Suzanne Belperron et Aimée de Heeren : une amitié, un collier, une redécouverte
Récemment, le marché a vu brièvement réapparaître un collier de Suzanne Belperron dont on avait depuis longtemps perdu la trace. Les experts se sont penchés sur cette pièce avec respect et admiration – et notamment le premier d’entre eux, Olivier Baroin, qui a bien voulu nous faire part de ses impressions et exhumer pour nous la figure trop oubliée d’Aimée de Heeren, grande amie de Suzanne Belperron, mais aussi grande cliente qui rêvait de posséder un exemplaire de ce collier.
« Il s’agit d’une pièce exceptionnelle, provenant d’une collection privée européenne, que je n’avais jamais vue autrement que sur une photographie précieusement conservée par la créatrice dans ses archives », explique Olivier Baroin, expert de Suzanne Belperron et détenteur de ses archives personnelles. « Ce collier n’est sans doute pas une pièce unique, c’est l’un des exemplaires de ce type, conçu à la fin des années Trente et reproduit au fil des décennies par la créatrice ». Combien de pièces semblables existe-t-il ? Difficile à estimer selon l’expert… « D’autres modèles réapparaîtront probablement sur le marché une fois celui-ci dévoilé à la presse et au grand public. Je n’imagine pas que ce type de bijou ait pu être démonté par des héritiers lors de successions : l’esthétique du collier, véritable oeuvre d’art, supplante, une fois n’est pas coutume, la valeur intrinsèque du bijou. »
Influencée par l’engouement pour les arts africains collectionnés avec passion par les artistes français dès le début du XXème siècle, Suzanne Belperron aurait dessiné ce collier signature à la fin des années 30. Le dessin ci-dessous d’une parure or jaune et diamant est une déclinaison amincie du collier mis aux enchères ce printemps. Les clous d’or sont remplacés par une torsade d’or et de diamants, dessin typique du trait Belperron.
On retrouve le même collier que celui de la vente parisienne dans deux pages de publicité commanditées par la Maison Herz-Belperron. Femina et Vogue présentaient en 1948 le collier composé de multiples demi-cercles rigides en or, alternés de demi-cercles sertis de diamants, retenus de chaque côté par un clou de forme conique.
Ce collier a séduit les personnalités qui suivaient attentivement les créateurs et créatrices de leur temps, et influençaient les réputations, au premier rang desquelles Aimée de Heeren.
Aimée de Heeren (vers 1903-2006), ravissante mondaine d’origine brésilienne célébrée pour sa beauté, son originalité, son goût et son élégance, possédait une exceptionnelle collection de bijoux (la légende raconte que le Duc de Westminster, alors amant de Coco Chanel, lui avait offert des bijoux ayant appartenus à l’Impératrice Eugénie). En décembre 2007, The New York Times lui rendit hommage en ces termes : « when she died last year at 103, Aimee de Heeren — of New York; Palm Beach, Fla.; Paris; and Biarritz, France — became one more lost link to an earlier age of social grace and high society ».
A l’affût des talents de son temps, Aimée de Heeren faisait partie des grandes clientes de Suzanne Belperron. « On peut même aller jusqu’à dire qu’elle était une amie de Suzanne Belperron », précise Olivier Baroin.
Leur importante relation épistolaire, conservée dans les archives personnelles de la créatrice, témoigne d’une attention mutuelle qui s’étend au-delà des échanges relatifs aux commandes joaillières.
Aimée de Heeren, grande admiratrice du travail de Suzanne Belperron soutenait le projet d’un livre sur l’oeuvre de la créatrice, qui aurait été le couronnement de sa carrière. C’est ailleurs pour ce projet, dont Hans Nadelhoffer aurait été l’auteur, que la créatrice rassemblait cahiers de commandes et souvenirs. Aimée de Heeren offrit d’ailleurs à Suzanne Belperron un appareil pour enregistrer ses mémoires, et lui proposa aussi son soutien pour exposer à New York au MET !
En post-scriptum d’une lettre envoyée de l’hôtel Meurice (au début des années 1980) à sa « chère Amie », Aimée de Heeren décrit, d’un jugement pour le moins définitif, le collier d’inspiration africaine qu’elle avait aperçu des années auparavant chez Bernard Herz et dont elle avait étonnamment conservé intact le souvenir : « Si pendant que vous regarderez vos dessins, si vous tombiez sur celui de ce merveilleux collier en or et diamants, (d’inspiration africaine ?) qui avait de grands clous d’or et que j’ai vu chez Herz en 1939. (…) C’était vraiment merveilleux. Peut-on encore le répéter ? C’est rare un collier en or pour le soir qui soit original et pas les horreurs que l’on voit d’habitude ».
Il est touchant que la réapparition de ce collier fasse renaître tout un pan de la vie de Suzanne Belperron et en particulier cette amitié avec Aimée de Heeren, mondaine fantasque et impertinente incarnant un monde englouti.
Galerie La Golconde – Olivier Baroin
9, Place de la Madeleine. 75008 Paris.
Tel : + 33 (0) 1 40 07 15 69
Suzanne Belperron, Sylvie Raulet et Olivier Baroin,
La Bibliothèque des Arts (version française), 2011.
Antique Collector’s Club (version Anglaise)
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Les émeraudes de Mellerio, Van Cleef & Arpels et de Belperron : quelques pièces à ne pas manquer lors de la vente Sotheby’s, Joaillerie Paris, du 10 juin 2020
Sotheby’s présente dans ses salons parisiens une exposition de dix-sept pièces historiques de la maison Mellerio, dont la broche transformable et articulée en émeraude, saphirs, rubis, diamants, formant une plume de paon, achetée par l’Impératrice Eugénie en 1868 et un collier de chien en perles fines, or rose, diamants et émail réalisée en 1900. Cet hommage sera suivi de la vente le 10 juin 2020 de vingt-cinq bijoux Mellerio créés dans les cinquante dernières années.
COLLIER EMERAUDES ET DIAMANTS, MELLERIO, 1977
DEMI-PARURE EMERAUDES ET DIAMANTS, MELLERIO, 1979
BRACELET EMERAUDES ET DIAMANTS, MELLERIO, 1968
COLLIER/BROCHE EMERAUDE ET DIAMANTS, VAN CLEEF & ARPELS
CLIP EMERAUDES ET DIAMANTS, « HINDOU », SUZANNE BELPERRON
Sotheby’s, Joaillerie Paris, 10 juin 2020.
76, rue Saint-Honoré. 75008 Paris.
Téléphone + 33 (0) 1 53 05 53 05
Mellerio
9, rue de la Paix 75002 Paris
Te l: + 33 (0)1 42 61 57 53
Email: co*****@me******.fr
Ouvert du lundi au samedi de 10h30 à 19h
Mellerio, joaillier du Second Empire, Réunion des musées nationaux, 2016.
Mellerio dits Meller, joaillier des reines, Vincent Meylan, Editions Télémaque, 2013