleu clair, des topazes incolores, des pierres de lunes bleues, des grenats – pas très beaux ! -, des améthystes, des quartz bruns et roses, du lapis-lazuli etc…
Ce qui fait rêver tous les experts, gemmologues et collectionneurs à Mogok, ce sont surtout les raretés qu’on y trouve : la johachidolite, les hackmanites (variété de sodalite qui passe de l’incolore au pourpre à la lumière du jour), la painite, les pierres de lune « bambou », les tourmalines champignon, les danburites, jeremejevites, sinhalites et poudretteites roses… le livre établit une liste non exhaustive de ces gemmes singulières.
Dernier phénomène rencontré dans la vallée : ce sont les découvertes qui s’y font et celles qui restent à faire. Prudence et humilité sont alors de mise car même les meilleurs experts peuvent avoir des surprises et risquer de commettre des méprises !
Ainsi, sur un marché, alors que Kennedy Ho venait d’acquérir à ma grande stupéfaction quelques saphirs de qualité médiocre, et avec une simple identification à l’œil comme il ne faut pas le faire, je me suis fait piéger ! Les dits saphirs étaient des calcites bleues ! C’était troublant, on y retrouvait les mêmes macles polysynthétiques que sur les saphirs.
On découvre d’étranges bizarreries sur les marchés de Mogok, même les vendeurs qui n’ont pas tout le matériel d’identification se trompent parfois entre deux espèces rares.
La leçon à tirer c’est qu’il est facile à Mogok, même pour les experts, de se faire piéger par une espèce ou une variété inhabituelle, ou nouvelle. La vallée recèle tellement de merveilles et de découvertes.
Quel avenir pour Mogok ?
Mogok reste un endroit où on trouve des rubis exceptionnels, plus qu’ailleurs et ce, depuis deux mille ans. Il n’y a pas encore d’exploitation massive des gisements comme on le voit aujourd’hui au Mozambique. A Mogok, nous avons observé principalement des exploitations minières artisanales. Les mines mécanisées avec bulldozer, excavatrices, tractopelles ne sont pas majoritaires dans le paysage de la vallée…
Bien que Mogok compte une centaine de milliardaires parmi ses habitants, on nous a avoué que certaines mines restent très modérément mécanisées dans le but de faire travailler le plus de monde possible. Au cours de nos voyages, nous avons constaté un respect de la nature – les exploitations mécanisées n’utilisant pas de produits chimiques – et des populations de la part des responsables locaux. Mais cette situation est très fragile.
Conclusion :
Vers un deuxième tome ?
Aujourd’hui nous disposons d’une matière première très importante et nous pourrions sortir un deuxième livre! Je l’imagine plus scientifique. Il porterait sur les monstres et les bizarreries de Mogok et contiendrait une carte géologique et la tectonique de la vallée.
Que rapporter de Mogok ?
Certainement pas des rubis exceptionnels ! Les très beaux rubis sont vendus avant d’être trouvés et ils n’apparaissent jamais sur le « gem market » de Mogok. Il faut montrer « patte blanche » comme dans le livre de Joseph Kessel qui, lui, était accompagné de son ami le négociant en gemmes Pierre Rosenthal. Il y a une photo rare dans notre livre qui montre Kennedy Ho en train d’acheter un très beau rubis. Les échanges sont secrets, confidentiels.
La plupart des gemmes originaires de Mogok sont vendues en Thaïlande, à Bangkok, qui est la plaque tournante du commerce des gemmes en Asie. Dans un troisième temps seulement ces gemmes arrivent sur les marchés européens.
Il existe de nombreux marchés aux gemmes à Mogok : Cinema market, LeiOo market, Umbrella market pour n’en citer que quelques-uns. Ils ouvrent à tour de rôle au long de la journée et ont chacun un esprit différent que Jean-Baptiste Rabouan décrit bien dans le chapitre « le sang de la terre ».
Je recommanderai d’acheter des spinelles, les bruts autant que les gemmes taillées sont remarquables. Et des lots de pierres – c’est ce qu’il y a de plus intéressant.
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Mogok, la vallée des pierres précieuses
Sous la direction de Kennedy Ho
Direction scientifique : Emmanuel Fritsch
Photographies de reportage : Jean-Baptiste Rabouan
Candice Caplan, Thomas Hainschwang, Frank Notari.
Cartonné sous jaquette
192 pages. 39,50 €
A paraître le 24 octobre 2018. Glénat.
Et à relire,
Joseph Kessel, La Vallée des rubis, Éditions Gallimard, Paris, 1955, réédition 1973.
« Et je pensai qu’un jour, peut-être, le garçon haillonneux à la bicyclette déguenillée aurait assez de saphirs et de rubis pour bâtir, lui aussi, des temples » Joseph Kessel, La vallée des rubis.
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Conférence autour du livre, lundi 19 novembre 2018 à l’Institut de bijouterie de Saumur
avec Emmanuel Fritsch et Jean-Baptiste Rabouan
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Tous mes remerciements à Emmanuel Fritsch, Jean-Baptiste Rabouan et Franck Notari.