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L'émeraude : état de l'art par Gaston Giuliani
Émeraudes, tout un monde ! publié aux Editions du Piat est le plus vaste panorama jamais édité sur cette pierre de légende.
L'ouvrage est né de la volonté de Gaston Giuliani, chercheur émérite à l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), d'établir la synthèse la plus exhaustive possible des connaissances actuelles sur l'émeraude. Quatre-vingt-six auteurs d'horizons variés (auxquels il m'a offert le privilège de me joindre) se sont réunis sous sa direction pour contribuer à cette somme.
A l'occasion du lancement de cet ouvrage collectif, Gaston Giuliani offre aux lecteurs de Property of a Lady une leçon magistrale sur l'émeraude. Rappelons brièvement le parcours professionnel de ce scientifique.
Gaston Giuliani a étudié la géologie à l’Université de Nancy de 1973 à 1982, année où il a obtenu son doctorat de 3èmecycle sur l’étude de minéralisations à tungstène. En 1985, il fut recruté avec le statut de chercheur à l’ORSTOM, rebaptisé en 1998 l’Institut de recherche pour le développement (IRD). En 1997, il a soutenu une deuxième thèse à l’Université de Nancy pour obtenir l’habilitation à diriger des recherches et encadrer des doctorants. En 1999, Gaston Giuliani est devenu directeur de recherche, position qu'il a conservée jusqu’en 2020, année où il a obtenu l’éméritat à l’IRD et l’Université de Lorraine.
Il est également membre de l’unité mixte de recherche Géosciences Environnement de Toulouse (Université Paul Sabatier) et du Centre de Recherches Pétrographiques et Géochimiques de Nancy (Université de Lorraine).
Ses recherches ont été réalisées dans le cadre de coopérations scientifiques internationales et en multi-partenariats avec des universités. Elles ont abouti à plus de deux-cent-soixante-dix publications - dont un article dans la revue Science - et à la formation de doctorants français et étrangers.
- Gaston Giuliani, vous êtes reconnu pour votre recherche sur "la géologie des gemmes (émeraude, rubis, saphir) dans différents environnements géologiques". Pouvez-vous nous dire à quoi correspond ce champ d'expertise ?

Photo : L.-D. Bayle
Mes recherches, menées en équipe depuis 1980, ont été consacrées à l'étude sur le terrain et au laboratoire des concentrations minérales non renouvelables. Elles concernent la circulation de fluides, les processus d'altération hydrothermale (transformations chimique et minéralogique) des roches, l'âge, l'origine et la nature des fluides minéralisateurs dans la croûte terrestre, les traceurs géochimiques et isotopiques des minéraux appliqués à la genèse des gisements métallifères et gemmifères.
Les thèmes choisis ont permis de contribuer à la connaissance du cycle géochimique de certains métaux, comme par exemple l'or et le béryllium (constituant fondamental de l’émeraude), dans les domaines magmatique, métamorphique et sédimentaire, mais aussi de contribuer au développement minier et de répondre aux problèmes pratiques posés par la prospection minière et artisanale.
Ces thèmes de recherche ont été réalisés avec des partenaires universitaires des pays du Sud et du Nord et en étroite collaboration avec les Services Géologiques des Ministères des Mines et de l'Energie et/ou des sociétés minières nationales ou privées de différents pays.
La recherche a permis de proposer des modèles de genèse des gisements et de leur prospection pour (i) les gisements d'émeraude du Brésil, de Colombie, du Canada, d’Afghanistan, du Pakistan et autres pays producteurs, (ii) les gisements de rubis associés aux marbres d'Asie centrale et du sud-est , (iii) les xénocristaux de rubis et de saphirs remontés par les basaltes alcalins continentaux, (iv) les gisements de grenat vert, variété tsavorite, dans la ceinture métamorphique mozambicaine de Madagascar, de Tanzanie, du Kenya et de l’Antarctique, (v) les concentrations à spinelles rouges à rosés associés aux marbres de l’Asie du sud-est et de l'Afrique de l'Est, (vi) les gisements de grenats démantoïdes verts qui se localisent dans deux environnements contrastés, qui sont soit des roches métamorphisées issues du manteau, soit des granites alcalins recoupant des calcaires.
- Comment en êtes-vous venu à vous intéresser à l'émeraude ?
Les thèmes de recherche développés dans le cadre de mes affectations scientifiques à l’IRD, qu'elles aient été de longue durée comme au Brésil, à Salvador de Bahia puis à Brasilia entre 1986 et 1991, ou de courte durée comme en Colombie (missions de 1988 à 1998), m’ont offert une première approche de l’émeraude. Cette recherche a permis la réalisation de grands projets internationaux à multi-partenariats menés notamment sur la genèse des gisements du Brésil et de la Colombie.
Ces études menées en Amérique du Sud ont fait l’objet de dix années intensives de recherches avec les partenaires colombiens et brésiliens et mes collaborateurs aux Universités de Nancy et Toulouse. Ces années ont été marquées par la soutenance de mastères et de doctorats, et par l’élaboration d’un nouveau modèle génétique pour la formation des gisements colombiens. La genèse de ces gisements, exploités depuis l’époque précolombienne jusqu’à nos jours et réputés pour l’excellente qualité de leurs émeraudes, est unique au monde. En effet, elle ne fait pas appel à la présence de granites qui sont généralement indispensables à la formation de l'émeraude.

- Vous aviez déjà participé à un livre sur l'émeraude il y a près de 25 ans. Quelles raisons ont motivé ce nouvel ouvrage ? De nouvelles problématiques liées à l’émeraude ont-elles émergé ces deux dernières décennies ?
La période de recherche active sur les gisements d’émeraude entre 1985 et 1998 a été soulignée par de nombreuses publications et l’édition d’un ouvrage intitulé L'émeraude, connaissances actuelles et prospectives (1998) publié en co-partenariat avec l'ORSTOM, le CNRS et l'Association Française de Gemmologie (AFG). Ce premier livre, écrit en français, a établi une synthèse mondiale sur les gisements d’émeraude.
Fort de mon expérience de terrain et en laboratoire via les projets de recherches menés par l'IRD avec les différents partenaires du Sud (Colombie, Brésil, Vietnam, Pakistan, Madagascar, Tanzanie, Kenya) et les données analytiques obtenues sur cette pierre avec différents laboratoires du Nord (France, Canada, Royaume-Uni, Suisse), je souhaitais la réalisation d’un nouvel ouvrage basé sur l’état de l’art pour cette gemme exceptionnelle et historique.

Émeraudes, tout un monde ! permet de découvrir l'histoire géologique de l'émeraude ainsi que les problématiques humaines, écologiques, sociales et géopolitiques reliées à cette pierre précieuse mentionnée dès Pline l'Ancien.

Cet ouvrage est né grâce à la collaboration toujours aussi efficace de quelques anciens partenaires scientifiques rattachés aux Universités et services géologiques des différents pays avec lesquels l'IRD et les Universités de Lorraine et Paul Sabatier ont collaboré et formé des étudiants depuis plus de 30 ans. D'autres partenaires scientifiques privés et industriels (gemmologie, joaillerie, histoire de l’art, muséologie) ont accepté également de participer activement à cette nouvelle aventure multidisciplinaire. Il faut ajouter la volonté et l'appui sans faille de l'éditeur qui s'est engagé dès le début pleinement dans l'aventure.
Divisé en soixante-six chapitres, ce travail fondamental propose aux lecteurs de découvrir l’histoire des jardins secrets de l’émeraude depuis sa formation à sa jusqu’à sa mise en valeur par le joaillier. Dans ce livre, richement illustré par plus de 1500 photographies, cartes, plans et graphiques, l’émeraude dévoile ses plus beaux atours !

Émeraude taillée de forme hexagonale, cabochon circulaire et saphirs calibrés, diamants taille ancienne, perles, platine et or blanc 18 carats (poinçons français), 3 ½ ins., 1910, non signé.
AGL, 2019, rapport n°. 1100327 : Colombie, amélioration de la clarté insignifiante à mineure, type traditionnel. Copyright Christie’s Images.
- Il est étonnant de constater, qu'indépendamment des gisements déjà connus, voire épuisés, l’on continue d'en découvrir de nouveaux aujourd'hui. Les mineurs extraient ainsi des émeraudes en Asie, en Europe, en Amérique du Sud et en Afrique. Pouvez-vous nous décrire les types d'environnement dans lesquels se forment ces gisements d'émeraude ?
Les gisements primaires peuvent être divisés en trois sous-types :
- Le type environnement magmatique où les gisements sont associés à la présence de granites (source du béryllium de l'émeraude) et de filons de pegmatites, d'aplites et de quartz qui recoupent des roches du manteau métamorphisées (basaltes, péridotites qui sont les sources du chrome et vanadium). Ces gisements se rencontrent entre autres en Zambie, Russie, à Madagascar et au Brésil.

Photo : Vincent Pardieu
- Le type environnement sédimentaire comme en Colombie où les gisements se localisent dans des séries d’argilites noires riches en matière carbonée, sources du béryllium, chrome et vanadium du bassin sédimentaire de la Cordillère orientale.

Photo : Gaston Giuliani
- Le type environnement métamorphique où des fluides circulent dans des failles en recoupant soit des schistes et des grès argileux, soit des calcaires métamorphiques (Vallée du Panjshir, Afghanistan), soit des roches du manteau métamorphisées (Santa Terezinha de Goias, Brésil).
Par ailleurs, des gisements non-économiques (sans valeur commerciale sur le marché) décrits en Australie (Poona), Autriche (Habachtal) ou en Egypte (Djebels Sikaït, Zabara et Umm Kabo) sont signalés dans des niveaux de la croûte terrestre plus profonds que ceux rencontrés en Afghanistan ou au Brésil.
- Ces trois types d'environnement définissent-ils des qualités d'émeraude ?

Naturellement, le type de gisement conditionne la qualité des émeraudes. Par exemple, pour les gisements de type environnement magmatique, 10% au maximum est de qualité gemme tandis que pour le type colombien en environnement sédimentaire 80% de la production est de qualité gemme.

L’émeraude colombienne se forme dans des géodes de calcite, et les cristaux n’incorporent pas d’une manière générale la gangue environnante ; l’émeraude brésilienne au contraire pousse dans une roche issue de l’interaction fluide-roche, et incorpore énormément d’inclusions comme les micas et les amphiboles.
- L'exploitation de leurs mines diffèrent-elles ?
Dans les exploitations artisanales, les techniques d’exploitation ne changent pas depuis le XXème siècle et l’utilisation de la dynamite, sans contrôle de sa puissance, endommage toujours les cristaux.
Dans les exploitations modernes comme en Zambie à Kafubu, l’exploitation à ciel ouvert sous la forme d’immenses carrières permet de séparer plus facilement de grands panneaux de roches où se situent les émeraudes lesquelles sont ainsi extraites sans grand dommage.
- Avez-vous parfois eu des surprises lors d'observations de terrain ?
Souvent ! En Colombie notamment, on peut trouver énormément de curiosités minéralogiques comme des gastéropodes dont la coquille en aragonite a été transformée en émeraude. J'ai eu la chance d'étudier ces spécimens avec des collègues : unique au monde ! Ou encore des émeraudes « vasos » qui sont de véritables verres miniatures pour l’heure de l’apéritif !


- Il y a une vingtaine d’années, vous aviez fait une importante découverte scientifique qui permettait d'identifier l'origine des émeraudes et de distinguer les naturelles de celles traitées ou synthétiques. Cette découverte, via l'analyse des isotopes stables de l'oxygène (élément majeur de l'émeraude) est-elle devenue pratique courante aujourd'hui dans les laboratoires ?
Absolument pas !
L'analyse des isotopes stables de l'oxygène est totalement ignorée. Pourtant, combinée avec d'autres techniques de routine, comme la caractérisation des remplissages et de la morphologie des cavités d'inclusions fluides piégées par l'émeraude, cette analyse est d'une efficacité redoutable pour identifier l'origine géographique.
Les sondes ioniques peuvent être également utilisées pour la caractérisation de l'origine géographique des tsavorites et des spinelles rouges associés aux marbres notamment ceux de Kuh-i-Lal au Tadjikistan. Ces derniers possèdent une signature isotopique en oxygène qui est unique.
- Quelles sont à vos yeux les découvertes les plus marquantes de ces dernières années ?
J'en vois trois principales.
La première découverte scientifique a trait à la formation des gisements et au rôle des évaporites (roches chimiques salines) dans la formation des gemmes métamorphiques (émeraude de Colombie, rubis et spinelle des marbres, grenat tsavorite et autres gemmes). C'est-à-dire que la présence d'évaporites dans les roches sédimentaires est un facteur essentiel lors d'une élévation de la pression et de la température (métamorphisme), car les sels fondus jouent un rôle fondamental dans la mobilisation des éléments indispensables à la formation de ces gemmes.
Les inclusions minérales et les fluides piégés par les gemmes issues du métamorphisme de roches de plate-formes carbonatées continentales sont des marqueurs précieux pour la compréhension de la formation de ces minéraux. Les indicateurs minéraux et fluides mettent en évidence la contribution majeure des évaporites par leur dissolution ou leur fusion au cours du métamorphisme. Les phases fluides, que ce soient les saumures à forte salinité circulant dans un milieu ouvert et à forte interaction fluide-roche ou les sels fondus présents dans un milieu fermé et à faible mobilité fluide, mobilisent les éléments indispensables présents dans les roches à la formation de l'émeraude, du rubis, du grenat tsavorite, de la tanzanite et du lapis-lazuli. À température élevée, les anions SO4--, NO3-, BO3-et F-issus des évaporites et les minéraux associés qui sont de puissants fondants, abaissent les températures des liquides ioniques chlorurés et fluorés, assurent le transport localisé de l'aluminium, du silicium et des métaux à l'origine de ces gemmes qui cristallisent au sein d'une phase liquide. Ainsi, ces gemmes soulignent l'importance du métamorphisme des évaporites et invitent les géologues à ne pas négliger l'importance de ce type particulier de roche.
La deuxième découverte concerne l’importance industrielle et économique des gisements : la Zambie est devenue un des plus grands producteurs mondiaux. Une particularité des gisements de la région de Kafubu est que la majorité de l’activité minière est réalisée en carrières à ciel ouvert.


La mine Kagem, avec ses 12 millions de tonnes de roches extraites par an et sa production annuelle d’environ 36 millions de carats d’émeraudes et de béryl, se présente comme une rareté emblématique dans l’industrie des pierres de couleur. Par ailleurs, la mine détient l’une des plus grandes flottes de machines minières de toute l’industrie des gemmes colorées et avec ses 40 millions de dollars US de dépenses annuelles d’exploitation, cette opération se place par son importance structurelle bien au-dessus des autres exploitations minières de pierres de couleur (Pardieu et al., 2022, Émeraudes, tout un monde !).
La troisième découverte est liée à la recherche fondamentale en gemmologie : l’analyse gemmologique des émeraudes est capitale pour les distinguer des imitations et synthèses, pour identifier leurs traitements et enfin pour déterminer leur provenance géographique.

Depuis deux décennies, la recherche et les critères utilisés pour attribuer une valeur à une émeraude ont énormément changé dans les laboratoires d’expertise. Les analyses de l’émeraude sont obtenues par l’utilisation de différentes techniques analytiques notamment la microscopie, la spectroscopie d’absorption (de l’ultraviolet jusqu’à l’infrarouge), la luminescence (imagerie et spectroscopie), la spectroscopie de diffusion Raman et enfin, l’analyse chimique en utilisant différentes techniques de grande précision et reproductibilité comme par exemple la spectroscopie sur plasma induit par laser et la spectrométrie de masse à plasma induit par couplage inductif par ablation au laser.
Par ailleurs, il est bon de se rappeler que la majorité des émeraudes est traitée et que les émeraudes de grande qualité non-traitées sont extrêmement rares.
Aussi, il est critique pour les laboratoires d’expertise d’identifier le traitement et de déterminer la nature de la substance présente dans les fissures et de caractériser son effet sur l’apparence de la pierre (Notari et al., 2022 ; Émeraudes, tout un monde !). Désormais, tous les laboratoires possédant de l’expérience dans ce domaine fournissent un travail de qualité et des rapports fiables, au bénéfice du consommateur.
- La recherche fondamentale est parvenue à un haut degré de connaissance sur l'émeraude. Y-a-t-il encore des recherches à approfondir ? A-t-on fait le tour de cette pierre précieuse ?
La recherche est en marche perpétuelle et la découverte de nouveaux types de gisements pose à chaque fois de nouvelles questions et problématiques sur leur genèse et leur origine géologique et/ou géographique.

Par ailleurs, l’amélioration de la performance des instruments analytiques permet de contribuer à une meilleure connaissance de la composition chimique (les éléments traces entre autres) des émeraudes tout comme l’utilisation de nouveaux géochronomètres pour obtenir des âges in situ sur les minéraux inclus dans les émeraudes.
On ne fait jamais le tour de l'émeraude ! C’est infini, mais il faut savoir ce que l’on recherche !
- Y-a-t-il des progrès que vous souhaiteriez voir s’enclencher, se réaliser dans les années à venir ?
Trois me semblent particulièrement nécessaires.
- L’utilisation rationnelle de protocoles de terrain pour l’étude des gisements. Par exemple, ne pas étudier un échantillon sans connaître réellement la nature de sa roche-mère et de son contexte tectonique.

- Utiliser le protocole d’échantillonnage des émeraudes et autres gemmes suivant la classification proposée par le gemmologue de terrain Vincent Pardieu. C'est-à-dire créer une banque de données suivant une codification caractérisant le type d'échantillon (le lieu où il a été recueilli, par qui, quand, dans quelles conditions). (Pardieu et al., 2022, Émeraudes, tout un monde !).
- La caractérisation systématique des inclusions fluides primaires et secondaires piégées par les émeraudes (morphologie, remplissage, composition des fluides, distribution, nature des micro-solides piégés dans les cavités). Ces inclusions fluides sont si différentes d’un gisement à un autre ! (Fristch et al., 2022, Émeraudes, tout un monde !). J’ai effectué une très grande partie de ce travail qui n'a pas été publié mais l'expérience montre que la caractérisation systématique des inclusions fluides primaires et secondaires des émeraudes, associée aux compositions isotopiques de l’oxygène, sont de puissants marqueurs d’origine géographique.
- Peut-on conclure avec une définition actualisée de l'émeraude ?

cm). Muséum d'Histoire naturelle de Grenoble MI.8674. Photo Louis-Dominique Bayle.
Je conserve la définition proposée par Schwarz et Schmetzer en 2002 : l’émeraude est la variété chromifère et/ou vanadifère du béryl.
Un minéral est par définition une espèce chimique solide ou fluide. Ainsi, l’émeraude est un silicate constitué majoritairement d'oxygène, de silicium, d'aluminium et de béryllium. Sa couleur verte est due à des traces de chrome et/ou de vanadium qui remplacent l’aluminium dans la structure du minéral.
***
Collectif sous la direction de Gaston Giuliani (2022), Les éditions du Piat

448 pages
Format : 24 x 31 cm
860 photos d’émeraudes
300 photos de paysages et documents anciens
140 cartes
160 dessins, graphiques et tableaux
Reliure rigide, finition haute de gamme, ouvrage en Français.
55 euros
Veuillez cliquer sur ce lien pour commander Émeraudes, tout un monde !
Visuel de "une" : Perle d'émeraude sculptée en forme de goutte de 82,08 carats.
(25,40 x 17,55 x 27,20 mm). Milieu à fin du XVIIe siècle
AGL, 2019, rapport n°. 1100309 : 82,08 carats, Colombie, amélioration de la pureté insignifiante, type traditionnel.
Christie's, New York, vente du 19 juin 2019 "Maharajas & Mughal Magnificence", lot 223.
Copyright Christie’s Images.
Pierres gravées. Camées, intailles et bagues de la Collection Guy Ladrière
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Entretien avec Guy Ladrière, le Prince des anneaux
Rencontre Quai Voltaire avec Guy Ladrière pour un entretien à propos de sa collection privée de glyptique – cet art ancien de graver les gemmes – qui sera exposée du 12 mai au 1eroctobre 2022 à Paris à l’École des Arts Joailliers sous le titre « Pierres gravées. Camées, intailles et bagues de la Collection Guy Ladrière ».
La Collection Ladrière unit l’œil et le goût d’un homme, expert passionné : Guy Ladrière. Remarquable à plusieurs titres, sa Collection embrasse une vaste étendue géographique (Asie, Afrique et Europe) et couvre près de trois millénaires d’art de la glyptique. Éclectique, elle rassemble aujourd’hui plus de quatre cents pièces dont la majorité sont des bagues. Hormis les plus fragiles, le collectionneur les porte au doigt au quotidien. Ce jour-là, une rare intaille en rubis insérée dans un lourd anneau d’or orne son annulaire droit. Touchante, la pierre gravée représente la Vierge portant l’enfant Jésus et le couvant du regard. L’image rappelle la sculpture gothique de la Vierge à l’Enfant allaitant du musée de Cluny ou celles du Louvre. Sur l’intaille en rubis, la Vierge et l’Enfant sont étroitement abrités par ce qui paraît être un oratoire ou une petite chapelle.

Collectionnés par Guy Ladrière depuis une quarantaine d’années, intailles (pierres gravées en creux) et camées (pierres qui, parce qu’elles présentent des couches superposées de différentes couleurs, sont gravées en relief) répondent en proportion miniature aux bas-reliefs antiques, aux monumentales sculptures gréco-romaines et aux bois polychromes médiévaux.

Serties sur bagues, broches et épingles, les œuvres de glyptique mettent en image le vaste panorama habité des dieux du panthéon égyptien, grec et romain, peuplé de personnages homériques ou ovidiens, de figures du pouvoir temporel, parfois issues de la Bible et d’animaux variés échappés des fables d’Ésope. Qui s’arrête et se concentre sur l’observation de cette multitude de détails finement gravés par lente abrasion de la pierre, sent le temps s’arrêter.

Écho lointain des balbutiements de l’écriture (intailles, sceau cylindre, cachet) ; témoin matériel des échanges commerciaux et des préoccupations agraires du quotidien ; réminiscence des croyances et de l’entendement du monde ; hommage aux hommes illustres puis objet de luxe fait ornement : les pierres gravées portent une multiplicité de significations.


De cet intérêt pour les bagues anciennes, Guy Ladrière a conçu l’envie de constituer une collection.
Dès ses premières acquisitions, chez Jean-Philippe Mariaud de Serres ou chez S.J. Phillips en 1976 lors de l’exposition de la Ralph Harari collection, il ne s’est fié qu’à un seul critère : la qualité de l’objet. « J’achète parce que cela me plaît », explique-t-il sans façon.
Figures de Zeus, d’Aphrodite, d’Amour aurige, de Mercure, de muses et têtes de Méduse (plus d’une douzaine !) se disputent leur prédominance dans la Collection face aux représentations de sujets héroïques, de portraits impériaux et de thèmes animaliers : taureaux bachiques, félins, chevaux au galop, aigles, serpents… etc. Y figure même, sous la forme d’un camée en sardonyx « la Merveille de Lisbonne », un singulier rhinocéros qui fut le second de son espèce à avoir été envoyé d’Inde en Europe en 1577.

« Tout me plaît, tout m’intéresse, dès l’instant que c’est très beau », répète-t-il. Le collectionneur n’adopte pas une approche encyclopédique ou systématique mais privilégie l’apparence et la qualité de l’objet. Ainsi, Guy Ladrière possède quelques Césars mais n’a pas jugé utile de rassembler les Douze.
Une des pièces les plus extraordinaires de la Collection est d’ailleurs l’intaille à l’effigie d’Auguste (63 avant J.-C. -14 après J.-C.). Rubis birman translucide d’un poids de 15 ct « en forme de demi-fève », ce cabochon ovale irrégulier d’un rose-rouge lumineux est profondément gravé, sur sa partie plane, du profil du premier empereur romain (dont le contre-type, l’impression révèle le profil gauche).
« Forma fuit eximia et per omnes aetatis gradus uenustissima ». Il fut extrêmement beau et de bonne grâce durant toute sa vie écrivait Suétone dans la Vie des douze césars (II,79). C’est indéniable.

Il est étonnant néanmoins de constater que sur ce rubis, l’Empereur n’est représenté ni sous des traits divinisés, ni selon les canons de l’idéal grec ; son visage est marqué des rides du sillon nasogénien et d’une bosse nasale qui accentue son nez « aquilin et fin ». La gravure paraît d’une authentique précision. De ce saisissant profil émane une impression de solennité et de grandeur. Le regard s’en détache difficilement. Il est aujourd’hui tenu pour quasi certain que le glypticien qui a créé ce chef-d’œuvre fut un contemporain grec d’Auguste, qui vivait à Rome au Ier siècle et dont le nom figure au panthéon des plus célèbres glypticiens : Dioscoride.
Guy Ladrière se souvient combien il a été fasciné à la vue de la bague en or rehaussée du contre-type de l’intaille d’Auguste que portait le marchand parisien Michel de Bry. En 1989, l’intaille fut mise en vente à Paris. Sans hésitation aucune, Guy Ladrière arracha l’enchère. Depuis, cette intaille qui servit de sceau à Auguste et dont Suétone précise que « ce dernier cachet fut celui dont les princes ses successeurs continuèrent à faire usage » (Vie des douze césars, II, 50) forme le cœur battant de la Collection Ladrière.
Il n’y a pas eu à proprement parler de grandes étapes dans la constitution de la Collection car Guy Ladrière achète en ventes publiques, chez des marchands établis ou des antiquaires ( Codognato, Sam Fogg, S. J. Phillips, Adrien Chenel) à un rythme régulier. Si la glyptique reste son champ de prédilection, il collectionne également les vases en pierre dure et les médailles. Parfois, il acquiert plusieurs gemmes gravées d’un seul coup. Ainsi des quatre têtes de « Méduse » acquises à Milan et provenant de la collection de Giovanni Pichler (1734-1791) ou de Luigi Pichler (1773-1854), riche en trésors.


Naturellement, lorsque l’on retrace la provenance historique des intailles ou des camées les plus célèbres, on est frappé par les lignées de collectionneurs illustres qui se sont succédé. Que ce soit dans l’Antiquité, dans l’Occident médiéval ou à la Renaissance, les plus belles pierres gravées, celles à la virtuosité technique exceptionnelle ont connu un constant remploi car toujours elles ont été considérées comme précieuses, et donc recherchées des grands personnages : souverains, aristocrates, haut clergé. Sans pose ni snobisme, avec aplomb même, Guy Ladrière avoue « cela ne m’influence pas lorsqu’on me dit qu’un objet provient de chez untel ou untel ». Mais bien évidemment, la provenance d’une pièce de grande beauté augmente le prestige de l’objet.

Ainsi, ce camée Renaissance tout en volutes au profil de Sémiramis (ou allégorie de la lune) qui appartenait au plus important collectionneur d’antiquités du XVIIIe siècle, le Cardinal Alessandro Albani (1692-1779) ou bien encore cet impressionnant « anneau des vendredis » précieusement gardé par le pieux roi de France Charles V (1337-1380) et dans l’ovale duquel s’inscrit une scène de crucifixion unissant autour du Christ, la Vierge, Saint Jean et deux angelots appuyés sur la croix. Lorsque Guy Ladrière a fait l’acquisition de cette importante pièce, il la rapprochait alors des pierres gravées de la collection de Frédéric II Hohenstaufen (1194-1250).

Parmi les pierres gravées de la Collection qui font référence à la royauté (Elisabeth I d’Angleterre, Philippe II d’Espagne) et à l’histoire de France (René d’Anjou, François I, Anne d’Autriche), j’aime particulièrement le camée en sardonyx sur fond rouge de Louis XIII (1601-1643). Le buste, noble, est présenté sous son profil droit. Cheveux ondulés ceints d’une couronne de lauriers, moustache en croc et barbiche en pointe, le jeune roi est enserré d’un col fraisé, d’une armure délicatement ciselée sur laquelle repose un épais ruban auquel est suspendu la croix de Malte, emblème de l’ordre du Saint-Esprit. Quoique académique, la gravure est imposante et d’une grande finesse. Le camée est rehaussé par l’élégance de la monture : quatre perles fines aux points cardinaux entre lesquelles alternent diamants taille ancienne encadrés d’or et motifs de palmettes. Un portrait de part en part royal.

Le travail « scientifique » vient dans un second temps pour le collectionneur. Les pièces de glyptique ne sont qu’exceptionnellement datées ou signées, et leur origine reste bien souvent délicate à déterminer. Par des lectures d’ouvrages spécialisés et des visites assidues, des années durant, dans les musées parisiens (Cabinet des médailles de la BnF, Musée de Cluny, Louvre) et européens (British Museum, Museo archeologico di Napoli, Palazzo Pitti, Kunsthistorisches Museum), Guy Ladrière a su empiriquement se constituer une érudition et une expertise rares.

Lorsqu’il réalise une acquisition, il se fie à une première idée. Puis, la pièce obtenue, « je l’étudie à fond, dit-il : époque, lieu où elle a été créée, matière, sujet ». Guy Ladrière s’entoure de spécialistes pour étudier ses pièces. Lire, déchiffrer, analyser, comprendre une œuvre de glyptique suppose une culture variée. Il n’est pas prérequis d’être gemmologue, historien de l’art, antiquaire ou glypticien mais idéalement, il faudrait être un peu tout cela en même temps ! Les sculptures antiques aident-elles à la reconnaissance de figures ou de thèmes sur les œuvres de glyptique ? « Ce sont souvent les numismates, répond Guy Ladrière, qui reconnaissent les portraits en glyptique ».
Lorsque Guy Ladrière a acheté l’étonnante bague en or gravée d’un porc-épic, il avait idée de sa provenance ayant connaissance de l’emblème personnel de Louis XII (1462-1515) (Cf Ecu au porc épic de Bretagne de Louis XII conservé au musée Carnavalet). Cependant une mystérieuse devise écrite en rétrograde « temps je attens » sur la tête de la bague et dans l’anneau l’intriguait, sans qu’il puisse parvenir à en deviner complètement le sens. Un ami historien médiéviste en a résolu l’énigme, exposée par Philippe Malgouyres dans son catalogue raisonné. Louis XII désirait ardemment que son épouse Anne de Bretagne lui donnât un héritier...



Guy Ladrière rend souvent grâces à son mentor, Charles Ratton (1895-1986), qui était expert, marchand et collectionneur. « Je lui dois tout », dit-il sans ambages. C’est une passion commune pour le Moyen-âge qui les a initialement réunis. D’ailleurs encore aujourd’hui, quand nous interrogeons Guy Ladrière sur une époque préférée entre toutes, il avoue : les Carolingiens. L’ironie est qu’ « on trouve des ivoires et des manuscrits carolingiens mais pas de bagues » !
L’histoire de l’art du XXe siècle a surtout retenu le nom de Charles Ratton pour le rôle majeur qu’il a joué auprès de ses contemporains dans la connaissance et la diffusion des arts d'Afrique, des Amériques et du Pacifique. Il est, rappelle Guy Ladrière, le seul marchand à ce jour à qui un établissement public, le Musée du Quai Branly-Jacques Chirac, ait consacré une exposition. C’était en 2013, sous le titre Charles Ratton, l’invention des arts « primitifs ». Quatorze années durant, Guy Ladrière a travaillé à ses côtés, s’associant sur le tard (en 1984) avec lui. En « fils spirituel », il a acquis les archives de Charles Ratton, son « musée personnel » et son bureau, ensemble qu’il conserve intact entre la Rive droite et son appartement.

Ennemi des mondanités, parfois bourru lorsqu’il faut éloigner les curieux, mais prolixe, bienveillant et chaleureux dans son cercle intime, Guy Ladrière est reconnu de ses pairs qui apprécient son « œil ». En 2016, une soixantaine de pièces de la Collection avait été présentée pour la première fois chez le galeriste londonien Sam Fogg, spécialiste de l'art du Moyen Âge européen. L’événement avait été accompagné de la publication en anglais d’un premier ouvrage The Guy Ladrière Collection of Gems and Rings, rédigé sous l’égide de Diana Scarisbrick, avec Claudia Wagner and John Boardman. (Philip Wilson Publishers in association with The Beazley Archive, Classical Art Research Centre, University of Oxford, 2016).

Cette année, pour L’École des Arts Joailliers, c’est Philippe Malgouyres, conservateur en chef du patrimoine au département des Objets d'art du musée du Louvre et commissaire de l’exposition, qui consacre un ouvrage magistral à la Collection Ladrière aux éditions Mare & Martin : Pierres gravées. Camées, intailles et bagues de la Collection Guy Ladrière. Il co-publie également avec L’Ecole des Arts Joailliers un Hors-série Découvertes Gallimard intitulé Camées et intailles : l’art des pierres gravées.
A l’œil du collectionneur viennent ainsi s’ajouter les regards croisés de Philippe Malgouyres et d’un « graveur-sculpteur sur pierres dures et pierres fines », Nicolas Philippe, au sein de l’exposition orchestrée par l’École des arts joailliers. Ce sont des clefs précieuses qui seront ainsi offertes aux visiteurs venus traverser siècles et continents pour contempler ces chefs-d’œuvre uniques de la glyptique, et s’initier à un art devenu aujourd’hui si rare.
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L’École des Arts Joailliers
31, rue Danielle Casanova, 75001 Paris Tel. 01 70 70 38 40
Exposition du 12 mai au 1er octobre 2022
Ouvert du mardi au samedi, de 12h à 19h
Entrée gratuite, sur réservation
Réservez votre créneau sur www.lecolevancleefarpels.com

A lire :
Guy Ladrière, a very special collector ... in Paris Diary by Laure
Visuel de "une" : Profils d’homme et de femme. Camée en agate. France, Pays Bas ou Allemagne, XVIe siècle. Collection Guy Ladrière. Photo Benjamin Chelly
Santi Jewels by Krishna Choudhary, an ode to Mughal jewellery
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"My great desire is to tell the world about the rich history and culture of India through the story of my family.”
Krishna Choudhary represents the eleventh generation of a family of jewellers who have been practising their art in Jaipur since the 18th century. Of Hindu origin, named after one of India's most revered and popular deities, Krishna has a long-standing passion for the history of the Indian subcontinent, its ancient artefacts and especially for the decorative arts of the Mughal period (1526-1857).



After graduating from Middlesex university London, he completed his studies in Islamic history and Hindu arts at the School of Oriental and African Studies (SOAS). In 2011, he completed a degree in gemology at the Gemological Institute of America. He then returned to his hometown, Jaïpur, to train at his family's business, Royal Gems & Arts. In 2018, Krishna Choudhary moved back to London and in 2019 he opened his own jewellery house: Santi Jewels. Located in a private salon in Mayfair, Santi Jewels is characterised by elegantly understated pieces adorned with dazzling gems and multiple references to Mughal jewellery. As a whole, Krishna's creations pay homage to his father, Santi, to the jewellery tradition of his native Jaipur, and to the even more distant tradition of India. Krishna nevertheless remains a man of the 21st century. Nourished by an ancestral tradition, he manages to break away himself from it in his own creations. We met to go back in time to discover his roots, influences and artistic tastes, references that allow us to fully appreciate the refinement of his creations.

The Choudhary family, Royal Gems & Arts and the Pink City of Rajasthan
Krishna Choudhary’s ancestors came from Dausa, a town fifty-five kilometres from the capital of Rajasthan. They settled in Jaipur in 1727, twenty years after the reign of the last “Great Emperor” Mughal Aurangzeb (r. 1658-1707) ended. The patriarch Choudhary Kaushal Singh was initially a financial advisor to Maharaja Sawai Jai Singh II (1686-1743), the founder of the city of Jaipur. He was in charge of minting coins and lending money, and also managed a Jagiri (i.e. an estate) of eleven villages around Jaipur. His role was to maintain law and order and to collect revenues and taxes. Choudhary Kaushal Singh soon rose to prominence in the Royal Court of Jaipur.

© The Trustees of the British Museum

Over the decades, the “Choudharys” became gem dealers and jewellers. “This transition occurred several generations before my grandfather, says Krishna Choudhary, but although we have records going back to 1696, we don't know exactly when”. Initially settled on the site where the Hawa Mahal, the Palace of the Winds, was built in 1799, the Choudharys then lived for a time opposite this Palace before settling permanently in the early 19th century in what is still today their family haveli “Saras Sadan”. This haveli houses the family business, Royal Gems & Arts. It is a unique place where the walls are entirely decorated with colourful frescoes from the late 18th and early 19th centuries. Plants and garlands of flowers, rosettes and geometric patterns, draperies and gilding stand alongside the legends of ancient India - an innumerable pantheon of gods, Maharajas, Hindu princesses, horsemen and scattered clouds of birds. For the visitor, and I was lucky to be one, it is tempting to stay for hours in this wonderful atmosphere; fortunately for the master of the place, Santi Choudhary, the brilliance of the jewels and precious objects displayed in the wooden niches of the walls quickly attracts the visitor's eye!

Jaipur, over three centuries of jewellery tradition
The link between Jaipur and jewellers dates back to the early 18th century, when the city was founded by Maharaja Sawai Jai Singh II. He was a central figure in the Mughal dynasty, although he was a Hindu. At the head of his armies, he supported Emperor Aurangzeb, then his successors, and in return enjoyed imperial protection. Having become privileged and powerful thanks to this alliance, Sawai Jai Singh II brought to his court renowned artisans, including jewellers, who all participated in the development of the city and dissemination of the arts.
Three centuries later, Jaipur is a major centre for international jewellery. Professionals go there to cut and trade coloured stones. For example, three quarters of the world's emeralds are cut by lapidaries in Jaipur! “Diamond cutting, which requires a different kind of expertise, is mainly done in the city of Surat, and its trade in Mumbai” says Krishna Choudhary.
It is also in the Pink City that 90% of Indian kundan settings are made. This setting technique appeared during the reign of Emperor Jahangir (r.1605-1627), an important aesthete and patron of the arts whom Krishna Choudhary greatly admires. The kundan consists in surrounding a gem with a thin sheet of pure gold to fix it well in its support. The manipulation is done at room temperature and the setting is done by molecular bonding. This technique of inlaying gems, still in use today, allows the jeweller to work on any type of surface (gold, rock crystal, jade) and to set stones of various shapes.

Another typical art of Jaipur is that of enamelling, even if it tends to be “not as good as it used to be”, regrets Krishna. Red, blue, green and white are the signature colours of Jaipur enamel.

Finally, the capital of Rajasthan is also renowned for its jewellery. Designers come here from all over the world to buy or have their jewellery made; as for tourists, it is “at the Johri Bazaar that they can buy gold or silver jewellery, while the Bapu Bazaar is more devoted to costume jewellery” explains Krishna Choudhary.
The Pink City, a favourite place for jewellery professionals and enthusiasts, is part of a larger and even older history of jewellery in India.
A glimpse into an age-old art: jewellery in India
Hindu beliefs about precious stones
There are many texts on the importance of coloured stones and diamonds in Vedic literature. “Each stone, explains Krishna Choudhary, has particular spiritual and cosmological significance and is classified according to a hierarchy of value”. Thus, the five most important gems are grouped under the name Maharatna (ruby, diamond, emerald, sapphire and pearl) and the next four under the name Upratna (coral, garnet, cat's eye and yellow sapphire). The gem par excellence for Hindus is the ruby, Ratnaraj, which is associated with the sun.
“In the Hindu culture of ancient India, says Krishna Choudhary, the most beautiful stones and jewels were offered to the temples. The king came second”. However, all Hindus adorn themselves with jewellery, more or less richly, depending on their place in the hierarchy of the caste system. This is often shown in ancient Hindus statues.

@The MET Fifth Avenue
Some typical characteristics of Hindu jewellery

Hindu jewellery is traditionally mounted on yellow gold. It is brightly coloured by precious or semi-precious stones cut in cabochon, pear, shuttle-cut or presented in the form of pearls. The main colours that come to mind when thinking about this jewellery are green (emerald, enamel), red or pink (ruby, spinel, tourmaline) and white (pearls, enamel). Necklaces, bracelets and head ornaments are studded with flat diamonds, simply polished, as jewellers continue the age-old tradition of keeping as much weight as possible on the gem compared to the rough. Cultural references appear in the designs, such as the sun, certain flowers (lotus, water lilies, orchids or jasmines) or the makara, the mythological creature with multiple symbols - half terrestrial-half aquatic - and which can be recognised by its attributes: a trunk on the top of the head, a gaping mouth and the tail of a fish or marine animal at the end of the body. “This type of jewellery, says Krishna Choudhary, is very popular in India, and can be found in all the workshops in the country, with some variations depending on the state”.
According to Krishna Choudhary, the essence of Indian jewellery could be defined by this aphorism: “More is more”. In contrast, the jewellery pieces he has been creating since 2019 are characterised by “Less is more”. More than the Hindu tradition, his sensibility leads him to Indo-Mughal art, influenced by Persian culture and Islamic Arts.

The Mughal contribution to Indian aesthetics
“In the arts of Islam, the representation of the living is banned from the spiritual or sacred domain but not from the private or profane domain”, says Krishna Choudhary. Thus we find scenes of daily life (court ceremonies, hunting, romantic or warlike scenes) as well as an important animal and plant iconography on buildings, in interiors, on textiles, tapestries, ceramics, illustrated manuscripts and in jewellery.


From the time of their arrival in India in the 16th century, the Mughal emperors developed plant and floral motifs extensively in their arts. There are two main reasons for this, explains Krishna Choudhary: “The first is the nostalgia of these emperors for the gardens of the East, Babur and the gardens of Samarkand, Humayun and the Persian gardens, Shah Jahan and the gardens of Shalimar etc... The second reason lies in the symbolism of the garden which in Islam represents paradise, peace and divine grace”.

Some characteristics of Mughal jewellery

In Islamic art, there is a metaphorical language of colours. Applied to jewellery, the red of spinels imported from Badakshan (a mountainous region bordering Afghanistan and Tajikistan) expressed power and royalty. Emperors liked to wear long necklaces around their necks with spinels in the form of large oblong pearls combined with sumptuous emeralds imported from Colombia, and large pearls. The deep green of the emeralds was imbued with spiritual virtues and recalled the prophet's favourite colour. As for the fine pearls, fished in the Persian Gulf, they symbolised purity and were the most commonly worn gems of the Mughal emperors. Krishna Choudhary sees a practical reason for the abundant use of fine pearls in Mughal jewellery: they were simply easy to wear and fitted perfectly into the Mughal's flowing, loose-fitting clothes.

The most beautiful gems were sometimes engraved and became the central element of the jewellery. Spinels were engraved with royal titles, emeralds, protective amulets, calligraphed with verses from the Koran and/or decorated on their other side with floral motifs. Flowers and plants were represented in a naturalistic figurative style but were sometimes idealised, particularly in the designs of “celestial flowers”. The floral species of the Mughals differed from those favoured by the Hindus, notes Krishna Choudhary. The rose was a particularly beloved motif, and the Emperor Jahangir and his Persian wife Nur Jahan were devotees and encouraged its cultivation. But there were also tulips, poppies, carnations, irises, daffodils, lilies etc...

Some rare diamonds were also engraved. For example, the Shah rough diamond in the Kremlin Diamond Fund collections is engraved with the names of three of its owners: Nizam Shah (1591), the Mughal emperor Shah Jahan (1641) and Fath Ali Shah (1826).
Setting technique most closely associated with Mughal jewellery is kundan, mentioned above.
Jewellery making in India (from the north of the subcontinent to the Deccan plateau) underwent a profound evolution during the Mughal period. The craftsmen of the royal workshops skilfully combined the best of the Indian jewellery tradition with Persian influences and a style was born. This style, which embraced the jewellery arts, endured despite the decline and fall of the Mughal Empire. When India came under British control in 1858, the Mughal style gradually extended its influence on Western aesthetics.
The 20th century: jewellery influences shared between India and the West?

Indian aesthetics and Mughal jewellery strongly inspired the great European jewellery houses, which reinterpreted the combinations of gems, the shimmering mix of colours, the shapes - in particular the paisley motif in the shape of a teardrop with a curved upper end - and the use of engraved stones. The major jewellery houses of the first half of the 20th century, however, resisted the use of yellow gold because platinum was in vogue. Jewellery literature abounds with extravagant stories of Maharajas from the richest princely states in India coming to London and Paris to have entire chests of precious stones set in platinum. Conversely, the influence of European jewellery in India is rarely discussed.
Krishna Choudhary recalls that under the British Raj, jewellery workshops were created in Calcutta for Europeans who came to live or visit India. Jewellery inspired by what was done in Victorian London (1837-1901) appeared between the 1860s and 1880s. This influence of European design can be seen in the shape of several late 19th century rings from the Nizam collection in Hyderabad (see Jewels of the Nizam, Usha R Bala Krishnan, p.221-223). In contrast, yellow gold remained the precious metal of choice for Indian jewellers for decades to come. Since the 1980s, a new breed of jewellers, including Krishna Choudhary, has been breaking away from it.

It is astonishing to note that since the conquest of the Great Mughals, no new foreign influence has imposed itself on India; Westerners played an important but indirect role during the last third of the 20th century.
Independence, end of privileges and abolition of the privy purse: Indian jewellery in danger
The year 1947 was marked by the dissolution of the British Empire followed immediately by India's Independence on 15 August. At the time of Independence, there were 555 princely states covering almost half of India's territory and about one-third of its population. Under the Indian Independence Act and the incorporation of the various princely states into India or Pakistan, the various rulers (Maharaja, raja, Nizam...) were forced to give up their power in exchange for “privy purse” (a tax-free private grant of about a quarter of what they had previously earned).
Twenty years later, in 1971, Indira Gandhi (1917-1984) abolished the privy purse. Until then, these rulers had been the main sponsors of jewellery in India: their relative impoverishment was not without consequences for the Indian jewellery market.
Krishna Choudhary believes that the Indian jewellery industry was able to survive after independence thanks to foreigners. Many Western jewellers, following in the footsteps of Jacques Cartier, came to India to buy gems and engraved stones, not hesitating to acquire, when possible, elements of princely finery from penniless sovereigns. Media personalities such as Jackie Kennedy and her sister Lee Radziwill contributed to the watered-down, romantic image of India, while discerning collectors such as Sheikh Nasser Sabah al-Ahmad al-Sabah and Sheikha Hussah Sabah al-Salem al-Sabah of Kuwait came in 1975 to acquire the first pieces of their extraordinary collection of Islamic art.


“It was in the 1960s, under the leadership of my father Santi Choudhary, adds Krishna Choudhary, that our family business was renamed “Royal Gems & Arts” in order to open it up more to international trade”. Until then, trade was conducted on the floor on large Persian carpets, as seen in the photographs of Jacques Cartier's trip to India in the 1920s and 1930s. Santi Choudhary began travelling to Europe in the 1970s to organise exclusive exhibitions of his creations. Today, Royal Gems & Arts has become an institution whose name regularly appears on the list of art exhibition lenders around the world.
Khrishna Choudhary & Santi Jewels

Krishna Choudhary is undoubtedly an heir to this long jewellery tradition. This legacy he received at birth is of immense wealth; it is also heavy with responsibility. Krishna Choudhary is aware of this. His extreme courtesy, great culture and deep modesty testify to this at each of our meetings. Krishna admits his humility in front of the treasures at his disposal. He works essentially with gems drawn from a family treasure accumulated over three centuries. The gems he uses most are the Maharatna: diamond, emerald, sapphire, pearl - but he readily replaces the ruby with spinel, the gem most associated with the Mughal Emperors.

In this spirit, Krishna Choudhary has created a pendant composed of six flat spinels of heptagonal shape coming from the same mine, of which only one, placed at the top of the motif, has been slightly re-cut. (It should be noted that Krishna Choudhary, out of respect for the historical stones for which he creates new settings, tries as much as possible to keep them in their original size. If re-cutting is necessary, it is then entrusted to the hands of the best workshops in Jaipur). The spinels of a delicate pink and perfect purity, held by four fine yellow gold claws, form the petals of a stylised flower, the heart of which is a square old-cut diamond set on brilliants. A heavy diamond dewdrop drips from the flower. The jewel rests on a black silk cord in the pure Indian tradition. A double leaf on each side of the cord, or perhaps four paisleys, rests on the collarbones. The clasp repeats the same motif, but with lines of diamonds encircling a final spinel, this one octagonal. A true testament to the flat stone in India, this jewel celebrates India's heritage in a very contemporary style.


Krishna Choudhary likes to work with abstract, geometric figures. He has a predilection for herringbone patterns that combine geometry with movement and refer indirectly to the vast water features (pools, fountains, canals) that refreshed Mughal gardens. Two pairs of earrings of a completely different style, one in gold and diamonds cut in the shape of a paisley, the other in titanium and diamonds, symbolise this movement of water in the form of graphic chevrons.
When asked about the symbolism of the gems, Krishna Choudhary says that he does not attribute talismanic properties to the stones he works with: “I use them because I like them, because they have a history. I can be inspired by their ancient charm, but I do not rely on astrology or religion”. A proof of this is his passion for sapphires - a gem perceived by Hindus as potentially a bad omen because it is associated with Saturn. Santi Choudhary has in his private collection a magnificent Mughal-era cabochon star sapphire that is so large that it cannot be closed with the fingers. He called this exceptional sapphire "Krishna".

Courtesy Royal Gems Jaipur. Photo Ashish Sahi
Santi Choudhary, Jaïpur, the Mughal Emperors and India are the primary influences that nourished Krishna Choudhary, but did he have other less direct natural influences? Krishna answers immediately “The Cartier brothers because they took the quintessence of Indian jewellery and magnified it. I see a distant parallel with Mughal jewellery, which also drew on the best of different traditions to create a unique style”. JAR's unconventional designs gave Krishna the courage to dare new materials such as titanium; Suzanne Belperron (1900-1983) and her French style, and Ambaji Venkatesh Shinde (1917-2003) who made sumptuous baguette diamond necklaces for Harry Winston, are also a source of admiration for the jeweller.

Santi Jewels is aimed at connoisseurs who enjoy the dialogue between the ancient and the modern that Krishna Choudhary subtly allows in the six to seven pieces he designs each year. In a time that sometimes gives in to the conveniences of mass production, this respect for tradition, this rootedness, this ability to make the contemporary resonate with the heritage are of great cultural and aesthetic value, making each piece an event in itself.
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Santi jewels, by appointment only
Royal Gems and Arts
3768, Saras Sadan, Gangori Bazar
Jaipur, Rajasthan 302001, India
Victoria and Albert museum
Cromwell Rd, London SW7 2RL
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Update September 19, 2022
Selling Exhibition Jewels by Santi
20 – 23 September 2022
Phillips London
30 Berkeley Square. London W1J 6EX
Phillips presents Jewels by Santi, a selling exhibition of the exceptional new creations by designer Krishna Choudhary together with many of the historical Mughal jewels and objects that inspired them.
London calling : la nouvelle vie de Fawaz Gruosi
Londres, avril 2021- Après une troisième et longue phase de confinement initiée en décembre dernier, les boutiques, et les terrasses d'Angleterre viennent enfin de rouvrir leurs portes. Inaugurée en décembre dernier, mais refermée aussitôt en raison du nouveau « lockdown », la première boutique « Fawaz Gruosi » célèbre ce mois-ci son ouverture officielle.

Une ouverture qui surprend et intrigue
Pour ce nouveau lancement, le joaillier a choisi de s’installer non pas sous une nouvelle marque mais sous son nom propre : Fawaz Gruosi. Est-ce de l’audace ? un défi ? une revanche ? Ou simplement la continuité d’une expression et d’un talent artistique ?
En chemin, je m’interroge. Comment un homme qu’on imagine atteint voire meurtri (1), peut-il avoir la volonté, l’énergie et le courage de recréer une Maison de joaillerie, surtout dans le contexte actuel ? Qui est cet homme que l’on compare à un phénix, à qui l’on attribue neuf vies tel un chat et qui, comme Icare, se serait envolé trop haut pendant la dernière décennie ?
Né à Damas le 8 août 1952 d'un père libanais et d'une mère italienne, Fawaz Gruosi a commencé à travailler au sortir de l’adolescence et, après avoir fait ses classes dans plusieurs Maisons prestigieuses (Torrini à Florence, Harry Winston et Bulgari), a fondé De Grisogono à Genève en 1993.
De Grisogono s’est rapidement hissée au rang des « Grandes Maisons » de joaillerie internationale. Pendant un quart de siècle, la Maison s’est illustrée par des créations joaillières caractérisées par d’importants volumes, des couleurs à l’extrême vivacité, des formes en mouvement, souples, ondoyantes, des bijoux finement exécutés et des matériaux innovants. Fawaz Gruosi est celui qui à l’aube du XXème siècle a lancé la mode des diamants noirs (dont l’opacité est liée aux des inclusions qu’ils contiennent) puis celle des diamants blancs (dans lesquels la présence d'inclusions sub-microscopiques engendre un aspect translucide blanc « laiteux »). Il a fait l’actualité à plusieurs reprises, en 2007 avec la bague « Spirit of de Grisogono diamond » ornée du plus gros diamant noir taillé au monde, en 2016 avec l’acquisition pour 63 millions de dollars d’un extraordinaire diamant brut de 813 ct « The Constellation diamond » ; la Maison a connu son heure de gloire en novembre 2017 avec la vente record du collier « The art of de Grisogono - creation I » orné en son centre d’un diamant taille émeraude de 163,41 carats (taillé dans un brut de 404,20 carats) d’une qualité rare.
L’image de Fawaz Gruosi telle qu’elle apparaît dans les médias et sur les réseaux sociaux jusqu’à l’été 2018, donne à voir un homme familier de la jet-set et du star-system, hôte de somptueuses réceptions - à Cannes en mai, à Porto Cervo en août - et un infatigable voyageur qui parcourait le monde pour visiter ses dix-huit boutiques et rencontrer sa clientèle.
Munie de ces clichés, intriguée par cette nouvelle aventure joaillière, prête aussi à renouer avec des créations inédites et des gemmes de qualité dont le confinement m’avait trop longtemps privée, j’arrivai à mon rendez-vous.

Mardi 13 Avril 2021 - 20-22 Berkeley square, Mayfair.
Installée à côté de Fawaz Gruosi, sur un canapé rouge sang dessiné par Mattia Bonetti et à distance du mètre réglementaire, je découvre un homme élégant, courtois, réservé au premier abord mais dont le regard s’illumine dès qu’il a en mains les bijoux qu’il a créés. Il me raconte les nombreux dessins réalisés depuis deux ans et demi, en particulier ceux de ces quatre derniers mois de confinement, qui recouvrent les murs de l’atelier en Suisse. Avec enthousiasme il décrit les gemmes qu’il a acquises, soulignant principalement l’intensité de leur couleur lorsque je m’étonne de leur pureté.
Je réalise rapidement qu’à travers les hauts et les bas, ce qui est resté intact, c’est sa passion pour la joaillerie. Là est le cœur du sujet et, probablement, le ressort de ce nouveau lancement. « J’ai la chance de pouvoir recommencer dit-il posément, j’ai créé cette marque parce que je sentais que je pouvais faire encore mieux qu’auparavant ».

Fawaz Gruosi », le pari Londonien
Fawaz Gruosi est l’exemple-type d'un « citoyen du monde » : né à Damas, il a vécu à Beyrouth sa prime enfance, puis à Florence, à Jeddah, à Genève et depuis bientôt trois ans à Londres. « Finalement, Londres est la ville qui me convient le mieux » affirme-t-il. La raison principale de ce choix est que sa famille, ses deux filles, Allegra et Violetta, et ses cinq petits-enfants vivent ici.


Londres est un choix qui se justifie également parce qu’elle est une capitale internationale dotée d’une population à fort pouvoir d’achat et d’une clientèle susceptible d’acquérir des pièces rares à prix élevé. Malgré la crise liée à la Covid, malgré le Brexit et bien que Londres se soit vidée d’une partie de sa population depuis un an, Fawaz Gruosi confie qu’il se sent très optimiste « parce que la boutique située à Berkeley Square est exceptionnelle - d’où son désir d’y apposer son nom - et parce que les pièces que nous présentons le sont aussi ». Le joaillier se donne quelques mois pour juger des réactions de la clientèle et y adapter son offre, et environ trois ans pour arbitrer du succès de la marque.
Les bijoux présentés dans les vitrines sont, comme il est d’usage, répartis entre haute joaillerie et joaillerie fine. Quatre cents pièces ont été créées pour ce lancement, plus de deux cents figurent en boutique, quelques-unes sont présentées à l’international (Amérique, Russie, EAU) par trois collaborateurs de la Maison, les dernières pièces prévues arriveront en boutique courant juin. 80% de ces créations sont des pièces uniques.

En joaillerie fine, le joaillier souligne l’existence de quelques déclinaisons mais l’ensemble des collections Enlaced ou Colorissima reste produit en quantité limitée. La Maison fabrique également des montres dont les premiers modèles pour femmes viennent d’ailleurs tout juste d’arriver de Suisse.

Tous les bijoux Fawaz Gruosi sont réalisés à Genève, d’où l’apposition de ce nom après celui du joaillier, par une vingtaine d’artisans joailliers qui œuvrent sous la direction de Patrick Affolter, chef d’atelier déjà du temps de de Grisogono. L’équipe de Fawaz Gruosi compte au total une trentaine de personnes et il est significatif que le noyau dur de cette équipe travaille aux côtés du joaillier depuis souvent bien plus d’une décennie. « Sans eux, je ne serais pas là aujourd’hui ».


Indépendant face aux Titans de la joaillerie ?
Le marché international de la haute joaillerie est majoritairement entre les mains de grands groupes tels LVMH, Richemont, Kering, Swatch group et ce mouvement va s’accentuant, comme en témoigne le rachat en janvier dernier de Tiffany. Rares aujourd’hui sont les maisons de joaillerie à ambition internationale qui restent indépendantes.
« Le drame aujourd’hui, explique Fawaz Gruosi, c’est que la marque prime (sous-entendu au détriment des idées créatives et de la qualité). Je m’intéresse à une autre fraction de cette clientèle fortunée, celle qui comprend et connaît la joaillerie, notamment des collectionneurs ». La boutique de Londres, décorée par l’architecte d’intérieur Francis Sultana, est conçue comme l'intérieur d’un écrin « avec des murs recouverts de daim crème et un mobilier en or martelé, vert émeraude et rouge rubis, éclats de couleurs semblables à des bijoux » dans l’idée d’accueillir cette clientèle experte.



Fawaz Gruosi a choisi de se positionner une nouvelle fois sur l’étroit segment de la haute joaillerie internationale. « J’ai fait ce que je savais faire : de la création et du négoce de joaillerie » néanmoins il précise « vouloir accomplir les choses différemment » aujourd’hui. L’idée est de rester concentré : « Je ne veux plus avoir dix-huit boutiques ; trois serait idéal, une seconde en Russie et la troisième à Paris ».
Comment le joaillier peut-il se relancer à un tel niveau de luxe ? La réponse est directe : « Je n’ai pas pris un centime de mon ancienne société ; j’ai tout laissé, j’ai tout perdu mais heureusement, j’ai la chance de pouvoir recommencer, soutenu par un ami et investisseur pakistanais et peut-être par un tiers cet été ».
Fawaz Gruosi avoue devoir reconquérir sa clientèle. Une poignée lui est restée fidèle mais beaucoup d’entre eux vivent à l’étranger où ils sont retenus en ce moment. D’ici quelques-mois, le joaillier espère qu’ils reviendront à Londres. En attendant, il se prête au jeu des visio-conférences pour présenter ses joyaux.

Fawaz Gruosi - Distinguer l’exceptionnel
En contemplant l’ensemble de la collection présentée sous le nom Fawaz Gruosi, on ne constate pas de différence fondamentale avec l’esprit des anciennes collections signées De Grisogono. « Je ne peux pas renier vingt-six années de création » dit-il, c’est le « même moi qui crée mais avec la volonté aiguë de ne pas me répéter ». Fawaz Gruosi considère cette collection comme « l’une des meilleures » qu’il ait créée.

On retrouve donc les mêmes explosions de couleurs qu’auparavant, des formes volumineuses, généreuses, courbes, organiques et sensuelles et toujours cette quête de perfection dans la réalisation technique. Il me semble percevoir aussi une plus grande simplicité dans nombre de pièces, en particulier celles créées avec les plus belles gemmes. Ainsi cette paire de boucle d’oreilles en émeraudes de Colombie et saphirs de Ceylan aussi éblouissante à l’avers qu’au revers.

Les formes en spirales et les ovales dominent ainsi que la couleur verte représentée par des émeraudes, des grenats tsavorites, des jades jadéite, des péridots, des prasiolites (quartz vert) souvent associés à un éventail de bleus : celui des turquoises, des saphirs, des topazes, au bleu ciel réalisé en céramique et jusqu'au violet profond des améthystes, tous faisant référence à la mer Méditerranée et à la Sardaigne, intarissable source d’inspiration du joaillier.
L’émeraude est de longue date la gemme préférée de Fawaz Gruosi. La collection comprend 65% d’émeraudes. Peu importe au joaillier leur provenance d’origine, Colombie, Brésil, ou Zambie, il choisit ses gemmes avec exigence mais uniquement sur des critères de densité de couleur, de « caractère » et d’effet produit.


Le rubis est sa seconde gemme de prédilection. Avec patience, il a assemblé une importante collection de rubis non traités aux teintes similaires pour créer des appairages audacieux dont ce spectaculaires bracelet qu’il présente fièrement et avec humour devant l’équipe qui s’est approchée : « exceptional, elegant to die, no don’t give me compliment anybody ! »


On s’étonne que la collection compte peu de diamants : « plus tard ». Une rupture avec le passé mais certes pas définitive, car « il faut que l’inspiration revienne ».
Fawaz Gruosi est réputé pour écouter ses intuitions et pour avoir parfois fait des choix de matière éloignés des conventions de la joaillerie. A Londres, vous ne verrez pas de diamants noirs, quelques rares diamants blancs, mais de nombreuses gemmes d’origine biologiques (biogéniques) comme les perles, l’ivoire de Mammouth et surtout, l’ambre.
L’ambre de Lituanie, nouvelle muse ?

« Je fais des folies comme avec les diamants noirs autrefois ! Je me lance dans l’ambre, mais l’ambre de qualité exceptionnelle ».
L’ambre est le dernier coup de cœur du joaillier. Ce n’est que récemment et par l’intermédiaire d’une proche qu’il s’y est intéressé au point de vouloir consacrer toute une ligne à cette matière : « lorsque je me lance, j’y crois, tout en n’étant pas certain une fois encore que les gens comprendront d’emblée ».

Résine fossile, l’ambre, ce bio-matériau organique daté de millions d'années fascine bien souvent l’observateur par les végétaux et parfois les insectes qu’il contient. On trouve des gisements d’ambre dans divers endroits de la planète, de la République dominicaine au Myanmar (source de l'ambre le plus ancien, âgé d'environ 100 millions d'années), de la Sicile à la Roumanie, mais les meilleures réserves et les plus abondantes proviennent historiquement de la région de la Baltique, où le joaillier se fournit.



onyxes (~ 27,85 Ct) and cabochon-cut amber (~ 7,40 Ct)
« Mes premiers clients ont aimé cette ligne et cela me procure un certain soulagement », dit-il
Quel état d’esprit au moment de ce nouveau départ ?
« Il faut laisser faire. Les choses se feront d’elle-mêmes. Nous verrons, je suis positif. »

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(1)
Il y a un peu plus d’un an, le 19 janvier 2020, éclatait le scandale des « Luanda leaks ». 715 000 documents rassemblées par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) révélaient au monde comment Isabel dos Santos, la « femme la plus riche d'Afrique », fille de l’ancien Président de l’Angola José Eduardo dos Santos (de 1979 à 2017) avait établi sa fortune : sur des fonds publics et aux dépens du peuple angolais. Ces documents soulignaient également le lien entre De Grisogono et ses principaux actionnaires depuis 2012 : Sindika Dokolo le mari d'Isabel dos Santos et Sodiam (la branche commerciale de l'agence de diamants contrôlée par l'État angolais). S’ensuivit la faillite de De Grisogono, Maison qu’avait fondée vingt-six ans auparavant, en 1993, M. Fawaz Gruosi. Lorsque le scandale éclata, ce dernier avait démissionné de son poste de directeur du conseil d'administration depuis décembre 2018 et il ne fut pas inquiété par la justice.
Fawaz Gruosi Genève
20/22 Berkeley Square, Mayfair,
London W1J 6EQ, UK
T: +44 20 7050 1600
contact@fawazgruosi.com
La bague en "une" de cet article est en or blanc 18K (~ 14,55 Gr) sertie d'une émeraude de Zambie taille coussin (~ 12,18 Ct), de 150 diamants taille brillant (~ 2,15 Ct) et de céramique noire. C'est la pièce de joaillerie à laquelle Fawaz Gruosi tient le plus.
Les crédits photos de cet article appartiennent à Fawaz Gruosi Genève.
Thomas Faerber (I) : A life for jewelry
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Renowned jeweler specializing in precious stones, antique and vintage jewelry and exceptional pieces, Thomas Faerber, has been acknowledged for more than five decades for his contribution in the jewelry market throughout the world.
The “Faerber-Collection”, placed under the aegis of Thomas Faerber, Alberto Corticelli (at his side since 1988), his children Ida Faerber and Max Faerber, and Philippe Atamian (all three joined the company in 1998), buy and sells gems, antique and vintage jewelry, exceptional pieces in Europe (Geneva and Paris), America (New York) and Asia (Hong Kong). The House stands out, says Thomas Faerber, by a taste for "the emblematic jewels of an era; those of noble origin, created by the most remarkable craftsmen; pieces that, if they could speak, would tell a thousand stories. "
Thomas Faerber belongs to the exclusive club of major international collectors.

Given to a French nobleman as a present from Czar of Russia, Alexander 1st , in Erfurt.
The square step-cut emerald framed by a closed back yellow gold leaf and flower motif set with rose-cut diamonds, surrounded by 16 old mine-cut diamonds and a second line of rose-cut diamonds. The mounting is in silver and 14k gold, typical in the Russian work at the time. The emerald weighs 5.84 carat and is of Colombian origin. The 16 diamonds weigh circa 5.50 carat. The ring is in the original fitted box.
Length : 32mm. Width : 20mm. Height : 24mm. Size : 14 / 54.
Photo credit Katharina Faerber
It is a great honor for me and I am grateful to him for having opened these rarely seen pages of this private collection catalog, giving me the opportunity of presenting these masterpieces that he is particularly fond of and willing to lend to jewelry exhibitions as well as to the readers of Property of a Lady.
The collection is an amazingly eclectic set and includes pieces from the Renaissance to 2019. It mainly brings together pieces that were “love at first sight” and at times memories, explains Thomas Faerber. Just like this Belle Époque pearl necklace which was made by Thomas Faerber's maternal grandfather at the beginning of the last century.

The five-strand necklace set with cream-colored natural pearls, ranging between circa 3.0 and 3.5 mm, decorated with four campanula-shaped spacers, delicately millegrain-set with rose- and old-mine cut diamonds, mounted in platinum, with original burgundy fitted case signed Aug. C. Schöning, Cologne, Germany, circa 1910, length circa 38 cm.
Photo credit Katharina Faerber
Let's discover parts of the collection and gain a better insight of the history of Thomas Faerber.
From the very beginnings to international recognition
August Schöning, the maternal grandfather of Thomas Faerber, was a jeweler and a goldsmith in central Cologne, Germany, between the Belle Époque and WWII. He died in the Fifties. “This necklace is the only piece I own from my grandfather,” explains Thomas Faerber. It was cheer luck that made it possible at an auction in 2019 in Cologne. "I had gone there for another piece that interested me and then came across this necklace. It was one of the most exciting auction in my life because I absolutely wanted to get it! "

Thomas Faerber's father, Ernst Faerber, came from Bavaria. He was born at the turn of the century, in 1900. He was dreaming of becoming a photographer and wanted to take part of the creative development that this technique was experiencing in those years. However, in the sadly difficult context of the end of the Twenties, he couldn't find a job fulfilling his dream and finally had no other choice than to become an intern for a pearl merchant in Berlin. He lost no time and learned the various technics of coating, piercing and bead threading.
Thomas Faerber explained to me that a man in 1930 came forward to sell a very beautiful necklace of fine pearls. “My father asked the pearl merchant, his boss, if they could purchase it and he refused. He then asked for permission to buy it himself and he also asked if he could obtain a raise to no avail. This gave him no other choice than to set up his own business and buy the necklace." Ernst Faerber worked several weeks on the necklace, peeling it meticulously and turning it into a stunning piece it is today.
Having become a recognized trader in fine pearls and precious stones, he began to travel through Germany. One day, on his way to Cologne to see his client August Schöning, Ernst Faerber came across a thief running away from the jeweler's store and the jeweler chasing after him with a gun. Ernst Faerber did the only thing his heart told him to do and rushed to the jeweler's daughter in distress.
"My story began with love and a piece of candy"
The first thing Ernst Faerber did was to offer the young woman a piece of candy, as he always had some in his pockets -and "this is how my parents met! "
Ernst Faerber, married Maria Schöning (August's daughter) in the early 1930s. Ernst Faerber worked until he died in 1961. "I was barely 17", says Thomas Faerber. The Ernst Färber House, located on the elegant Promenadeplatz in Munich, was taken over by Rudolf Biehler, his former assistant after Ernst Faerber's death. Dominik Biehler is now in charge of the House Ernst Färber in Munich.
"It was agreed by the family that I would be trained by Rudolf Biehler so that at the age of twenty-five I would have an equal 50% partnership with him. I then went to Amsterdam where I learned to cut diamonds and then to Antwerp where I learned to negotiate them, notably at Backes & Strauss.
Thomas Faerber continued his training in London at Australian pearl company and after in Paris with Jean Rosenthal (1906-1993), a great dealer in precious stones, whom he affectionately nicknames "his great master". These months spent at his side are described as "wonderful". Today, it is with his son, Hubert Rosenthal, that he continues to maintain an indestructible friendship.
In 1968, Thomas Faerber decided to create his own trading company in precious stones and jewelry in Zurich, Switzerland, thus leaving the German market to Rudolf Biehler: “The markets were not then as globalized as they are nowadays, everyone had his own territory ". He recalls that when he started traveling in Switzerland, working around with modest jewelers and the few watch factories that existed at this time, was quite "difficult".

Composed of 22 oval enamel plaques each depicting the arms of a Canton within a varicolored gold openwork filigree mount set with spaced close-set pink topaz and with a collet set small cabochon turquoise between each mount. With a pendant drop suspended in the center depicting the symbols of the Confederation.
"Swiss enamel was a very popular souvenir for tourists visiting Switzerland in the 19th century, especially for the British. Geneva was the center for enameling. This Necklace depicting the 22 Cantons of Switzerland is a typical souvenir of that time" explains Thomas Faerber. Photo credit Katharina Faerber
The year 1969 was an important turning point in the life of Thomas Faerber. That summer he visited New York for the first time and made two momentous encounters there. First Katharina, a photographer, who would become his wife and then Paul Fisher (1927-2019), a major player in the jewelry industry of the second half of the 20th century, whom his peers regard as a model. Thomas Faerber fondly remembers a man whom he considers a second father. “He guided me a lot. We have worked together in America and all over the world”.

Another major year in Thomas Faerber's professional life was 1973. He took his first booth, precisely 9m2, in Basel, the jewelry and watchmaking fair that had not yet become Baselworld. Exhibiting mainly for the Swiss market, Thomas Faerber remembers that his activity was mostly devoted to diamonds, with stones rarely exceeding 1 carat. In order to develop his entreprise, Paul Fisher suggested that Thomas Faerber present antique jewelry as well. In Switzerland at that time customers wanted modern jewelry he explains : “My reputation was just starting to establish itself, so I was hesitant, but not for long. I was the first jeweler and gems dealer to exhibit antique jewelry. At the end of the fair, the three antique jewels that Paul Fisher had given me were sold and this allowed me to meet new customers ". Thomas Faerber never left the antique jewelry market again and remained an exhibitor Basel until 2017.

The wristwatch designed as two enlaced snakes, decorated with black, green, red and blue colored enamel, the heads embellished with a collet-set garnet- cabochon, to the gem-set eyes, the snakes centering upon the round-shaped case with guilloché enamel reminiscent of a rose glass window, opening to reveal roman numerals, numbered ‘46373’, mounted in 18k yellow gold, probably English, circa 1840, inner circumference circa 19 cm, with winding key.
Photo credit Katharina Faerber
In 1980, Thomas Faerber moved to Geneva, a city with a prosperous jewelry and watchmaking tradition, while continuing to travel. America in the late 1970s was a haven for discerning dealers coming from all over the world as the dollar began to fluctuate. "I bought some beautiful vintage signed jewelry there: at the time, between a Cartier bracelet and an unsigned Art Deco bracelet there was 15% to 30% difference. It was later, from the 1980s, that signatures and origins became much more important. The fact that jewelry began to be exhibited in museums (e.g. Van Cleef & Arpels exhibition in 1992 at the Fashion and Costume Museum at the Palais Galliera in Paris) has contributed in changing mentalities as well as the international jewelry market."
Over the years, thanks to his in-depth knowledge and business ethics, Thomas Faerber has been able to establish a notoriety (from 1993 to 1998 he chaired the Swiss Precious Stones Dealers Association) as he never stopped acquiring new important pieces.
In 2004, he provided the Louvre with a necklace of emeralds and diamonds and matching earrings that Napoleon I presented to the Archduchess Marie-Louise on the occasion of their wedding in 1810. Thomas Faerber explains that after acquiring these two exceptional pieces, miraculously preserved in their original state, he very much wanted them to be part of the fabulous Louvre collection. This half-set created by François-Regnault Nitot was part of the Empress Marie-Louise's personal jewelry items and has since entered the window display of the admirable Diamonds of the Crown of France located in the splendid Galerie Apollon.
That same year, Thomas Faerber was made a Chevalier of the "Ordre des Arts et Lettres".


Pieces made by the jeweler François-Regnault Nitot (1779 - 1853) in Paris. The necklace consists of 32 emeralds (13.75 ct central emerald); 1138 diamonds (874 brilliants and 264 roses); gold ; money. The earrings are made of 6 emeralds; 108 diamonds; gold ; money.
Photo (C) RMN-Grand Palais (Louvre museum): Jean-Gilles Berizzi
Thanks to many years of experience and a large international network, Thomas Faerber and his colleague Ronny Totah joined forces four years ago to create "with colleagues, friends and other dealers, a quality, friendly and family-like jewelry fair on a human scale”: GemGenève.
The first two exhibitions, which brought together jewelers, dealers, designers, collectors, gemological laboratories, booksellers and enthusiasts, took place in 2018 and 2019 successfully bringing together exhibitors and visitors from all over the world.
Hopefully GemGenève will reopen its doors in November 2021.

This conversation with Thomas Faerber will continue here : "About the collection"
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Visual at the top of the article: An antique sapphire and diamond bangle mid 18th century.
The brooch element set with a sapphire of circa 56 carats, within an old mine cut diamond surround dated from the time of Catherine the Great (mid-18th century). According to family tradition, this jewel belonged to the Zoubov family.Possibly a gift by the Empress Catherine the Great to Platon Alexandrovitch Zoubov (1767-1822) who was the Empress' last favorite.
The yellow gold bangle, a later addition, has the St. Petersburg mark used from 1826 up until 1876 and master’s mark, Cyrillic script P I. It is encrusted with small ivy diamond motif of pre-art nouveau style. With report no. 47838 from the SSEF stating that the sapphire is from Ceylon (Sri Lanka) with no indications of heating.
Photo credit Katharina Faerber
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Many thanks to Myriam de Mareuil for her very careful proofreading of my translation
Thomas Faerber (II) : A conversation about the Collection
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“The collection is eclectic,” says Thomas Faerber. I purchase what I like. It can be antique, modern or contemporary ”.

Designed as a flexible torque, composed of brushed gold links on a black rubber band, mounted in 18k yellow gold, with Austrian assay marks, with Manfred Seitner maker's mark, circa 1970, inner circumference circa 50cm, width circa 3.2 cm.
Photo credit Katharina Faerber
Jewelry, watches and precious objects make up for this collection, which began in the 1970s with “a few pieces of lesser importance”. Over time and through the various fairs, Thomas Faerber regretted having sold certain pieces. "This, I believe, is how the collection started." He adds that even today, most of the pieces that he and his associates buy are intended to be sold: "I remain a dealer at heart. "
Do you plan to exhibit your collection one day?
I prefer to lend parts of it.

With report no. 63234 dated 26/04/12 from SSEF stating that the sapphire is from Ceylon with no indications of heating.
With a certificate of authenticity by Chaumet.
The original drawing of this piece is kept in the archives of Chaumet.
Photo credit Katharina Faerber
The great Houses of Place Vendôme and the museums are mostly aware of this and don't hesitate if needed to ask me. Some of you may have already admired this brooch during the "Chaumet en Majesté" exhibition at the Grimaldi Forum in Monaco in the summer of 2019? It was also featured at the Beijing exhibition.

"Plume" brooch by Morel & Cie, J. Chaumet.
Photo credit Katharina Faerber
At the beginning of September, Thomas Faerber left an exceptional necklace in emerald drops and diamonds designed by Jacques Arpels in 1950, as well as a pair of matching earrings, on loan for the Pierres Précieuses exhibition at the Museum of Natural History (MNHN) in Paris.
This set belonged to Maharani Sita Devi of Baroda (1917-1989), wife of Maharaja Pratapsingh Gaekwar.


Photo credit Katharina Faerber
Sita Devi had an unrestrained passion for jewelry and possessed extraordinary gems which she drew from the Baroda treasury. Some of these precious stones date back to Mughal times. In the latter part of her life, the Maharani saw her jewelry dispersed during an auction organized by Crédit Mobilier de Monaco on November 16, 1974. The emerald and diamond half-set created by Jacques Arpels was part of a private collection before Thomas Faerber acquired it at an auction in May 2002.
Almost twenty years later, the collector continues to admire the design and the gems of this magnificent set that he considers exceptional.
Do you have a favorite jeweler?
I have great admiration for the work of Lalique, Vever, Cartier and, today for JAR - but one of my great heroes is Frédéric Boucheron (1830-1902)!
The tremendous quality of the execution of the pieces created under his direction, the human value of the character, his sensitivity, the fact that he was so involved in the profession and that he was keen to help younger generations aroused my admiration.
That is why the first major acquisition in my collection was a Boucheron necklace.

Composed of 900 diamonds for a total weight of circa 45.75 carats, this necklace is the only surviving piece to be known according to the technique invented by Frederic Boucheron in the end of the years 1890. The necklace is composed of a very thin flexible steel thread covered in silver. It can be transformed into a brooch, length : 21 cm, rose width : 3 cm, rose height : 12.5 cm.
Photo credit Katharina Faerber
The first drawing of this necklace made by Paul Legrand, main designer of the House of Boucheron at the time of Frédéric Boucheron, dates from 1879. It then took a few years to carry out this project and invent a technique which made it possible to bend and thread the metal around the neck, without the diamonds jumping under the pressure of the movement. Achieving this extraordinary flexibility was an incredible challenge for the workshop. It was only in 1889, during the Universal Exhibition in Paris, that Frédéric Boucheron officially presented his technical innovations, including engraved diamonds and the so-called "Point d'Interrogation" (Question mark) necklaces. The jeweler won the "grand prix" there - the highest distinction after the gold medal - for his remarkable work, and was soon after made an officer of the Legion of Honor.
"Spring collars" (another name for this invention) impressed critics who described them as “revolutionary”! explains Boucheron's Heritage Director, Claire de Truchis-Lauriston. She also draws our attention to how much Frédéric Boucheron was attentive to the comfort of his clients, who at the time had to have a maid to dress and adorn themselves, in particular with their choker (dog collar) so difficult to attach behind the neck. Frédéric Boucheron certainly wanted to free them from constraint. The "Point d'Interrogation" necklaces come without a clasp and most have a central part that can be transformed into a brooch or hair ornament.
Almost all of these necklaces represented nature: flowering branches of acacias, plaine trees, lotus flowers, ears of wheat, peacock feathers, ivy leaves, poppies, snakes… The necklace that Thomas Faerber owns is made up of a blooming rose, surrounded by three leaves, topped with a a rose bud about to bloom.
To this day, this is the only “Point d'Interrogation necklace” in its original state.
“When this necklace was put on sale in Paris in the Eighties at Drouot, says Thomas Faerber, it was estimated at a reasonable price, but during the sale, the bids flew - I had had a formidable opponent in front of me! Nevertheless, I won the bid and this necklace now belongs to my wife. "
Is there a gem that particularly appeals to you?

Photo credit Katharina Faerber
I don't have a favorite stone; nevertheless there is one that has always fascinated me, is the alexandrite, the color change variety of chrysoberyl which has the particularity of changing colors depending on the light (green in daylight, red under a lite candle).
Above, an alexandrite of almost 8 ct put on sale last June in Vienna at the Dorotheum. Estimated between € 13,000 and € 16,000, it was sold for € 115,300.
I'm still trying to get chrysoberyls, but their prices are prohibitive. I took a huge risk to get it, because it truly had a very nice color-change. Fortunately, it was another who got it, he said with a smile.
What type of jewelry is particularly sought after by dealers today?
I would say the tiara.
In the 1970s, tiaras were unsaleable, we bought them to take them apart. It reminds me of an anecdote: in the 90s, there was a beautiful tiara for sale at Christie’s. I admit, I had done my calculations to make five brooches, three pairs of earrings ... I won the bid and the tiara was delivered in a beautiful initialed Chaumet case. I thought maybe I wasn't going to take it apart right away, he laughs. I wrote to Madame Béatrice de Plinval, Chaumet's Heritage director, to tell her that I had been able to acquire this tiara. This tiara has since become one of the centerpieces of their Heritage Collection.
Today tiaras are a real craze, e.g. this sale on June 10, 2020 at the Dorotheum, still, a Cartier tiara in aquamarines and diamonds mounted on platinum. Characteristic of the Art Deco style, it was created in London by Jacques Cartier around 1930-35. Estimated between € 34,000 and € 70,000, it sold for € 582,800 (more than seventeen times over its low estimate!).
You also own exceptional objets in the collection. Are there any that you would like to present?

The rectangular case with round corners in 14k yellow gold with a samorodok finish surface, inset with rose-cut diamond, opening on a compartment for the cigarettes, and a smaller case of similar design for the matches, a mirror in the lid, a diamond set push piece, with Russian assay mark for Kiev after 1908 and maker's mark for Josef Marchak, circa 1910, 10.5 x 5.5 cm.
Photo credit Katharina Faerber
This rectangular cigarette case with rounded corners depicts a winter landscape around the ghostly face of Ded Moroz, the “Grand Father of Frost” or Russian Father Christmas.
"I don't smoke," says Thomas Faerber, "but the elegance of this set appealed to me."
The cigarette and matching case, both illustrate the technique of samorodok, a Russian word meaning "nugget" or "virgin metal." At the end of the 19th century, this technique was used by Russian silversmiths and in particular by Fabergé who applied it when creating precious objects.
Obtained by heating silver or gold to a temperature near the melting point and then suddenly cooling it in water, the samorodok produces a textured effect on the surface of the object, which suggests snowy forest paths in Switzerland, sand games in the desert, the lunar surface ... Everyone is free to let their imagination run wild!
This technique is nevertheless very difficult to master, the samorodok is rare.
Will you create a Faerber museum in Geneva?
I believe my collection should stay in the family company. I am fortunate to be surrounded by two children and five grandchildren; my daughter Ida Faerber is very attached to our legacy, she'll guard the temple.
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Visual at the top of the article : A Joël Arthur Rosenthal ring that belonged to Marie-Hélène de Rothschild (1927-1996).
Recently acquired at the Pierre Bergé & Associés auction on Tuesday, December 15, 2020, Lot 100. This 18K (750) yellow gold ring is adorned with a troidia-shaped diamond weighing 6.31 carats.The ring is covered with a mosaic of agate geode studded with shards of diamonds. Work from the 1980s. Signed JAR.
Photo credit Katharina Faerber
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Many thanks to Myriam de Mareuil for her very careful proofreading of my translation
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Thomas Faerber SA
29, rue du Rhône
1204 Genève
Switzerland
Tel: +41 22 318 66 33
Gourdji
1 rue de Châteaudun
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Tel: +33 1 48 78 84 65
gourdji@faerber-collection.com
Faerber Inc.
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U.S.A.
Tel: +1 212 752 42 00
ny@faerber-collection.com
Faerber-Collection (HK) Limited
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Central – Hong Kong
Hong Kong
Tel: +852 2520 2521
hk@faerber-collection.com
Geneva International Gem & Jewellery Show
Palexpo Genève Halle 7
Route Francois-Peyrot 30
1218 – Le Grand-Saconnex
Genève. Suisse
Cartier London in the 30's : A decade of contradictions
At the very heart of the Cartier saga: the extraordinary life of Jacques Théodule Cartier (1884-1941) recovered and told by his great-granddaughter Francesca Cartier Brickell - PART III
Pour lire cet article en français, cliquez ici
To read part I "He lived for design : Jacques Cartier, the lesser-known brother", click here ;
To read part II "Cartier London: The roaring 20s", click here
What were the 1930s like for Cartier?
My grandfather [Jean-Jacques Cartier] used to tell me how, after the boom of the 1920s, the 1930s brought such terrible challenges for Cartier and other luxury firms, many of whom did not survive. The Great Crash began in October 1929. In just two days, the U.S. equity market lost a quarter of its value, devastating investors, and over the next three years, as the Great Depression took hold, there was wave after wave of banking panic. “Eighty percent of our orders were canceled" Pierre Cartier reported to the American press in 1930. And for those clients that remained, “the Maison had to grant credits varying from six months to a year.”
For Cartier, the difficulty was exacerbated by the sudden decline in demand for the gem that had, for several decades, represented the lion’s shares of their income: pearls. The steady rise in commercially available cultured pearls had put the natural pearl market under increasing pressure since the late 1920s. In 1930, prices for natural pearls plummeted by 85 percent. Cartier suffered considerably as a result: my great-grandfather [Jacques Cartier] said this crashhurt business almost more than the effects of the Depression.
One saving grace during this period was the Cartiers’ – by now well-established – links with India. Not only did the firm continue to receive large commissions from the maharajas at a time when wealthy Americans were reigning in their spending, but also the fashion for Cartier’s Indian-inspired jewellery (including the colourful jewels later referred to as ‘Tutti Frutti’) helped keep the firm ahead of the competition in the West.

New York, 19 June 2019
I recall you writing that the centre of gravity shifted away from Paris to London?
Yes, one thing that’s not widely known is that, by 1925 already, Louis Cartier had stepped down from the Board of Cartier SA in Paris. In the 1930s, Louis was already in his early sixties and effectively retired, spending a significant time away in his Budapest palace (he had married a Hungarian countess) and his Spanish villa in San Sebastian. My grandfather said that Louis used to turn up announced in Paris after weeks or months away and move between the workshops and Rue de la Paix showroom like a ‘meteor’, tearing strips off his team for anything that wasn’t up to his almost impossibly high standards. He’d then disappear again, creating something of a power vacuum in Paris which Louis tried to fill initially by putting his son-in-law Rene Revillon in charge. Unfortunately this only led to more problems, ending in the most unexpected family tragedy, and it really wasn’t until Louis’ brilliant protégé, Louis Devaux, took over in the late 1930s that this power vacuum in Cartier Paris was resolved.

I found it fascinating to read the letters between the brothers which revealed the human behind-the-scenes reality to the flawless impression that the family strove to give the world in their calm beautiful showrooms. Pierre and Jacques, for instance, were worried for the business but they were also concerned for their older brother, admitting to each other (even if they kept it secret from the world) that on occasion they had no idea where he was or when he would be back. Louis still came up with new ideas in this period, and he kept pushing his team to innovate (in one letter asking them to come up with “something tastier, or something new”) but those long absences and the need to be alone were the flipside, perhaps, to his creative genius.
There was also a big argument between Jacques and Louis in the early 1930s. I won’t go into the details here, it’s all in the book, but save to say, relations took a nosedive for a while. In a fit of anger, Louis refused Jacques access to Cartier Paris: “The worst aspect is the sanction taken by LC [Louis] with regard to JC [Jacques]—JC forbidden to enter S.A. locations at 4 or 13 Rue de la Paix. Cessation of all relations between the two companies, no S.A. stock to be sent, ordered, or repaired. Only current business to be conducted, no new business to be carried out.”
Despite this, Cartier London was perhaps the best placed branch in the 1930s as it benefitted not only from the relationship with Indian clients (who Jacques had been visiting for the past two decades), but also the ongoing custom of the British royal court.
These aristocratic clients were not only generally less negatively impacted by the Great Depression than many of Pierre’s clients over the Atlantic, they (and their jewels) also often appeared in the social columns, resulting in the ideal type of marketing for Cartier.

whole-plate glass negative, circa 1909. Given by Bassano & Vandyk Studios, 1974. Photographs Collection © National Portrait Gallery, London
For example, Lady Granard, daughter of the American financier Ogden Mills and wife of the Earl of Granard, had been known in British high society for her love of gems ever since The Washington Post had remarked of her 1909 debut in Parliament that “after the Queen, who wore the crown jewels, no woman in the chamber wore so many splendid gems as the new American countess, and if the Queen had not worn the Cullinan diamonds for the first time, the American countess would have outshone Her Majesty.” Two decades later, though the British capital may have been under the shadow of the Great Depression, court life - and with it the requirement for big jewels - continued. In 1932, Lady Granard commissioned a truly remarkable necklace from Cartier London: it incorporated two thousand diamonds and an enormous rectangular emerald of 143.23 carats (all the gems were her own).

The London branch’s association with the British royal family was bolstered further in 1933 when Queen Mary asked to exchange a gift she had been given from Cartier for a more valuable clip brooch. After Cartier made the exchange for free, the Queen thanked the firm by visiting its New Bond Street store. Looking through the showrooms and the various departments upstairs, “Her Majesty,” Cartier’s director Joseph Sinden recalled, “talked to quite a number of the workmen and the visit lasted an hour and a half.” She had entered through the side entrance on Albemarle Street, but by the time she left, “the news had got round that Her Majesty was here and there were a number of people waiting to watch her leave.”
News of the royal visit was excellent for business. “Bond Street is busy,” Jacques reported a couple of months later; “the workshop is blocked with orders.” Her much-reported visit would also help publicize the fact that although Cartier was a French firm, the London branch employed Englishmen. This was an important message to convey at a time when there was a backlash against firms in London employing foreign workers over British ones.

Later in the 1930s, when Paris was struggling from political and social unrest, London was also busy with 27 tiara commissions for the 1937 coronation. Two years earlier, Vogue declared tiaras had made a comeback in England (“tiaras are all the rage”) and in 1936, Cartier made a diamond and platinum tiara with a cascading scroll design that the future King George VI would buy for his wife, Queen Elizabeth. This piece, known as the Halo tiara, would subsequently be worn by four generations of the royal family, making a special appearance in 2011 when Catherine Middleton (the future Duchess of Cambridge) wore it for her wedding to Prince William. Other significant 1930s royal clients included the future Duke of Windsor, whose purchase of a Cartier emerald engagement ring for Wallis Simpson would effectively lead to his abdication.

A diamond 'halo' tiara formed as a band of 16 graduated scrolls, set with 739 brilliants and 149 baton diamonds, each scroll divided by a graduated brilliant and with a large brilliant at the centre; original red leather box, with later Garrards label. @Royal Collection Trust. All rights reserved
Tell us about Wallis’s engagement ring?
Well, fortunately for Cartier, the Duke of Windsor (then the Prince of Wales) had favoured Boucheron when buying gifts for his previous mistress, Freda Dudley Ward. When he started a relationship with Wallis, he was apparently instructed by her to switch allegiance from one French jeweller to another because she didn’t want anything reminiscent of his previous lover!
The Prince showered Wallis in jewels. A regular to Cartier London, he would generally use the back entrance on Albemarle Street (in order to avoid being spotted by the public) before being discreetly ushered into one of the private client rooms by a waiting salesman. For a high-end jeweller, discretion was the name of the game and for a future king conducting a romantic liason with a married woman, it became particularly important. For most of 1936, the scandalous relationship was successfully kept out of the British press. In fact, Jacques, as one of the King’s trusted jewellers, would have been one of the very few who knew of its significance.
I love the story of the Wallis’ engagement ring. Traditionally, emeralds are not used for engagement rings. Compared to diamonds, the stone is soft and can scratch easily with everyday wear. But King Edward VIII (as he was for a very brief period after his father died and before becoming the Duke of Windsor) wasn’t interested in tradition.

Some years earlier, Jacques had sent a trusted salesman to Baghdad to negotiate the purchase of several important gemstones. On his arrival, the salesman had been informed that the sale had to be conducted secretly and that he was forbidden to telegraph any details back to London. All he was allowed to say was that he needed a large amount of money to be sent over as soon as possible. Trusting his employee, Jacques approved the sum and had it wired over without delay. For such a large price, he supposed, Cartier would be acquiring an enormous number of precious gems. But when his salesman re-turned, he had with him only a small pouch. Out of this, he brought one single gemstone. It was an emerald the size of a bird’s egg. Jacques was enthralled. As a gemstone expert, he marveled at the chance to see and hold one of the great emeralds of the world, a gem so magnificent it had once belonged to the Great Mughal. But as a businessman, he was dismayed. Years ago, before the Russian Revolution, they would have had no problem finding buyers wealthy enough to afford such a gem. But the 1930s was a very different era. The only option for Cartier to make their money back was to cut the emerald in two and re-polish each half into a gleaming new stone. Though it pained Jacques even to consider splitting such a fantastic gemstone, he had to think of the business. One polished half ended up being sold to an American millionaire and the other, at 19.77 carats, became the centerpiece for Wallis’ engagement ring.
As with many of the jewels he bought for Wallis, the King had asked that Cartier engrave it with a personal message. This one read “WE are ours now 27 X 36.” He proposed on October 27, 1936, the same day Wallis was granted her divorce from Ernest Simpson.

So Jacques – and Cartier London – were caught in the midst of this famous episode in history?
Yes, I love how this episode illustrates the importance of a jeweller’s discretion – how a jeweller may be privy to secrets that even families don’t know about each other, in this case, the Royal Family. Jacques was, on the one hand, working on tiaras for the upcoming planned coronation of King Edward VIII while also working on the ring that would lead to his abdication. In the end, the coronation set for the summer of 1937 would still go ahead, but it would be for a different King than the one the world had been expecting, King George VI. Because once Wallis had the ring on her finger, the British Prime Minister told the monarch that the British public would never accept a divorced woman as their queen. “I think I know our people,” he said. “They will tolerate a lot in private life, but they will not stand for this sort of thing in a public personage.” In a series of meetings, he clearly spelled out Edward’s options: either renounce Mrs. Simpson or abdicate. In a poignant radio broadcast from Windsor Castle, the King announced his abdication and left Great Britain bound for France.

From then on, it would be Cartier Paris which would have the lion’s share of the couple’s jewellery commissions (her most well-known pieces would include a multi-gem flamingo brooch, an amethyst and turquoise necklace and the iconic big cat jewels).
In the 1930s, Cartier London was known for necklaces, and for its topaz and aquamarine jewels– why was that?

Rectangular, hexagonal, square and circular-cut aquamarines, circular and baguette-cut diamonds, platinum, may be worn as a necklace or applied to fitting and worn as a tiara, 16 ins., circa 1935, signed Cartier London, numbered. @Christie's Magnificent Jewels, New York, 5 December 2018.

This was a creative and prolific period for Cartier London, especially for big necklaces – although sadly, many of the necklaces have since been broken down and haven’t survived into the modern period. The head of the design studio, Georges Massabieaux, worked with designers like George Charity and Frederick Mew (Mew was responsible for many of the firm’s more innovative geometric designs). In 1935, the London team was joined by the talented artist Pierre Lemarchand, who moved over temporarily from Cartier Paris. He got along particularly well with Mew, both great admirers of each other’s work, and he would go on to design many of Cartier’s animal jewels during and after WW2 (he was the man behind the famous “bird in a cage” brooch during the occupation of Paris and the panther jewels for the Duchess of Windsor).

Reflecting the difficult Depression economy, Jacques prioritised the use of semi-precious stones, which were not only considerably more economical, but also readily available in a variety of geometric cuts. This gave the designers the opportunity to come up with an almost architectural look in accordance with the fashions of the time. Topaz was generally combined with diamonds or gold: “The only requirement,” Vogue would explain in its October 1938 issue, “is that topaz jewellery must look as important as if it were emeralds or rubies. That is the way Cartier has treated it.” Often clients would request matching jewels: When the debutante Lady Elizabeth Paget was photographed for Harper’s Bazaar in January 1935, she wore “Cartier’s magnificent parure . . . of light and dark topaz,” comprising necklace, bracelet, shoulder clip, and large pendant earrings”.
But it was the combination of diamonds with aquamarines that Jacques particularly liked. It created, he felt, a look that was fresh and elegant and suited everyone from royalty to trendsetters. His clients agreed, as did many visiting Americans who ordered their jewels from his branch.

Of geometric design, set with oval, baguette and kite-shaped aquamarines and circular-cut diamonds, signed Cartier, fitted case stamped Cartier. @Sotheby's London, Fine Jewels, 16 July 2014
I was told by my grandfather the behind-the-scenes story of how the Cartiers put together these semi-precious stone collections. It was important—if they were to source good stones at reasonable prices—that neither the dealers nor their competitors caught on to their buying patterns. After deciding on a particular gemstone, the brothers bought them under the radar over several months, or even years. Assuming it was topaz, they would buy topazes when different gemstone dealers came to present their wares, but never too many at one time or from the same dealer. The idea was that over the course of a couple of years, they would have acquired enough highest-quality topaz to make an impressive collection for a season. And then, by showing topaz necklaces, earrings, bracelets, and bandeaux in their windows, they would make the topaz the gemstone du jour. By the time their competitors tried to copy them, not only would there be very few high-quality topazes left on the market but also the dealers would have hiked their prices and it would become almost impossible for another jeweler to create a topaz collection on anywhere near the same scale.
I read that Jacques suffered from ill-heath, eventually passing away before his brothers despite being the youngest?
Yes, Jacques continued to work in London and travel East throughout the 1930s but he suffered from ill-health as a result of weak lungs (during WW1 he had suffered from tuberculosis and been gassed at the Front). During a 1935 work trip to India with his wife, for example, instead of settling into their usual sea-view suite on arrival, Jacques had been rushed to the hospital. “Jacques has haemorrhages on arrival Tajmahal Hotel Bombay,” Nelly had telegraphed her husband’s brothers in fear. “Good doctor and nurses. Will keep you posted.” Fortunately he recovered that time but his health had taken another beating and those weak lungs remained a worry always in the background.
To manage his health, Jacques was advised by his doctors to spend time in the mountain air of Switzerland so he and his family spent the winters in the fashionable Swiss mountain resort of St. Moritz. Villa Chantarella, the chalet they rented each year next to the large hotel of the same name, became a home away from home. “Here we are again on top of the world in our Noah’s ark full to the brim of growing ones,” Jacques wrote to Pierre one Christmas, explaining how all four children were out on the slopes with their friends while he was inside in the warm working on designs for an upcoming exhibition. The ski resort was also good for business and Jacques set up a St. Moritz seasonal Cartier branch. Enticingly located next to the famous Swiss confectioner Hanselmann, Cartier’s new showroom in the mountains attracted a fair number of window shoppers over the few months it was open each year. Clients who visited the ski resort at the time included everyone from the the Aga Khan III and Coco Chanel to Hollywood stars like Gloria Swanson and Douglas Fairbanks to to businessmen like Henri Deterding, “the Napoleon of Oil,” who bought the famous Polar Star diamond from the St Moritz branch.

By the outbreak of the Second World War, Jacques’ health had significantly deteriorated. Believing he should be in his native France in war time (despite the fact he shouldn’t have really travelled from England with his ill health) Jacques spent his last months in Hôtel Le Splendid in the spa town of Dax, in the south-west of France. Sadly, he wasn’t able to receive the medical care he needed there during wartime and passed away at 57 years old.
One of his last deeds was to ask his close friend, the designer Charles Jacqueau, to train my grandfather, Jean-Jacques Cartier in design. For Jean-Jacques, it was a great sadness he would never be able to work alongside his father in the business, but like his father he was also an artist at heart and grew to love the design and gemstone areas of the business. He took over Cartier London in the 1940s – when the pre-war era of big necklaces and diamond tiaras had been replaced by an age of austerity and a debilitating 125% luxury tax on jewels. Just as his ancestors had done, he had to drastically change tact once again in order to keep the business afloat… but that’s a story for another time…
***
Francesca Cartier Brickell’s book, “The Cartiers” is now available via Amazon or English language bookstores. You can also follow her journey via Instagram (@creatingcartier) or on Youtube (@francescacartierbrickell).
An Art Deco Aquamarine Diadem by Cartier London,
platinum 950, diamonds total weight c. 4 ct, aquamarines total weight c. 70 ct, signed Cartier London, reference no. 4423, workmanship c. 1930-35 @DOROTHEUM
The Dorotheum Auction Week was crowned by the sale of a rare Art Deco diadem for a sensational 582,800 euros on 10 June 2020.
The diadem was estimated € 34.000 - 70.000.
The diamond and aquamarine diadem can also be worn as a necklace.
Cartier London: The roaring 20s
At the very heart of the Cartier saga: the extraordinary life of Jacques Cartier recovered and told by his great-granddaughter Francesca Cartier Brickell - PART II
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To read part I "He lived for design : Jacques Cartier, the lesser-known brother", click here
So Francesca, tell us more about the Cartier London operation in the 1920s: what was Jacques’ involvement in the design side?
An artist himself, Jacques enjoyed being involved in the creative process. He got along particularly well with the team of designers, who respected him for his love of their trade.

Courtesy of Olivier Bachet @Palais Royal Collection
In early 1921, he and his brothers set up English Art Works, the London workshop. Until then, Cartier London had relied on the Paris workshops that supplied 13 Rue de la Paix for its stock. The setup had worked well enough for a time, but as demand increased, it became apparent London should have its own team on the ground (as in New York). Félix Bertrand, a talented jeweler who had proved his skills setting up the American Art Works workshop under Pierre, was sent over to do the same in London. Under his leadership, and that of a fellow Frenchman, Georges Finsterwald, a team of skilled mounters, setters, and polishers were hired.
Of course, building a fine jewelry workshop didn’t happen overnight. The Cartiers sought to hire top master craftsmen, at considerable expense, and then relied on them to teach the young apprentices. The firm took on about five or six apprentices a year, mainly Englishmen (Jacques felt strongly it was his duty to offer opportunities to the English workforce), of which only one or two made it through the first year of a six-year traineeship.
The creations made under Jacques quickly found favour with the English aristocracy, both for their original designs and for the high quality of the craftsmanship. I love the example of a carved emerald necklace made for a maharaja: those emeralds were so fragile that the craftsman tasked with setting them was given 48 hours off work beforehand so he was entirely relaxed because any slight shake of his hand could cause the precious gems to crack!

Signed Cartier London. @Christie's London, Important jewels, 12 dec 2012.

There’s a fun account of Jacques as a boss by one of the apprentices: “Jacques was then what we called a gentleman. He was excitable, kind and lived for design. I learnt that everything grows from something that grew before, and the room contained a library of things that had gone before: Chinese carpets, Celtic bronze-work, Japanese sword hilts, arabesques...”. This is the basis of the family motto “Never Copy, Only Create”, which I discuss in the book (and in this Youtube video).
Essentially the idea was that anything and everything could and should be used for inspiration, except for existing jewelry. The brothers were avid readers of Owen Jones’ book, “The Grammar of Ornament” which had plates exploring the design principles behind the architecture, textiles, and decorative arts of contrasting cultural periods (for example, the Arabian, Turkish, Persian or Indian styles).


To what extent do you think Cartier London had its own identity in Jacques’ time?
Certainly, by the late 1920s, Jacques had succeeded in creating a distinct identity for Cartier London, so much so that he decided to buy his two brothers out of the branch. But the three branches remained intertwined, as the three brothers continued to share everything from designs to clients to gems. And though Jacques was living in England and running a British company, he never lost that sense of duty to his native France, even becoming head of the Alliance Française in London.
Jacques was not particularly social by nature but he became well-networked within British high society, thanks in part to being a savvy marketeer. He would offer jewels as prizes for charity events or lend jewellery to socialites for big events, such as the Jewels of the Empire Ball at the Park Lane Hotel, the hot invite of the day. Most evenings after work, he and his wife Nelly would dine out in London with clients, visiting French dignitaries and friends.

The 1920s were an exciting time for growth, with new money competing with old and Jacques’ acquaintances included a growing number of financiers, industrialists, and entrepreneurs, from Victor Sassoon to Captain Alfred Lowenstein (before his tragic – and mysterious – early death falling from his private plane). Clients of the London branch also covered the spectrum of English high society, from aristocrats and heiresses such as Lady Sackville (known to pop in to buy gifts for her daughter, the writer Vita Sackville-West, after their momentous rows) to a new generation of “bright young things”.
Satirized in Nancy Mitford’s and Evelyn Waugh’s novels, this fast-living wealthy bohemian group had expense accounts at Cartier and danced all night in diamonds. Their number included Nancy Cunard, Lady Abdy, Lois Stuart, the Guinness sisters, and even Daisy Fellowes whose famous Collier Hindou necklace was made in Paris but who – like many clients - shopped in all three Cartier branches: in London, she bought the 17.47ct Youssoupoff Tête de Bélier (ram's head) pink diamond which was said to have later inspired Elsa Schiaparelli's signature shocking pink.
Tell us more about Jacques’ wife, Nelly?
Nelly was great fun, a larger than life American heiress who was – on the surface – the opposite to Jacques. A Protestant who had been married before, she was living in Paris’ Avenue Henri Martin with her parents and young daughter when she met Jacques for the first time. It was pretty much love at first sight – or first meeting at least - but Nelly’s father, John Harjes, a prominent banker and the partner of J.P. Morgan (in fact, John Harjes’ bust still sits proudly in the lobby of the Place Vendome J.P.Morgan bank today) did not approve of his daughter marrying a jeweller. So he set a condition: if Jacques really wanted to marry Nelly he must prove his love by staying away from her for an entire year. Jacques agreed without hesitation. 365 days later, he returned to ask for her hand in marriage. Mr Harjes agreed and Jacques promised there and then that he would never touch a cent of Nelly’s money.
The couple adored each other. In the 1920s and 1930s, Jacques went back to India regularly and Nelly would accompany him on the trips (she travelled with 18 suitcases so she took along her personal dresser as well!) They took their chauffeur-driven Rolls Royce all the way from London but it wasn’t always plain sailing: there were times when they had to cross streams on rafts or when the Rolls had to be dismantled to make it over rocky terrain - and then put back together again on the other side! Accommodation en route varied a large amount too: one minute they might be sleeping on the floor in a basic station house, the next luxuriating in the comfort of a maharaja’s palace.

Nelly was also a great adventurer in her own right, always up for new travel in exotic places. Jacques called her wanderlust the “Va Va” as she wasn't good at sitting still : she wanted to "go go" And when she returned from those explorations – she often travelled with her best friend, Madame Fournier - he loved hearing all about them: “raconte moi ton cinema” he would say, sitting by the fire in their sitting room as she filled him in on stories from the other side of the world. When she returned from Egypt, for example, she brought back small momentos. Jacques kept a bright blue scarab beetle made from fabric/feathers: remarkably similar to the ones Cartier would later create as jewels.


Is this where the idea for Egyptian revival jewelry came from?
Well, Jacques had first visited Egypt in 1911 so they both knew the country, and there was something of an Egyptian craze in the early 1920s. When Egyptologist Howard Carter announced to the world in 1922 that he’d unearthed an opening to Tutankhamen’s tomb, and with it artistic treasures of a long-shuttered mysterious past, Egyptomania swept Paris, London, and New York.
After the deprivations of war, escapism was more welcome than ever, and ancient Egypt was suddenly all anyone could talk about. Fashion designers found inspiration in motifs like lotus patterns and the vibrant colors of Egyptian paintings. Women heaped on the black eyeliner and put their hair up to more closely resemble the glamorous beauties of the past. Bright cocktails with names like King Tut became the drinks du jour and Egyptian-themed parties were all the rage.
Jacques was similarly inspired. As photographs and articles made their way to the West, Jacques carefully cut them out of newspapers and folded them into his small black leather diary. Not many things made it into that diary, but Jacques felt that this momentous discovery had revealed works of art on “a plane of excellence probably higher than has been reached in any subsequent period of the world.”

This led Cartier London to create some truly stunning Egyptian Revival style jewels. In January 1924, there was a full page spread in The Illustrated London News Cartier London’s Egyptian creations, announcing that “Women interested in Egyptology, who desire to be in the Tutankhamen fashion, can now wear real ancient gems in modern settings as personal ornaments.” These one-of-a-kind pieces incorporated genuine antique treasures, sourced by the Cartier brothers from European antiques shops and Eastern bazaars.
The challenge was keeping the purity of the ancient style while updating it for a modern audience. This wasn’t to be a whimsical attempt to follow the fashions of the day, it was deeply rooted in authenticity. For a deep blue bead from 900 B.C, Jacques chose to enhance its color with the smallest amount of diamond and onyx on its top and base, and to make it into a simple pendant. A figure in a bright blue crescent-shaped glazed faïence was brought into focus with a subtle border of diamonds and onyx, and three-thousand-year-old stone carvings were framed in black onyx. The focus was on a simple dressing up— nothing fanciful. It had to be true to the original style and stay classic. These were ancient artifacts that had survived thousands of years—they should not be turned into elaborate pieces that might soon go out of fashion.

What about the Tutti Frutti jewels – how was Jacques involved with those?

Jacques saw the world with an artist’s eye and India made a particularly strong impression on him: “Out there everything is flooded with the wonderful Indian sunlight.. one does not see as in the English light, he is only conscious that here is a blaze of red, and there of green or yellow”. After his trips, he would meet with his eldest brother Louis and the head designer in Paris, Charles Jacqueau, and they would discuss ideas for an Indian-style of jewellery. `
This would take many forms – from carved emerald pendant brooches (like the one bought by Marjorie Merriweather Post from Cartier London) – to the now iconic tutti frutti jewels where vivid rubies, emeralds and sapphires would be boldly combined together. The colored stones might be faceted, cabochon, or carved, and the motif was often based on nature but the most important characteristic of those gems – for Jacques – was their colour. They had to be bright, bold and striking. That was the secret behind the powerful effect of the tutti frutti jewels (along with the intricate designs and exquisite craftmanship).
And what I found particularly interesting in my research was that although those Indian-inspired jewels often reach record prices at auction today (it was fun to be involved on the online Sotheby’s sale of a Tutti Frutti bracelet last month that broke records when it sold for $1.3m!), in reality the carved gems that Cartier used back then were far less expensive than larger precious gemstones (partly because any flaws could be carved out). So actually, during the 1930s they became quite good “Depression-era jewels”. I show some more examples of that style in this Youtube video.
Do you have any favourite Indian-inspired pieces?
It’s hard to say – and I am guilty of changing my mind regularly! A wonderful example of a Cartier London "tutti frutti" piece that I saw again just before lockdown at the V&A Museum (where it sits on permanent display in the jewellery gallery for those who would like to see it too!) is the Mountbatten bandeau. It’s stunning – delicate and bold at the same time and a brilliant design made to either sit flatteringly on the forehead or be split into 2 bracelets. (3 jewels for the price of 1 really!).


In my research I dived into the background of those 1920s bandeaus and discovered that in 1928, Jacques wrote to his brother Pierre telling him about a London charity fashion show that he was working on with notorious society heiress Lady Cunard. “The idea”, Jacques explained,“[was] to show what women with short hair can wear, both now and when they start to grow their hair again.” The days of pre-war big hair up-dos and heavy tiaras were over and the Cartiers quickly adapted their offerings to include a vast array of head-dresses, bejewelled hair clips and diamond crescents and circles to decorate tightly shingled heads.
The colourful Mountbatten bandeau (as it later became known) was one of over 100 pieces that Cartier made for the fashion show but it was snapped up for £900 before it even made it to the runway. The buyer, Edwina Mountbatten (1901-1960), was a strong stylish and well-connected woman who knew what she wanted when she saw it. She would also, rather aptly given her choice of the Indian-inspired headdress, go on to become the last Vicereine of India.
Did Jacques have a favourite Indian client?
Well, over time, Jacques built a relationship with many of the Indian princes, from the Maharajas of Kapurthala, Patiala, Indore, Baroda to the Nizam of Hyderabad. They chose to give their large commissions to Cartier not only because they appreciated the quality of the firm’s craftsmanship, but also because they trusted Jacques, and were appreciative of the time he had spent in the country. Of all of them, he was especially close to the Maharaja of Nawanagar. Better known as Ranji (short for Ranjitsinji), the Jam Sahib had been educated in England and was a well- known cricketer.

After Jacques’ initial trip to India in 1911, the two men often saw each other and became good friends. Jacques and Nelly were frequent visitors at his Indian palace: Nelly wrote home to her children in excitement after her first trip there in 1926 for Christmas: “I hardly know how to begin to describe the luxury we live in. Indeed what with one Rolls at our disposal and the suite in this palace built for the Prince of Wales visit (which he never came to see and hurt most frightfully His Highness as you can imagine).” After a Christmas banquet -“table decorations wonderful but no crackers or mince pies could make it a real Christmas atmosphere” – they enjoyed a “very very thrilling” panther shoot. Not very politically correct these days but interesting given the iconic Cartier panther motif!
Ranji, like many of the Maharajas, also travelled to England regularly and he would meet Jacques in London to discuss jewellery commissions or invite him and Nelly – plus the kids - to spend holidays at his Ballynahinch estate in Ireland. My grandfather recalled spending blissful summers there as a young boy, roaming free with his siblings over the enormous estate, with his Ranji as their generous host.

At the root of the jeweller’s and the maharaja’s close friendship was a sense of sharing the same values. Jacques described Ranji as “a Prince really princely in his taste as well as by the qualities of his mind and heart”. But that was not all: they also shared a love of gemstones. The stylish Indian ruler would happily wait decades for the most perfectly deep- red ruby or vivid green emerald. It didn’t have to be huge and show-stopping; he was far more interested in the quality and innate beauty of the jewel. Like a true collector, he would admire his gems even when alone, holding them in his hands and studying them under different lights just for the pleasure of it. The two men tended to agree on most things, but interestingly disagreed on the perfect colour of rubies –Jacques felt it should be deep red but Ranji preferred more of a purple hue.

Was there a favourite piece made for the Maharajah of Nawanagar?
The Maharaja Jam Sahib of Nawanagar became a very important client for Cartier, commissioning museum-worthy emerald necklaces and buying figurine mystery clocks. He had a truly incredible collection of stones. Jacques’ favourite commission of all was a diamond necklace. But not just any diamond necklace: this one took three years to make, as an increasing number of superb quality diamonds kept being added to the mix, so the design had to keep being adjusted to include them!
“Had not our age witnessed an unprecedented succession of world-shaking events,” Jacques would later write, referring to the cumulative effect of the First World War, the Russian Revolution, and the Depression, “such gems could not have been bought at any price; at no other period in history could such a necklace have come into existence.”

In the end, the necklace included the Queen of Holland – a blue-white 136.25 carat diamond- as well as fancy blue and pink diamonds and an olive-green brilliant diamond of 12.86 carats—“A rare stone, indeed!” Jacques had exclaimed when he saw it. When the necklace was completed, the overall effect was extraordinary, a unique cascade of colored diamonds.
My grandfather told me how his father had been a very modest man who rarely talked about himself but this was one piece he admitted being truly proud of creating: he called it “a really superb realization of a connoisseur’s dream.”

Sadly, after all the work that had gone into it, Ranji did not have much time to enjoy the necklace and Jacques did not see his friend wear it again. Just two years later, Ranji would die from heart failure. His nephew and successor, Maharaja Digvijaysinhji of Nawanagar, would follow in his uncle’s footsteps, becoming an excellent client in his own right and often asking Jacques to remount old family heirlooms in the Cartier style such as the tiger’s eye diamond sarpech in 1937.

This interview will be continued next week, when Francesca will be discussing Jacques’ role in Cartier London in the 1930sCartier London in the 30’s : A decade of contradictions.
Francesca Cartier Brickell’s book, “The Cartiers” is now available via Amazon or English language bookstores.
You can also follow her journey via Instagram (@creatingcartier) or on Youtube (@francescacartierbrickell).
A 1924 Scarab brooch with fragments of Egyptian faience. CARTIER, BROOCH, 1924. Faience, diamond (round old-cut), emerald, smoky quartz, and enamel. Vincent Wulveryck, Cartier collection. © Cartier. This brooch was presented at the Museum of Fine Arts, Boston. Past is Present: Revival Jewery. Exhibition from February 14, 2017 through August 19, 2018 @Museum of Fine arts, Boston
"He lived for design": Jacques Cartier, the lesser-known brother
At the very heart of the Cartier saga: the extraordinary life of Jacques Cartier recovered and told by his great-granddaughter - Part I
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The history of Cartier in the first half of the 20thcentury is largely the story of the three Cartier brothers. Up until now, one of them has remained in the shadows: the youngest, Jacques. His elder brothers (Louis and Pierre) have been more widely discussed: Louis, who ran Paris, is often celebrated for his creative contribution to the jewellery world. He popularised the use of platinum as a mount in large diamond jewels and was the genius behind iconic pieces like the Tank watch. In America, there have been exhibitions and catalogues about Pierre and the Cartier New York business he founded. But Jacques has not been as widely discussed because there was less publicity known about him.
More recently, that changed when the discovery of a trunk of long-lost family letters prompted Jacques’ great-grand-daughter to delve into the untold story. Francesca Cartier Brickell has spent the last decade researching and writing about four generations of her family for a new book, “The Cartiers: The Untold Story of the Family behind the Jewelry Empire”.
I spoke to her last week to find out more about the life of this remarkable man. I am honored that Francesca Cartier Brickell has reserved for Property of a Lady this first exclusive interview in the French media !



Francesca, tell us about Jacques: what he was like and what was his role in the firm?
My great-grandfather Jacques was the youngest of the three Cartier brothers – born in 1884, he was almost ten years younger than Louis and still at school when his elder brother joined their father Alfred in the family business. Growing up, Jacques didn’t actually see himself as a jeweller: he was a gentle, artistic soul who felt a calling to become a Catholic priest. His family, however, had other ideas - his brothers told him his duty was with their fraternal trinity rather than a life spent in worship of the Holy Trinity! And so in 1906, at 21 years old, after completing his education and military service, he joined the family firm. First up was an apprenticeship in Paris where he worked in all the departments but discovered a particular passion for design and gemstones.

In terms of his contribution to the firm, Jacques was something of an all-rounder. As I explain in this Youtube video, whereas Louis was focused on the creative side (hiring designers and insisting the firm create unique pieces in the ‘Cartier Style’) and Pierre threw himself into the business side (opening branches in London and New York, traveling to Russia to meet suppliers and open an early a ‘pop-up’ shop for the Christmas season in St Petersburg), Jacques became a connoisseur of gemstones, a respected designer and a salesman who inspired great loyalty among his clients. In fact it was one of these loyal clients who wrote his obituary when he passed away: I discovered it in an old yellowing Times newspaper kept safely in the family trunk of letters all these years and I think it’s worth sharing here as it really sums him up - Lady Oxford, wife of the former Prime Minister Asquith, wrote “Jewellers are not always great artists, but this was not the case with M. Jacques Cartier. He was rarer than a great artist, or designer in precious stones: he was a wonderful friend. Completely unself-seeking, courteous to strangers, gay, kind and the best of ambassadors between the France which he loved and the England which he admired.” I was very moved to discover that because while I had grown up hearing how wonderful Jacques had been as a father, this showed the high regard in which he was held by those outside the family as well.



As I explore in my book, “The Cartiers”, the strength of Cartier in the early 20thcentury was down to all three brothers: their magic mix of complementary talents, their unbreakable bond and their shared ambition to build “the leading jewellery firm in the world.” They also had something that their grandfather (who had founded the family business in 1847) and their father Alfred had lacked: scale. There were three of them (‘three bodies, one mind’ as a contemporary of them once said), and with three they could divide and conquer. Taking a map of the world, my grandfather told me how they literally split it between them with a pencil: Louis took Europe, including the firm’s Parisian headquarters; Pierre took the Americas (he would go on to open the Fifth Avenue branch in New York) and Jacques took responsibility for clients in Britain (he would run the London branch) and the British colonies, most significantly India.

Tell us about the trips Jacques made to India, especially the first one – how did they come about?
Well, India was considered the jewel in the British Crown. Home to the Maharajas, some of the best jewellery clients on the planet, it was also the gem trading capital of the world. Jacques went on many business trips there over the years – both to buy and to sell jewels – but those trips weren’t just work for him, he came to truly love the country and its people (you can see more of Jacques’ trips to India in a behind-the-scenes video I made on Youtube).

Reading Jacques’ Indian diaries, I found it fascinating to realise how those trips had inspired many of Cartier’s creations in the 1920s and 30s. Wherever he went – from Indore, to Calcutta, to Hyderabad, to Delhi to Mumbai - he sketched and wrote about things that interested him along the way. He might note how the shape of a temple could be transformed into a brooch or how a simple lace acorn pattern he had spied in a crowded Indian bazaar had given him the idea for a diamond necklace. He had a great respect and admiration for the country and its culture – when he visits a temple, he writes: The carving of the stone … show a superior art. The ten centuries that preceded our era are one of the most wonderful periods in the history of the world. India’s share in the intellectual discoveries of these times was paramount”.

Platinum, diamonds, engraved sapphire vase, engraved rubies and emeralds. Courtesy of Olivier Bachet. @Palais Royal Collection
Jacques was 27 years old when he first visited India in 1911. Still unmarried, he had been working at the family firm for five years but he had lived a relatively sheltered life, only venturing overseas from Paris to London to head up the Cartier shop there. This was a far more adventurous mission: 3 weeks on a boat from Marseilles to Bombay, via Egypt, the Suez Canal and the Gulf of Aden. They left in the Autumn of 1911 in order to reach Delhi for the much-anticipated Delhi Durbar taking place that December. All the Indian princes would be present in Delhi to pay their respects to the new King George V and Queen Mary – and jewels would be centre stage. The Cartiers’ plan was that if Jacques was also there, he could meet multiple potential clients all in one place and hopefully also pick up the odd invitation to then visit them in their palaces.
But just to step back a moment, reading through the letters between the brothers, I discovered that surprisingly (to me at least) the main reason for Jacques taking that initial long boat trip East was not just to visit India but actually to investigate the pearl trade in the Arabian Gulf. At this stage, before the explosion of cultured pearls onto the market, natural pearls were extremely rare and valuable (to give an idea of the value: in 1917 Cartier exchanged a pearl necklace for its Fifth Avenue headquarters). No surprise then that pearls formed the lion’s share of Cartier’s income or that Cartier was keen to try and buy the pearls at source in order to ‘brand’ itself as a ‘Supplier of Pearls’ (a heading they proudly used on their invoices).

Given that many of the most sought-after and expensive white pearls were fished in the Persian Gulf, Louis sent his younger brother there on a mission that Jacques explains in a December 1911 letter: “My dear Louis, if I have understood correctly, the most important mission bestowed on me during this trip to the East was to investigate the pearl market and to report back on the most effective way for us to purchase pearls.”



The Cartiers felt that if they could meet the Persian Gulf pearl sheikhs on their own ground and begin to forge professional relationships with them, then they might be able to cut out some of the middlemen involved in the pearl trade. Most significant among Cartier’s competitors when it came to pearls were the Parisian-based Rosenthal brothers who were unique in having gained the pearl sheikhs’ loyalty and trust - and therefore had the monopoly on the pearl trade in the West, much to Louis’ intense frustration! So, on this first trip out to the East, Jacques’ traveling companion was the top Cartier pearl expert, Maurice Richard, because he needed a specialist with him who truly understood how to value pearls. After visiting the Delhi Durbar and meeting with clients in India, the pair of them - along with a translator they’d hired in Bombay - took the boat to Bahrain in March 1912. The adventure that awaited them is fascinating – meeting the pearl divers, trading with the sheikhs and the shock of eating meals sitting on the floor without cutlery! - but that’s a story for another time..

So visiting India wasn’t actually the main aim of that first trip?
I would say that, initially, it was more a by-product of that primary mission, but it became much more than that – and by the 1920s and 30s certainly, the Cartier Indian connection became absolutely fundamental to the wider business. That first trip to the Durbar though didn’t go as smoothly as planned. Much like a traveling salesman, Jacques had taken with him suitcases of jewels to tempt the Maharajas: delicate, garland-style necklaces, brooches and head ornaments. However, he soon discovered that in India it wasn’t the women who were buying the jewellery, it was the men. And they were not buying for their wives or their lovers, like they were in Europe. They were buying for themselves. So after going to all that effort of taking such valuable jewels out there – insuring them, declaring them on arrival in Indian Customs, carrying them around the country with him and so on- to his dismay, Jacques found that the most orders he received were actually for the simple pocket watches that were all the rage in Paris at the time. Although the maharajas had some of the most splendid, exotic, envy-inducing gems on the planet, they were also – so Jacques discovered –simply keen to keep up with the fashions of the West.


Signed Cartier, Paris, circa 1910. @Christie's
So did the Durbar turn out to be a disappointment?
Well, the Durbar itself was a bit lackluster when it came to sales, but it did enable Jacques to meet many of the ruling princes in their majestic tents across the Durbar encampments, including the Maharaja of Nawanagar who became a great friend. And from those initial meetings, he received invitations to visit them in their palaces across the country: sometimes he stayed in opulent palaces but at other times he was simply a traveling salesman sleeping on rough matting on the floor in basic station houses. As he travelled through the country, Jacques wrote extensive travel diaries, some of which I have based my travels on as I wanted to revisit many of the places for myself.

In Baroda, for example, Jacques talked about meeting the Gaekwad and Maharani in 1911 and described how he was asked to come up with designs for the resetting of the crown jewels. He spent days furiously sketching in the palace before the local court jewellers grew jealous at his presence and made him leave without securing the commission! The Maharani, however, managed to quietly give him some of her jewels to remodel. For me, it was wonderful to visit Laxmi Vilas Palace a century later and share some of Jacques’ sketches with the current Maharani Radhikaraje. When I showed her this pencil sketch from Jacques’ diary for example, she was immediately able to identify it as the diamond aigrette pictured below. That was exciting – one of those moments when past and present collide.


But Jacques was not just in India to sell jewels. As the family gemstone expert, he was always on the lookout for gems to buy as well and when he travelled, he would take his pouch of trusty “killer stones.” These were the most perfect examples of precious stones that he owned: a Burmese ruby, a Kashmir sapphire, a Colombian emerald, and a Golconda diamond. He would use them as comparison stones when buying from dealers in shaded crowded markets or from gemstone mine owners next to the sapphire pits under the bright sun or from royalty in palaces - it meant he was assured of a perfect comparison stone whatever the light was like at the time. And as he never knew when the opportunity would arise on his travels to buy gems, those killer stones were a simple way of making sure he was always prepared. When he visited the palace of Patiala in 1911, for example, the Maharaja wanted to buy a special Cartier pearl but instead of paying for it with cash he proposed exchanging it with some of his own jewels so Jacques found himself unexpectedly valuing gems instead of simply selling them.
In time, thanks to Jacques’ buying expertise and his loyal links with the gem dealers and palaces, Cartier became renowned as the jeweller with the best coloured gemstones in the world.

Tell us about WWI – did Jacques fight?
Yes – he felt a strong sense of duty to his country: my grandfather explained to me that for his father it had been “Country, Family, Firm” in that order. When WWI broke out, Jacques was actually ill with tuberculosis and sent to a sanatorium in Switzerland - but instead of being relieved to be avoiding the fighting, he just wanted to receive the best treatment as fast as possible so he could rejoin his regiment and fight alongside his fellow countrymen. His brothers took safer jobs (Pierre as a chauffeur to a general, and Louis in several office posts) and they urged Jacques to do the same. He had the perfect excuse, they told him, it would be easy to have a doctor sign him off as unfit for service at the Front given his weak lungs. But Jacques refused: he saw no reason why he should be treated any differently from his fellow soldiers. After recovering from tuberculosis, he joined his cavalry regiment at the Front, only to be gassed and sent to another hospital – this time in Lucon - for several weeks. Once he had recovered for the second time, he re-joined his regiment at the front again – much to his brothers’ exasperation - leading them into battle. For services to his country, he received the Croix de Guerre but his lungs never really recovered from the gassing and in later years, he would describe himself as living a ‘half-life’ lacking energy and struggling for breath.
After the War, the world was a very different place. Years of fighting had taken their toll on Europe and the balance of wealth – and with it Cartier’s key clients - shifted across the Atlantic. Jacques went to help Pierre with the Fifth Avenue branch (they felt they needed two family members out there to really grow the business and meet demand) before moving to England a few years later. Together with his wife Nelly and their four children, he settled in Milton Heath, a large country house in Dorking, Surrey. Every morning, as his son took the horse and trap to school, Jacques would travel the thirty miles in his chauffeur-driven Rolls-Royce up to Cartier London in Mayfair. He had moved the London headquarters to 175 New Bond Street in 1909 (previously it had been a much smaller showroom below the Worth shop around the corner on New Burlington Street) and it was an impressive building. Outside, a doorman stood to attention in front of the royal warrants on the pillars, while inside walls were draped in rose-pink moire, candelabras hung from the ceiling and mirrors reflected discreet touches of gilt. It was, according to a designer who worked there in the 1920s: a “near replica of Cartier in Paris, but perhaps even more upstage than the establishment in the rue de la Paix - having an added barrier of English reserve. Anyone would think twice before entering.”
This interview continues with "Cartier London : The roaring 20s"
Francesca Cartier Brickell’s book, “The Cartiers” is now available via Amazon or English language bookstores.
You can also follow her journey via Instagram (@creatingcartier) or on Youtube (@francescacartierbrickell).

Francesca Cartier Brickell, Photo Credit: Jonathan James Wilson
Les objets d'exception de Cartier : l'oeil d'Olivier Bachet. Entretien avec Marie-Laure Cassius-Duranton
« Un objet Cartier est reconnaissable au premier regard. C’est une signature qui affirme un certain style » Olivier Bachet
Vient de paraître un ouvrage exceptionnel en deux volumes consacré aux Objets d'exception de la Maison Cartier. Cette publication indépendante due à Olivier Bachet et Alain Cartier rassemble et présente plus de mille objets réalisés par la maison Cartier entre 1875 et 1965, pour la plupart inédits et provenant de différentes collections. Ils sont réunis dans un luxueux coffret reproduisant le décor émaillé d’un étui à cigarettes réalisé en 1930 par l’atelier Renault pour Cartier (vol. 2, p. 437).
Cet ouvrage est le fruit d’un travail de recherche de grande ampleur qui s’impose d’emblée comme une référence majeure dans la documentation écrite sur la maison. Le parcours est dense et relate sous plusieurs angles l'histoire des objets d'art Cartier. Le premier volume traite surtout des questions de style et des sources d’inspiration. Le second met en avant l’importance des ateliers de fabrication, des fournisseurs, des dessinateurs et analyse les processus de création et les inventions techniques mises en œuvre par la maison.
A l'occasion de cette publication, Marie-Laure Cassius-Duranton, historienne d'art, gemmologue, professeur au Laboratoire Français de Gemmologie ainsi qu'à l'Ecole des Arts Joailliers, a longuement interviewé Olivier Bachet.
Entretien avec Olivier Bachet : son métier de marchand, sa passion pour Cartier, les origines de son livre
Qui êtes-vous Olivier Bachet ?
Je suis marchand, antiquaire spécialisé dans le bijou ancien et les objets précieux. Je suis membre de la Compagnie Nationale des Experts et du Syndicat National des Antiquaires. Je travaille avec mes deux associés Gilles Zalulyan et Tom Korpershoek. Ensemble, nous avons créé la société Palais Royal. Nous sommes basés à Paris et à Hong Kong.
Comment êtes-vous devenu marchand ?
Je suis venu à ce métier tout à fait par hasard. C’est une histoire d’amitié. Mon meilleur ami Gilles Zalulyan est entré dans le métier dès le plus jeune âge. Dès qu’il a eu son baccalauréat, il a travaillé avec son grand-père qui était diamantaire et son intérêt s’est très vite porté sur le bijou ancien. En 2000, les circonstances de la vie ont fait que j’ai commencé à travailler avec Gilles. Avant cela, ce monde m’était totalement étranger. Ma famille n’était pas dans le métier et j’ai fait des études universitaires d’Histoire à la Sorbonne, j’étais spécialisé sur l’histoire des Jésuites français au XVIIe siècle. Cette formation n’a aucun lien direct avec ce que je fais aujourd’hui, mais elle a été intellectuellement structurante, notamment du point de vue méthodologique.
Comment avez-vous appris ce métier ?
Quand j’ai commencé, j’étais incapable de faire la différence entre un bijou moderne et un bijou ancien. Mais j’ai appris avec Gilles et en travaillant beaucoup, en observant, en regardant les pièces, de manière principalement empirique et intuitive ; ce qui est le cas pour beaucoup de marchands et qui est le contraire des universitaires. Cette connaissance empirique est essentielle mais ne suffit plus à un moment donné et pour progresser il faut aussi passer par l’étude de la documentation écrite disponible sur le sujet. Regarder les images dans les livres c’est bien, mais ça ne suffit pas. La lecture est complémentaire de la connaissance sensuelle des objets. Et comme je suis monomaniaque, j’ai lu toute la littérature sur Cartier.
Malgré tout, je crois davantage à l’expérience qu’aux connaissances intellectuelles, car notre métier est avant tout « une histoire d’œil ». Il faut savoir observer, identifier les poinçons, les numéros, analyser dans le détail les signes d’une main, d’un style. Avec le temps, ça devient une seconde nature, on est tout de suite alerté par d’infimes signaux. C’est cette connaissance qui permet de faire des affaires quand on est marchand. Après, le plus difficile dans notre métier est de fixer le prix. Dans notre société, nous sommes trois associés et il arrive régulièrement que nous n'estimions pas un même objet au même prix, et ceci même après vingt ans d’expérience.
Pourquoi cet intérêt pour la maison Cartier ?
En fait, je suis un amateur d’objets plus que de bijoux. Et la production de Cartier dans ce domaine est d’une qualité exceptionnelle et nettement supérieure à toutes les autres maisons en quantité. Mon intérêt pour Cartier a été très précoce et est dû à plusieurs raisons. D’abord parce que c’est de grande qualité, mais aussi parce que le style est reconnaissable entre tous. Bien que pour un profane tout se ressemble dans les objets de qualité de cette époque, pour un œil averti une pièce de Cartier est reconnaissable immédiatement. C’est une signature qui affirme un certain style. On peut reconnaître un objet Cartier au premier regard. Mais c’est assez ordinaire finalement. Pour faire une analogie que tout le monde comprendra, en matière de voitures une Ferrari ne ressemble pas à une Porsche qui ne ressemble pas à une Aston Martin.
Cartier, c’est la simplicité. Par exemple, au début du XXe siècle, la grande référence en matière d’orfèvrerie est Carl Fabergé. Cartier s’en inspire et fait du Cartier à la mode Fabergé. Fabergé c’est cent quarante-quatre couleurs en émail, Cartier se limite en général à quatre couleurs (bleu, vert, violet, rose). C’est pareil pour les pierres dures, toujours la même chose, surtout agate, onyx, cristal de roche et lapis, pas de malachite, de bowenite, de rhodonite. A partir d’une base simple, Cartier fabrique une grande variété d’objets. Pour les pendulettes, la maison crée à partir de quatre formes (rond, carré, rectangle, borne), presque jamais de triangle.


Autre exemple, dans les années 1920, Cartier n’utilise jamais d’émail opaque rose. On en trouve chez Van Cleef & Arpels, chez Janesich, mais pas chez Cartier. Grâce à la longévité de la maison qui produit des objets depuis le début du XXe siècle, le style évolue avec la succession des modes et donne lieu à une production particulièrement abondante toujours caractéristique et identifiable correspondant à des partis pris esthétiques bien précis. On trouve chez Cartier un nombre infini d’objets, du cure-dent à la pendule mystérieuse. Dans ce domaine, Cartier jalonne et interprète l’histoire des styles.

Quels sont selon vous les exemples les plus emblématiques ? Et quels rapports entre l’objet et le bijou ?
Du point de vue du style, on peut établir un parallèle permanent entre le bijou et l’objet. Par exemple, quand on observe l’évolution de la production entre les années 1920 et les années 1930, on est frappé par le passage d’un style exotique raffiné inspiré des arts de l’Orient et de l’Extrême-Orient fait de motifs ornementaux et naturalistes stylisés à un style plus abstrait et monumental, affirmation de la géométrie en volume.
Comme je le dis dans le livre, à partir de 1935 la géométrie douce laisse place à la géométrie virile, la surface plane est remplacée par le volume, on peut établir un parallèle de ces objets avec l’architecture de l'époque, celle du Palais de Tokyo par exemple. Dans les années 1930 la production de Cartier Londres se distingue de celle de Cartier Paris. Ce parti pris des bijoux massifs sertis de grandes gemmes de couleur (aigues-marines, citrines, améthystes) est caractéristique de Cartier Londres et se reconnait instantanément.
Dans le domaine des objets, c’est pareil, le côté massif et architecturé prime. Par exemple, des nécessaires en or avec fermoir en platine et diamants baguettes fait à Londres dans les années 1930 sont remarquables de ce point de vue. Les objets augmentent en dimensions, sont plus stylisés qu’avant. Le parallèle stylistique entre le bijou et l’objet est particulièrement développé dans la partie intitulée « l’audace de la simplicité » dans le chapitre « Rigueurs géométriques ».
Certaines créations sont d’une audace remarquable. Par exemple, cette commande spéciale pour une boîte de beauté en forme de borne kilométrique réalisée par Cartier Londres en 1936.

Mais l’audace formelle est souvent supérieure dans les pièces réalisées pour le stock. Pendant la crise, Cartier a fabriqué des pièces modernistes dans l’esprit de l’Union des Artistes Modernes comme Jean Fouquet ou Raymond Templier. L’exemple du poudrier en laque noire, corail et roses de diamant réalisé en 1934 par Cartier Paris pour le stock de Londres est caractéristique. La crise économique pousse la maison à remplacer le luxe par une audace stylistique inédite et des innovations techniques. Notamment la laque, moins chère, remplace l’émail.

C’est aussi à cette époque que Cartier dépose le plus grand nombre de brevets d’invention de son histoire. Les contraintes poussent la maison à innover non seulement stylistiquement mais aussi techniquement. De ce point de vue, le tube de rouge à lèvres en argent laqué noir, breveté SGDG (sans garantie du gouvernement) vers 1935, est caractéristique.

Cette évolution est aussi liée à la direction artistique de la maison. Les créations des années 1910 à 1930 résultent essentiellement de la fécondité du duo formé par Louis Cartier et Charles Jacqueau. Mais il ne faut pas sous-estimer l’influence des autres frères Cartier. Les idées ne venaient pas seulement de Louis. On sait que les frères de Louis intervenaient aussi. Par exemple, on a retrouvé une lettre de Jacques Cartier témoin du grand incendie de la cathédrale de Reims provoqué par les Allemands en 1914 adressée à Louis dans laquelle il lui suggère de réaliser des bijoux avec les vitraux brisés de la cathédrale. Des morceaux de vitraux de la cathédrale furent donc montés par Cartier sur des bijoux.
Nous connaissions le réemploi notamment des scarabées égyptiens dans les bijoux des années 1920. C’est incroyable et émouvant cette histoire. Quelle signification conférer à ces bijoux ?
Je crois que chez Cartier, les problématiques sont plutôt stylistiques et la symbolique n’entre quasiment jamais en ligne de compte, sauf pendant la seconde guerre mondiale avec les bijoux patriotiques. Dans les années 1920, les arts d’Orient et d’Extrême-Orient sont des sources d’inspirations formelles mais leur utilisation n’implique pas ou peu de charge symbolique. Jacqueau connaît le signe chinois qui signifie « longue vie » par exemple, mais ça reste assez anecdotique. Le problème c’est surtout de faire dans le goût chinois, la symbolique du dragon ou du phénix n’a que peu d’importance, c’est le motif qui importe. Les motifs et les couleurs sont signes des cultures. Par exemple la combinaison rouge et vert évoque la Chine ; la turquoise et le lapis lazuli renvoient à la Perse ou à l’Egypte ancienne. Une sorte de syncrétisme stylistique domine. Les exemples sont multiples comme les mélanges chinois-moghol, persan-chinois, etc.


Quant aux réemplois, ils font partie du processus de création et appartenaient chez Cartier au « stock des apprêts ». De multiples exemples existent dans les bijoux comme dans les objets. Par exemple, un poisson chinois sculpté dans une agate est transformé en manche de coupe-papier en 1930. Louis Cartier chinait beaucoup et certains objets l’inspiraient pour en créer de nouveaux.


Pour en revenir aux bijoux patriotiques, pourriez-vous nous parler de Jeanne Toussaint ? Car selon sa biographe Stéphanie Des Horts, c’est elle qui aurait inventé la broche « Oiseau en cage ».
Pendant la Première Guerre, Cartier n’utilise pas la symbolique car on peut dire ouvertement les choses, en témoigne la caricature de l’Ogre Prussien coiffé d’un casque à pointe (vol. 2, p. 34). Mais pendant la Deuxième Guerre, avec l’Occupation, on doit dissimuler ses opinions et utiliser des métaphores pour les exprimer. C’est probablement Jeanne Toussaint qui a inventé les oiseaux en cage, ce qui lui vaudra d’ailleurs d’être arrêtée par la Gestapo. Je pense que Jeanne Toussaint était une femme d’un grand talent. Elle sentait remarquablement les tendances. On lui doit notamment toute la joaillerie naturaliste d’après-guerre, les oiseaux et les animaux dont la fameuse panthère. Elle est arrivée dans la maison en 1917 et a commencé par créer des sacs. En 1933, elle est nommée à la tête de la haute joaillerie. Son talent s’exprime notamment grâce à sa collaboration avec le dessinateur Peter Lemarchand.
Comment est né le projet de ce livre ?
Je suis issu d’une famille d’intellectuels, d’universitaires. Et dans ce milieu, ça se fait d’écrire et de publier, c’est important. En faisant ce livre, j’ai d’abord accompli cette ambition de publier au moins une fois dans ma vie. Mais pas sur n’importe quel sujet bien sûr. Et puis, j’avais envie de partager mes connaissances et de montrer des objets inédits. Beaucoup de livres ont été publiés sur Cartier, mais peu ont été consacrés aux objets et peu ont étudié en profondeur le sujet. Et j’avais à cœur de parler de la fabrication, des ateliers, des matériaux employés, des sources d’inspiration, d’évoquer des choses dont personne ne parle parce que ça doit rester secret, tout en faisant œuvre d’historien. Par exemple, mettre en rapport la géographie de Paris avec les métiers. Je voulais mettre un plan de Paris du début du siècle et mettre des points à l’endroit des ateliers qui ont travaillé pour Cartier. Tout tient dans un rayon de cinq cents mètres. C’est de l'ultra spécialisation, la quintessence du savoir-faire français.
Combien de temps a été nécessaire pour écrire ce livre ?
Nous avons mis six ans à écrire et publier ce livre. Il a représenté énormément de travail, surtout pour le finir…En effet, comme on dit « le mieux est l’ennemi du bien » et si on ne devait publier que des choses parfaites on ne publierait jamais rien.
Vous avez écrit ce livre avec Alain Cartier. Pouvez-vous nous le présenter ?
Alain Cartier est le petit fils de Louis Cartier et s’est toujours passionné pour les productions de la maison. Il en a une connaissance excellente et a conservé des archives personnelles essentielles pour l’histoire de la maison. Alain est aussi marchand. C’est un grand expert et il a apporté beaucoup de collections, beaucoup de connaissances ainsi que ses archives personnelles.
Vous avez publié cet ouvrage de manière complètement indépendante, racontez-nous cette aventure.
Nous avons décidé de contrôler entièrement la publication pour être libres, mais ça n’a pas été facile. En fait, c’est comme si on devait construire une maison sans être architecte. Nous avons appris en quelque sorte le métier d’éditeur et nous nous sommes heurtés à de multiples difficultés pour réunir tous les corps de métier nécessaires à la réalisation du livre, comme celles de trouver un photographe, un maquettiste, un traducteur, …
Comment la maison Cartier a-t-elle réagi ?
Chez Cartier, ils ont tous été très enthousiastes. Je dois dire qu’ils n’ont pas posé de problème, au contraire ils ont même été très aidants. Nous avons d’excellentes relations avec eux, la maison nous a d’ailleurs autorisé à publier des documents et des photos de pièces qui proviennent de leurs collection et archives.
Justement, d’où proviennent les objets et la documentation publiée dans votre ouvrage ?
Ils proviennent de la collection Cartier, mais aussi de grandes collections particulières comme celle de la reine d’Angleterre, de musées américains, du MAD (Musée des Arts Décoratifs), du Musée du Petit Palais, de collections privées, beaucoup de notre collection (Palais Royal), des pièces que nous avons toujours et d’autres qui ont été vendus et de la collection d’Alain Cartier. Il s’agit principalement de pièces inédites, jamais publiées.
Si vous deviez choisir un seul objet de Cartier, lequel et pourquoi ?
J’aime plein d’objets différents, mais un me plait particulièrement à cause de sa simplicité apparente, symptomatique de la manière dont il a été fabriqué. C’est une boîte que j’ai vendue mais que j’aimais bien. Elle n’a l’air de rien, c’est une boîte néoclassique de 1913 en or avec un décor émaillé noir très simple reproduisant celui d’un cratère grec du Ve siècle avant notre ère, croqué par Charles Jacqueau lors d’une de ses visites au Cabinet des Médailles et des Antiques de la BNF. Louis Cartier incitait ses dessinateurs à se rendre dans les musées et les expositions. Les arts, principalement antiques (Egypte, Grèce antique), néoclassique (style Louis XVI), d’Orient, d’Extrême-Orient et contemporain ont été une source majeure d’inspiration pour la maison.



Qu’ admirez-vous le plus dans l’histoire de cette maison ?
En fait, je vais revenir à mon côté mercantile, éloigné de l’art. Je crois que ce qui me fascine le plus chez les frères Cartier, au-delà de l’art et de leur goût, c’est leur remarquable talent d’hommes d’affaires. Et c’est ce talent qui a permis à l’art de perdurer et de se développer. Si on considère la rue de la Paix et de la Place Vendôme dans les années 1920, plein de maisons étaient exceptionnelles dans leurs créations à l’époque, mais peu sont restées. Des maisons comme Janesich, Linzeler, Ghiso, Lacloche créaient aussi de belles pièces, mais elles n’ont pas perduré. Quand en1899 Alfred Cartier s’installe rue de la Paix après n’avoir été qu’un petit revendeur, il fait preuve de discernement. Avec ses fils, ils ont eu les bonnes intuitions. Par exemple, en décidant de s’installer à New York plutôt qu’à Saint Pétersbourg avant la Révolution Russe. Ils ont peut-être eu de la chance, mais ils avaient « le nez fin ». En quinze ans ils ont fait de Cartier le joaillier le plus célèbre du monde. Il fallait quand même avoir un certain talent. Et c’était vraiment des précurseurs dans de nombreux domaines. Comme l’a écrit Hans Nadelhoffer, l’histoire de Cartier c’est la combinaison d’un sens artistique et d’un sens des affaires portés au plus haut, sans jamais céder à la mode. Mieux, en faisant la mode. Par exemple, quand ils s’installent rue de la Paix en 1899, l’Art Nouveau est au sommet. Guimard conçoit les entrées du métro et Lalique est probablement le joaillier le plus remarqué de l’Exposition Universelle de 1900. A ce moment là, la plupart des joailliers, comme Boucheron ou Mellerio font des pièces Art Nouveau dans le sillage de Lalique. Mais Cartier n’aimait pas l’Art Nouveau et, à ma connaissance, il ne cèdera pas à la mode. Il considère que l’Art Nouveau, c’est la mode des bourgeois et ça ne l’intéresse pas. Ce qui l’intéresse, c’est l’aristocratie et les « aristocrates du Nouveau Monde ». C’est pour cela qu’il va autant s’intéresser à l’art du XVIIIe siècle, car c’est la référence stylistique majeure à l’époque, notamment pour les Américains. C’est certainement ce qui explique le succès du style « guirlande ».
A qui s’adresse votre livre ?
A tous les connaisseurs, les collectionneurs, les amateurs de beaux objets qui n’existent plus et sont les témoins d’un temps révolu, aux historiens et aux inconditionnels de Cartier bien sûr !
Quatre Objets d'art Cartier ayant réalisé des records de vente
Aux enchères, les records de Cartier sont surtout atteints par des bijoux. Avec Van Cleef & Arpels, Cartier est très certainement la signature la plus cotée dans le monde des ventes publiques. Les objets sont en général beaucoup moins chers que les bijoux car il y a beaucoup moins d’acheteurs potentiels. Les bijoux peuvent se porter alors que les objets se contemplent dans une vitrine ou posés sur un meuble (en même temps, c’est le cas de la plupart des œuvres d’art…). Cependant les objets exceptionnels atteignent quand même toujours des prix élevés, en particulier les objets Art Déco très raffinés et les pendules mystérieuses.




Olivier Bachet et Alain Cartier, Palais Royal 2019.
Deux volumes sous emboîtage, 976 pages. 990 euros. Edition limitée à 200 exemplaires numérotés. Existe également en version anglaise.
Palais royal
5 rue Drouot 75009 Paris.
Téléphone : 01 48 24 01 34
palais-royal@orange.fr
Suzanne Belperron, histoire d'une consécration. Entretien avec Olivier Baroin.
To read this article in English click here : The renaissance of Suzanne Belperron. An interview with Olivier Baroin.
« Suzanne Belperron est la créatrice de bijoux la plus talentueuse et la plus influente du XXe siècle » : c’est en ces termes que David Bennett, aujourd’hui Président mondial de la division joaillerie internationale chez Sotheby’s, ouvrait la vente-évènement du 14 mai 2012 à Genève qui présentait « la collection personnelle de l’un des plus grands joailliers du XXème siècle : Suzanne Belperron (1900‐1983) ».
Cette vente comportait soixante lots, qui tous ont été vendus - et pour la plupart à des prix exceptionnels, en moyenne trois fois plus que leur estimation.


Le 5 décembre dernier, lors de la vente Magnificent Jewels de Christie’s à New York, un bracelet « tube » en platine et or gris 18 carats orné de diamants taille ancienne s’est envolé pour 852 500 $, alors qu’il était estimé entre 200 000 et 300 000$. Ce bijou exceptionnel fut créé en 1935, ainsi qu'en témoigne un document contresigné de la main de la créatrice provenant des archives personnelles de Suzanne Belperron conservées par Olivier Baroin. La cote des créations de Suzanne Belperron la place aujourd’hui au rang des plus grands noms de la joaillerie - Cartier, Van Cleef & Arpels, Boucheron, Chaumet ... et les collectionneurs de ses œuvres font monter les enchères à des prix records.


Cette consécration est le fruit d’un long parcours.
Reconnue, admirée et très sollicitée de son vivant, Suzanne Belperron est brièvement tombée dans l’oubli après sa mort. Son nom a ressurgi quelques années plus tard lors de deux ventes majeures :
- celle de la collection de bijoux de la Duchesse de Windsor, chez Sotheby’s à Genève les 2 et 3 avril 1987, dans laquelle figuraient seize pièces Belperron.




- Puis, dans la très belle vente de Pierre Bergé & Associés du 17 mai 2004 à Genève qui présentait soixante-deux lots sous le titre « Créations de Suzanne Belperron ».


Mais c’est véritablement en décembre 2007, avec la découverte des archives personnelles de la créatrice par Olivier Baroin, puis avec la publication de son livre Suzanne Belperron co-écrit avec Sylvie Raulet et paru en août 2011, que le travail de la créatrice a retrouvé ses lettres de noblesse. Depuis quelques années, les maisons de vente aux enchères s’enorgueillissent de présenter des pièces Belperron ; car toutes soulignent le style unique, l’âme d’artiste, de cette grande dame de la joaillerie du XXème siècle.
Si la vie de Suzanne Belperron fut passionnante, sa postérité l’est tout autant. De la rocambolesque découverte de ses archives personnelles que l’on croyait brûlées, aux fortes tensions dans la réattribution de ses œuvres, des différends transatlantiques dans la succession de son héritage artistique, à sa cote qui enflamme les enchères, le nom de Suzanne Belperron n’est pas près d’être oublié une seconde fois.
Nous avons interviewé Olivier Baroin, expert de l’œuvre de Suzanne Belperron afin qu’il nous explique comment cette artiste célèbre en son temps puis oubliée est devenue une référence dans les salles de vente.
Genèse, vie et postérité d’un style singulier
Suzanne Belperron : jalons d’une vie
Madeleine Suzanne Vuillerme de son nom de jeune fille naquit le 26 septembre 1900 dans le Jura. A 18 ans elle reçut le 1er prix de l’Ecole des Beaux-Arts de Besançon et vint s’installer à Paris. En mars 1919, elle fut engagée comme modéliste-dessinatrice par Jeanne Boivin, veuve de René Boivin qui dirigeait la maison éponyme.
Cinq ans plus tard, elle devenait codirectrice de la maison Boivin. La même année, elle épousa Jean Belperron (1898-1970), un ingénieur originaire comme elle de Besançon, dont elle prit le patronyme. Le couple n’eut pas d’enfant.

En 1932, Suzanne quitta la Maison Boivin pour rejoindre Bernard Herz, grand négociant en perles fines et pierres précieuses, en tant que directrice artistique et technique de la Société Bernard Herz jusqu’en 1940.

Au début de la seconde guerre mondiale, peu avant les lois antisémites de Vichy, et à la demande de Bernard Herz, elle racheta sa société et créa la Société Suzanne Belperron SARL (1941-1945). En 1943, Bernard Herz fut déporté en Allemagne, d’où il ne revint pas.
Au sortir de la seconde guerre mondiale, en 1946, elle accueillit Jean, le fils de Bernard Herz, lui offrant – en mémoire de son père Bernard auquel elle vouait une profonde affection- la cogérance d’une société constituée à parts égales, alors baptisée « Jean Herz Suzanne Belperron ». Suzanne Belperron assuma la direction, tant artistique que financière, de ladite Société jusqu’à la liquidation de celle-ci le 31 décembre 1974.
Des années 1930 aux années 1970, Suzanne Belperron créa sans interruption et sans jamais vouloir s’associer avec une autre maison. Sa renommée de son vivant fut grande en France et à l’étranger. Elle fut élevée au rang de Chevalier de la Légion d’honneur en 1963 en sa qualité de « créatrice joaillière ».

Après son retrait, elle continua à exercer son art uniquement pour des proches. Elle s’est éteinte à Paris le 28 mars 1983. Elle avait quatre-vingt-deux ans.
Quelques considérations sur le style Belperron
Ses créations reflètent un style tout à fait personnel, « une signature », alors même que la créatrice ne signa jamais aucune de ses pièces. « Mon style, c’est ma signature », disait-elle dans une formule restée fameuse.

Les bijoux Belperron se caractérisent bien souvent par le choix audacieux pour son temps d’associer des pierres précieuses ou perles fines à des pierres fines ou ornementales. Ainsi, Suzanne Belperron n’hésitait pas à marier saphirs et calcédoine, diamants et cristal de roche, ou bien de l’argent avec des hématites ou avec une améthyste encadrée de chrysoprases.

Ces mélanges de couleurs et de matières (transparent, translucide, opaque) engendraient des jeux de lumière particulièrement originaux. Cependant, Suzanne Belperron créa aussi des pièces qu’on pourrait qualifier de « haute-joaillerie » puisqu’elles étaient uniquement composées de matériaux précieux.

Une autre caractéristique du travail de cette avant-gardiste, ce sont des volumes qui frôlent parfois la démesure. Toutefois, précise Olivier Baroin, « même si le bijou se veut parfois un peu exubérant, il n’en demeure pas moins élégant. La créativité de Madame Belperron n’outrepasse jamais la limite du bon goût ». Et il ajoute : « son œuvre se traduit par des bijoux graphiques et purs, mais surtout sensuels, pour ne pas dire charnels ».

Ce style suscita l’engouement au-delà du monde des connaisseurs en joaillerie. Ainsi, Suzanne Belperron fut une des premières créatrices de joaillerie à obtenir des parutions dans les magazines de mode, tels Harper’s Bazaar ou Vogue. Dès 1933, Elsa Schiaparelli posait dans Vogue parée de bijoux Belperron. Les bijoux de Suzanne Belperron magnifiaient les tenues de créateurs de mode - au point que ces derniers craignaient parfois de voir leurs créations reléguées au second plan !
Une créatrice pour "happy few"
Sa clientèle était très variée. Elle comprenait des membres des familles royales et de l’aristocratie européenne, de riches banquiers et industriels, mais aussi des acteurs, des artistes et des écrivains. Ses cahiers de commande personnels attestent qu’elle reçut le Duc et la Duchesse de Windsor, Colette, Jean Cocteau, Nina Ricci, Jeanne Lanvin, Elsa Schiaparelli, Gary Cooper, la bégum Aga Khan, la baronne de Rothschild, Daisy Fellowes, la cantatrice Ganna Walska ou Merle Oberon, la ravissante héroïne des Hauts de Hurlevent, pour n’en citer que quelques-uns !
Aujourd’hui encore, ses créations restent méconnues du grand public. Depuis une dizaine d’années, cependant, elles sont très recherchées des marchands d’art, des professionnels du monde joaillier et des collectionneurs avertis.
Philippine Dupré La Tour, directrice du département bijoux et horlogerie chez Aguttes, explique que les bijoux Belperron occupent une place particulière dans ses expertises car bien souvent les clients qui lui soumettent une pièce Belperron ne soupçonnent pas sa valeur. « C’est donc un double plaisir : celui de voir ces bijoux et celui de les révéler ».

Aujourd’hui les acquéreurs de pièce Belperron relèvent d’un nouvel élitisme. Olivier Baroin constate que ce sont des acheteurs qui sont influencés plus par le design du bijou que par sa valeur intrinsèque. « Les collectionneurs qui apprécient les pièces Belperron n’ont pas besoin que leur bijou soit serti de diamants, ceux qui reconnaissent son style savent son importance ».
Durant les ventes aux enchères, les acheteurs se trompent rarement ; les pièces qui se vendent le plus cher sont celles qui sont les plus emblématiques de l’esprit Belperron. Karl Lagerfeld, qui figure parmi les plus grands collectionneurs de bijoux Belperron, résume cela ainsi : « Un bijou Belperron, ça se reconnaît tout de suite. C’est un esprit. »

Olivier Baroin et la deuxième naissance de Suzanne Belperron
Comment est née cette « filiation » entre Madame Belperron et vous ?
Par un incroyable coup du destin !
Je suis joaillier depuis 1987 et expert en bijoux anciens depuis 2001. A cette époque j’avais déjà une grande admiration pour Suzanne Belperron dont je connaissais le travail grâce à mon amie Miriam Mellini, négociante en perles, passionnée de bijoux anciens et fervent amateur de Suzanne Belperron.
Un jour de décembre 2007, alors que j’étais en train d’ébaucher un projet devant un client, ce dernier me regarde et me dit : « c’est amusant de vous voir dessiner ainsi, mon père vient d’hériter d’une dessinatrice de bijoux ». J’osais demander le nom de cette dessinatrice. Le client me répondit, manifestement incertain : « peut-être Josiane Duperron ». Mon sang ne fit qu’un tour et, très calmement, je l’interrogeai : « Êtes-vous certain ? Ne serait-ce pas plutôt Suzanne Belperron ? ».
A l’époque, nous pensions que Suzanne Belperron avait brûlé ses archives de son vivant « Her life is veiled in mystery - she burned her papers before she died », ainsi que l’expliquait Ward Landrigan au New York Times en aôut 1998.
Mon client m’a proposé de passer visiter dès le lendemain, au pied de la butte Montmartre, le pied à terre qui n’avait presque pas été ouvert depuis vingt-quatre ans et dans lequel étaient entreposées toutes les affaires de Madame Belperron. Je m’y suis rendu très tôt le matin, avant que les brocanteurs ne viennent vider les lieux, puisqu’un commissaire-priseur avait certifié à l’héritier que tout cela ne valait rien !
Je n’avais pas idée moi-même de ce que cela valait, mais je soupçonnais que ce que ce petit appartement renfermait était inestimable. Et à juste titre… il y avait là toute la vie de cette femme entreposée pêle-mêle : ses décors d’appartement, dont un salon semble-t-il dessiné par son ami Marcel Coard, décorateur et ensemblier des années 30, ses services de table, ses nappes, beaucoup d’art asiatique … l’ensemble recouvert d’une épaisse couche de poussière !
Nous avons fait un inventaire des biens, puis nous avons trouvé un accord sur le rachat des affaires personnelles de Suzanne Belperron. L’héritier était un grand Monsieur, un homme de parole très droit et très loyal, féru d’art, lui-même venant d’une famille d’artistes-peintres. Une fois qu’il eût réalisé qui était Suzanne Belperron, et fort admiratif des pièces qu’il avait vues, il souhaita que Suzanne Belperron, qui était alors quelque peu oubliée, bénéficie d’une reconnaissance nouvelle. C’est cet homme, héritier du légataire testamentaire de Madame Belperron, qui m’a suggéré d’écrire un livre sur son œuvre. Autant dire que nous lui devons beaucoup.
Il s’est éteint quelques jours après la vente de l’écrin personnel de Suzanne Belperron qui eut lieu à Genève le 14 mai 2012, rassuré quant à la pérennité de l’œuvre de la créatrice. Auparavant, il avait lu avec une infinie attention mon livre co-écrit avec Sylvie Raulet, intitulé Suzanne Belperron, qui était paru en août 2011.
C’est une histoire très romanesque !
En effet, les chances étaient infimes que je tombe sur les affaires personnelles de Suzanne Belperron ! D’ailleurs, la fille de l’héritier souhaiterait un jour pouvoir réaliser un film retraçant sa vie, son parcours. Il y a tant à raconter : son histoire personnelle, son génie créatif, ses clientes célèbres, sa succession, la découverte des archives personnelles, la reconnaissance dont elle jouit aujourd’hui et bien plus encore…
Lorsque vous avez redécouvert les archives personnelles de Suzanne Belperron, en décembre 2007, cela faisait vingt-quatre ans que la créatrice avait cessé son activité. Que restait-il de son œuvre ?
Suzanne Belperron a officiellement cessé son activité en 1975, mais en réalité elle a continué à travailler pour ses meilleures clientes ou pour des amies quasiment jusqu’à son décès en mars 1983.
Une fois acquises ses archives personnelles, j’ai débuté par un important travail d’enquête : il m’a fallu remonter la trace des bijoux, parcourir les maisons de vente, et je me suis rendu compte que 90% des bijoux de Suzanne Belperron ne lui était pas attribués, quelle que soit la période à laquelle ils avaient été faits. La personne qui faisait autorité sur les expertises de la maison René Boivin ne faisait pratiquement aucune distinction entre Boivin et Belperron. Partant du postulat que Suzanne Belperron avait débuté sa carrière chez Boivin comme « jeune vendeuse » (sic) avant d’évoluer sous la houlette de Jeanne Boivin, les certificats n’établissaient pas de différence entre son travail chez Boivin, Maison dans laquelle elle avait œuvré de 1919 à 1932, et les quarante années suivantes de sa carrière.
Aujourd’hui il est avéré que Suzanne Vuillerme, après avoir obtenu le premier prix de l’Ecole municipale des Beaux-Arts de Besançon avec un décor en champlevé sur une montre, est entrée chez René Boivin en 1919 non pas comme « jeune vendeuse » mais en tant que « modéliste-dessinatrice » avant de devenir dès 1924 co-directrice de la Maison et d’épouser Jean Belperron.

Il est également reconnu que la Maison René Boivin, avant l’arrivée de Suzanne Belperron, était un fabricant, qui travaillait en tant que sous-traitant pour toutes les maisons de joaillerie. C’était un atelier familial, qui avait racheté d’autres ateliers parisiens à la fin du XIXème siècle, d’afin de se doter des meilleurs ouvriers et d’un équipement performant.

Par exemple ces trois photos de colliers de facture relativement classique (suite de sertissures endiamantées et perles fines) ont été fabriqués en 1912 par la maison René Boivin pour Boucheron. Je suis très reconnaissant à mon amie Claudine Sablier, conservateur des archives de la maison Boucheron de m’avoir transmis ces documents. S’il est vrai qu’en 1912, René Boivin s’installa au 27 rue des Pyramides, avec des salons de réception qui jouxtaient ses ateliers, il n’en demeure pas moins que la maison s’est véritablement pourvue d’une notoriété de créateur seulement après l’arrivée de Suzanne Belperron. En témoigne une lettre de Jeanne Boivin de novembre 1923 que Suzanne Belperron conservait précieusement où il est écrit que Suzanne « est maintenant une force active nécessaire et tient une grande place dans la vie artistique de la maison René Boivin ». Ainsi, je mets quiconque au défi de me présenter les œuvres modernistes de Monsieur Boivin créateur!


Comment s’est effectué votre travail de réhabilitation de l’œuvre de Suzanne Belperron ?
De nombreuses personnes au sein des Maisons de vente m’ont aidé dans mon travail d’enquête, et particulièrement la maison Aguttes. Philippine Dupré la Tour a accepté de contacter certains de ses clients « vendeurs » - si toutefois un bijou me semblait pouvoir être de la main de Suzanne Belperron - afin de leur demander s’ils accepteraient de nous donner les noms de leurs aïeux à l’origine d’achats chez René Boivin ou Suzanne Belperron.
Cela m’a permis de rechercher dans ses archives personnelles pour voir si je retrouvais la famille du vendeur. J’ai pu ainsi remonter le temps. Je me suis alors rendu compte que de nombreux bijoux vendus sous le nom de Boivin s’avéraient être des pièces commandées chez Suzanne Belperron par la famille du vendeur après 1932.
Je suis reconnaissant à Philippine Dupré La Tour de sa coopération comme de sa confiance – les maisons de vente sont généralement assez secrètes. David Bennett m’a également énormément aidé, il a tout de suite cru au projet du livre et Sotheby’s a mis à disposition ses studios photos partout dans le monde afin que les propriétaires de bijoux Belperron puissent venir les faire répertorier, estimer et photographier. J’en suis très reconnaissant à David Bennett comme à Claire de Truchis-Lauriston qui dirigeait alors le département joaillerie à Paris. Ils ont eu le courage, la force, de prendre ce risque, alors que d’autres auraient redouté de déstabiliser le marché. Sotheby’s a d’ailleurs été d’un grand soutien pour le livre.
Après la découverte des cahiers de commande personnels de la créatrice, vous pouviez authentifier formellement ses pièces. La cote de Belperron sur le marché des enchères en a-t-elle été réévaluée ?
Lors de la sortie de mon livre, le monde joaillier et les maisons de vente en particulier ont pris conscience que Suzanne Belperron et son légataire universel avaient préservé les archives, constituée d’une vingtaine de cahiers de commande personnels que Suzanne Belperron tenait pour elle-même depuis 1937, dans lesquels on compte 6730 clients et près de 45 000 rendez-vous !
En conséquence, il devenait possible d’attribuer les pièces en bonne et due forme si l’on avait le nom de famille des commanditaires. Les cahiers d’archives s’arrêtent en 1974, mais après, entre 1974 et 1983, diverses lettres témoignent du fait que Suzanne Belperron est restée active.
Je me suis attelé à un travail de transparence en remontant à l’origine des commandes, afin de réhabiliter l’œuvre de Suzanne Belperron et de lui réattribuer les pièces qu’elle avait créées pendant cinquante ans. Mes certificats ont fini par clarifier le marché des ventes aux enchères pour Belperron. Sa cote est croissante et les prix d’adjudication voisinent avec ceux des plus grandes maisons de joaillerie.

Comment authentifier un bijou Suzanne Belperron ?
Suzanne Belperron n’a jamais signé aucune de ses créations, que ce soit chez René Boivin ou chez Herz lorsqu’elle était seule décideuse et créatrice à part entière.
En un premier temps j'étais particulièrement vigilant ! En effet, sans preuve factuelle, formelle et sans trace de commande écrite, dans le doute je m’abstenais. Au fil du temps, sachant que je possède beaucoup d’éléments : des maquettes d’atelier, des plâtres, des dessins et des esquisses, des photos et articles de presse contresignés de sa main et bien entendu les cahiers de commande personnels, j’ai réussi à faire des recoupements. Mon œil était formé par les vingt années que j’avais passées en atelier. En tant que joaillier, je suis familier de la fabrication des bijoux ; je sais comment un bijou est bâté, monté, ajusté etc…
Mais ce sont surtout les années, l’expérience d’authentification des pièces – j’en ai répertorié, répertorié et encore répertorié! – qui m’ont permis d’affiner mon expertise.

Au tout début, la qualité de fabrication de certaines pièces se rapprochait presque plus du bijou fantaisie, avec un travail fait sur de l’argent, que de la haute-joaillerie, même si je dois préciser qu’à l’époque les bijoux fantaisie étaient très bien faits.

Après-guerre, entre 1942 et 1955, on remonte en qualité de production avec un apogée dans les années 50. Tous les bijoux sont alors réalisés à la main à partir de bâtes, de plaques et de fils.

Ensuite, entre 1955 et 1970 les techniques de fabrication évoluent, la qualité de production n’est plus la même mais ce n’est pas forcément lié à un moins bon travail des ouvriers-joailliers. La fonte à cire perdue envahit le marché et la production s’accélère. On entre dans une nouvelle ère d’industrialisation du bijou. Les bijoux Belperron sont encore réalisés partiellement à la main, mais aussi en fonte.
Les années 70-80 sont plus faciles en terme de réalisation, mais quelques modèles non réalisables en fonte à cire perdue restent entièrement faits main.
Dès 1932, l’atelier Groëné et Darde a été le fabricant exclusif de Suzanne Belperron et il l’est resté jusqu’au bout. Les différents poinçons permettent de dater approximativement les créations de Suzanne Belperron et du moins, de les authentifier.
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- De 1928 à 1955, la société porte le nom de Groëné et Darde (Emile Darde et Maurice Groëné). Le poinçon présente les initiales GD surmontées de Ste dans lesquelles s’intercale une fleur de lys.
- De 1955 à 1970, elle prend le nom de société́ Darde et Fils (Emile Darde et son fils Michel). Le poinçon montre les initiales DF avec au centre une fleur de lys.
- De 1970 à 1974, elle devient la société Darde et Compagnie (Michel Darde) et a pour poinçon l’initiale D suivie d’une fleur de lys, surmontée de Ste, elle-même suivie des initiales CIE.

Dans les cas où l’on ne dispose pas dans les archives de trace d’une commande, seule l’extraordinaire habileté du lapidaire Adrien Louart (1890-1989) à qui Suzanne Belperron faisait sculpter ses gemmes permet d’authentifier les créations Belperron, même si les bijoux ne sont pas signés du fait de leur matière elle-même.

Qu’en est-il des certificats ?
Lorsqu’en septembre 2008 j’ai acquis l’ensemble des archives découvertes l’année précédente à Montmartre, le dernier légataire universel m’a mandaté pour pérenniser « l’avenir de l’expertise de toute l’œuvre réalisée par Madame Suzanne Belperron ».
C’est ainsi que j’ai commencé à authentifier les bijoux pour Sotheby’s, Aguttes, Artcurial, et tant d’autres maisons de vente…
Aujourd’hui, j’établis les certificats (ou de simples attestations lorsque j’ai l’intime conviction qu’un bijou a été créé par Suzanne Belperron, mais que je n’en ai pas la preuve formelle dans les archives !) pour la majorité des collectionneurs et des maisons de vente, y compris des maisons de vente américaines dont Fortuna dernièrement. Certains me considèrent parfois comme le gardien du temple, je dirais plutôt le gardien de la mémoire de Madame Belperron d’autant que je ne me consacre désormais pratiquement plus qu’à son œuvre.

Portfolio : les plus belles pièces Belperron passées en vente ces dernières années
Suzanne Belperron occupe une place à part sur le marché de la joaillerie. Dans l’ensemble, les bijoux Belperron atteignent des sommets dans les ventes aux enchères, mais en réalité, il n’y a pas de standard de marché applicable à Belperron.Les acheteurs se déterminent pièce par pièce, selon l’intérêt du bijou. C’est-à-dire qu’ils jugent et achètent chaque pièce en fonction de sa valeur esthétique et de sa place dans la création de Suzanne Belperron. Ces critères sont proches de ceux qu’on applique aux peintres ou aux plasticiens.

Voici une sélection supplémentaire de quelques bijoux remarquables qui sont passés en vente ces dernières années et qu'Olivier Baroin a expertisés.
AGUTTES




ARTCURIAL

Poinçon de Groené & Darde. Exécuté entre 1942 et 1955. Estimation 15 000 - 20 000 €. Prix d'adjudication : 96 100 €






CHRISTIE'S




DROUOT
Le mercredi 17 décembre 2014 Drouot présentait cette somptueuse parure collier et bracelet dont le prix d'adjudication a marqué un record. Estimée entre 10 000 et 20 000 euros cette parure s'était alors envolée pour 415 000 euros. Un travail caractéristique du style Belperron dans ces volumes et dans ces nuances délicates de bleu velouté qu'affectionnait la créatrice.


FORTUNA
Le 25 avril 2018 avait lieu à New-York chez Fortuna la vente d'une exceptionnelle collection de bijoux Belperron provenant de la succession de Bokara "Bo" Legendre.





SOTHEBY'S
Magnificent jewels & Noble jewels, 15 novembre 2018, Genève

Magnificent jewels & Noble jewels, 15 mai 2018, Genève


Magnificent jewels & Noble jewels, 15 novembre 2017, Genève

Magnificent jewels & Noble jewels, 16 mai 2017, Genève

Magnificent jewels & Noble jewels, 17 novembre 2016, Genève

Magnificent jewels & Noble jewels, 11 novembre 2015, Genève



Magnificent jewels & Noble jewels, 12 mai 2015, Genève

TAJAN
L'expert Jean-Norbert Salit présentait lors de la vente du 29 juin 2015 un rare ensemble de quatre pièces en or gris, diamants et rubis certifiés d’origine birmane, sans trace de traitement thermique. Travail français vers 1936 avec poinçon de maître de Groëne et Darde.





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La Golconde
Galerie d'Olivier Baroin
9, Place de la Madeleine. 75008 Paris.
Tél. 01 40 07 15 69
Suzanne Belperron, Sylvie Raulet et Olivier Baroin, La Bibliothèque des Arts , 2011.
Les bijoux de Suzanne Belperron, Patricia Corbett, Ward and Nico Landrigan, Karl Lagerfeld, Thames & Hudson, 2015.
Jewels from the personnal collection of Suzanne Belperron, Geneva 14 may 2012, catalogue Sotheby’s
Vente bijoux, créations Suzanne Belperron, catalogue Pierre Bergé et Associés, mai 2004
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Tous mes remerciements aux maisons Aguttes, Artcurial, Christie's, Drouot, Eve, Fortuna, PB&A, Sotheby's et Tajan.
Des remerciements tout particuliers à Olivier Baroin, qui allie comme peu d'autres la précision de l'expert et la passion du pédagogue.

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Trésors royaux de la collection Al Thani à Fontainebleau : entretiens avec Jean-François Hebert et Vincent Droguet
Les Rois du Monde à la cour de France
Venir au Château de Fontainebleau, gravir l'escalier en Fer-à-Cheval, pénétrer dans la salle de Bal, se fondre dans le décor Renaissance, s'imprégner de l'élégante scénographie de François-Joseph Graf... découvrir une soixantaine d'oeuvres d'art qui chacune reflètent l'imagerie du roi ou de la fonction royale à travers les civilisations, et ce depuis la plus Haute-Antiquité : voilà ce que nous propose le château de Fontainebleau en cette fin d'été.
Quelle émotion!
L'exposition "Rois du monde " présente une collection privée, celle de SA le Cheikh Al Thani, rassemblée avec goût, originalité, sans frontière de temps ni d'espace, et avec des moyens inimaginables. Certaines oeuvres paraissent familières, peut-être aperçues dans des musées nationaux ou des collections publiques européennes. La plupart sont étonnantes, surprenantes, dépaysantes, un véritable trésor de l'humanité présenté sous forme de cabinet de curiosité et qui aurait certainement passionné les rois qui ont vécu à Fontainebleau.
Tous ces chefs-d'oeuvre ne sont pas des pièces joaillières, mais tous sont précieux. Ce feu d’artifice royal s’achève avec une "vitrine" des joyaux.
Jean-François Hebert, Président du château de Fontainebleau, nous a accordé un entretien pour évoquer cette exposition éphémère mais aussi ce qui fait l’âme de Fontainebleau.
Vincent Droguet, commissaire de l'exposition, a accepté de nous présenter la philosophie qui a guidé son travail pour "Rois du monde".
L'audacieux pari de Gem Genève : interview de Ronny et Nadège Totah
Ronny Totah et Thomas Faerber comptent parmi les sommités du microcosme international des négociants en pierres précieuses et bijoux anciens. Ils sont les co-fondateurs et les co-organisateurs du salon Gem Genève dont la première édition s’est déroulée du 10 au 13 Mai 2018 à Genève.
Secondés tous deux par leurs filles, Nadège Totah et Ida Faerber, ils ont créé un Salon international de gemmes et de bijoux - anciens et plus contemporains - d’un esprit nouveau. Leur intention était de concilier l'excellence avec l’attention et le respect d’autrui, les gemmes et les bijoux avec un devoir de transparence et d’éthique, mais aussi de valoriser les exposants les uns par rapport aux autres.
Annoncé à grand renfort de médias, soutenu par Christie’s et Sotheby’s qui présentaient de façon concomitante les « viewing » de leurs « Magnificent Jewels », Gem Genève a-t-il été à la hauteur des espérances de ses organisateurs, de ses exposants, des visiteurs?
A l’heure où la première édition de ce Salon s’achève, c'est le moment des premières conclusions.
Rencontre avec Ronny Totah et son bras droit, sa fille Nadège Totah

Quelles sont vos premières impressions à l'issue de Gem Genève ?
Ronny Totah : Je m’étais intimement dit à moi-même que je jugerais de la réussite du Salon le soir de sa fermeture, dimanche 13 mai, en sondant le degré de contentement des exposants. Dans les faits, les exposants sont venus me remercier une demi-heure après l’ouverture du Salon. Des marchands heureux, c’est une première ! Les visiteurs ont eux aussi l’air contents. Je pense qu’avec Thomas et Ida (Faerber), nous avons réussi à donner une âme à Gem Genève. Pour moi, c’est cela la réussite.
Nadège Totah : J’ajouterais que la qualité des exposants qui nous ont suivis dans ce projet est également le signe de ce succès.
Ce Salon s’inscrit-il d’emblée dans la lignée des grandes foires internationales ou bien est-il différent ?
Nadège Totah : Cela fait dix ans que je voyage dans tous les salons et foires internationales de gemmes et de joaillerie : Miami, Las Vegas, Hong Kong, Singapour et Bâle jusqu’à l’année passée. Je crois qu’avec Gem Genève nous avons réussi quelque chose d’inédit. Les gens s’y sentent bien, ils sont détendus. Les exposants ne sont pas confrontés aux mille et un problèmes matériels habituels. Nous-mêmes, en tant que marchands, nous avons bien souvent ressenti une profonde insatisfaction lors des salons auxquels nous participions. Un sentiment de solitude, d’incompréhension. L’impression d’être dans des Salons de professionnels mais qui n’étaient pas conçus pour nous, ni adaptés à nos besoins. C’est la raison pour laquelle, après quarante années de vie professionnelle dans l’univers de la joaillerie et des gemmes et forts de ce constat empirique, mon père et Thomas Faerber ont décidé de créer leur propre Salon.

Ronny Totah : Marchands depuis plusieurs décennies, Thomas et moi connaissions précisément les besoins des négociants, diamantaires, experts, bijoutiers qui participent tout au long de l’année à ces épuisantes manifestations internationales. Alors, nous nous sommes improvisés organisateurs !
Et je crois que nous avons trouvé ce juste équilibre que nous recherchions comme marchands. Cette harmonie repose sur de nombreux détails aussi bien techniques (lumières, caméra de sécurité, prises multiples, aéroport, gare et hôtellerie à proximité) que sur des attentions (bouteilles d’eau déposées tous les matins sur les stands, petits déjeuners offerts aux exposants…). Les exposants ont été placés de façon à ce que le visiteur se promène le plus possible dans le salon. Gem Genève est organisé en quinconce, en labyrinthe et l’année prochaine il est prévu que tous les exposants changent de place. Ce n’est pas le premier arrivé qui a le meilleur emplacement, l’idée n’est pas celle-là.
Nadège Totah : Notre gestion des stands s'est davantage inspirée du plan de table d'un mariage que d'un business individualiste !
Ainsi, les différents métiers du secteur joaillier n’étaient pas regroupés, ni les experts les plus célèbres mis ensemble. Nous avons tenté de répartir le plus possible les différents et nombreux acteurs de ce Salon : négociants en pierres précieuses, diamants ou perles, experts en joaillerie ancienne, bijoutiers, fabricants.
A rebours des autres manifestations, nous avons offert le cœur du Salon à la nouvelle génération. HEAD, la Haute Ecole d’art et de design de Genève, une dizaine de designers internationaux et quatre nouveaux talents occupaient l’espace central de Gem Genève.
Ronny Totah : Sans oublier les cinq Laboratoires de gemmologie (GIA, Gübelin, SSEF, AGL, GGTL), les conférences, et l’incontournable librairie d’art de Bernard Letu. Ce genevois de renom avait pour l’occasion rassemblé une sélection extrêmement pointue de livres de joaillerie et de gemmologie.
Un mot sur la stratégie de Gem Genève de se tenir à cheval sur les Magnificent Jewels ?
Ronny et Nadège Totah : Dès les premiers préparatifs du Salon à l’automne dernier, nous nous sommes concertés avec Christie’s et Sotheby’s. Je dirais que c’est un rapport « gagnant-gagnant ». De nombreux marchands qui ne se déplaçaient plus tellement à Genève reviennent; et les clients des ventes eux viennent visiter le salon.
En effet, l’on retrouvait bien souvent de grands joailliers internationaux (dont la star des joailliers venue du pays de Golconde), aussi bien chez les marchands de pierres de Gem Genève, que dans les salons du Four Season’s ou du Mandarin Oriental où exposaient Christie’s et Sotheby’s… Gem Genève connaîtra donc un second volet ?
Nadège Totah : Les dates sont déjà fixées, du 9 au 12 Mai 2019. Pour cette première édition, nous espérions 80 exposants et nous sommes 147!
Nous ne sommes allés chercher personne. C’est uniquement grâce au respect inspiré par mon père et Thomas Faerber, à la confiance et aux amitiés de longue date qu’ils ont nouées dans le milieu que les exposants ont suivi. On connaissait 90 % d’entre eux…
Pour l’année prochaine nous avons déjà une liste d’attente. On ne veut cependant pas trop agrandir Gem Genève, même si matériellement on le pourrait car il reste de l’espace libre. Nous tenons à conserver cette idée de salon à échelle humaine, cet équilibre qui contribue à la réussite de cet événement.
... rendez-vous donc l'année prochaine : et gageons que le Salon lancé par les Totah et les Faerber fera école, tant il correspond aux aspirations du monde de la joaillerie qui a massivement souscrit à cette formule audacieuse
HOROVITZ & TOTAH SA
Place de la Fusterie 9-11
1204 Genève
THOMAS FAERBER SA
29, rue du Rhône
1204 Genève
GEM GENEVE
Route François-Peyrot 30,
1218 Le Grand-Saconnex
Ronny Totah : quelques trésors historiques de ma collection
Ronny Totah, co-fondateur de GemGenève, nous a confié ses coups de coeur joailliers et artistiques.
Des gemmes
J’ai deux passions dévorantes connues de tous : les saphirs du Cachemire (non traités) à la couleur incomparable (bleu-bleuet). Et les perles fines.

Dans les deux cas, ces passions s'enracinent dans le passé… Découverts en 1881, les gisements de Zaskar (à deux cents kilomètres au sud-est de Srinagar) produisant les fameux saphirs du Cachemire sont fermés depuis la fin des années soixante-dix.
Quant aux perles fines, elles sont devenues rarissimes. Le coût et les difficultés inhérentes à la pêche aux perles fines, ainsi que la pollution des mers rendent ces gemmes organiques très difficiles à trouver de nos jours. Les perles que je présente, en rang ou individuelles, sont pour la plupart des perles anciennes. Voire historiques.
Un bijou de provenance impériale

Cette broche caractéristique de la moitié du XIXème siècle est composée de trois perles fines semi-baroques en forme de goutte d’un poids respectif de 39, 40 et 60 grains, de plusieurs rubis dont un birman de 1,8 ct, et de diamants (Rapport d’identification SSEF). C’est un bijou de provenance historique qui aurait appartenu à l’Impératrice Eugénie (1826-1920).
Lors de la chute du Second Empire, suite à la défaite de Sedan en septembre 1870, l'impératrice a pu s'échapper des Tuileries et s’est réfugiée en Angleterre où de proches amis lui ont fait parvenir clandestinement ses bijoux personnels. Afin d’améliorer les conditions matérielles de l’exil familial, Eugénie décide de mettre en vente certains bijoux de sa cassette personnelle dès janvier 1872. Elle remet alors les bijoux dont elle est prête à se séparer à M. Harry Emanuel (1831-1898), un joaillier renommé de Londres.
Il avait été honoré du titre d’« orfèvre de la Reine et du Prince de Galles » et était l’auteur d’un ouvrage de référence intitulé Diamonds and Precious Stones, 1865.

Un article du New York Times en date du 21 janvier 1872 fournit quelques informations (page 6) sur cette première vente : “The jewels of the Empress Eugenie are for sale. Mr. Harry Emanuel has many of them at his establishment in New Bond-street, and is now offering them to his customers”. Vous pouvez consultez intégralement cet article instructif en cliquant ici.
La broche exposée ici dans l‘intimité d’une vitrine interne (stand Horovitz & Totah) proviendrait de cette première vente des bijoux personnels d’Eugénie par Harry Emanuel. L’écrin est d’ailleurs signé du joaillier londonien. Cette broche est caractéristique du goût personnel d’Eugénie pour les bijoux délicats, romantiques, avec ses perles et diamants qui ruissellent en gouttes. Les bijoux privés de l’Impératrice diffèrent de ceux qu’elle portait lors de représentations officielles. L’Impératrice devait alors apparaître parée des attributs du pouvoir impérial : les Diamants de la couronne de France, dont la facture était bien plus imposante que celle de ses bijoux personnels.
Six mois après la vente d’Harry Emanuel, l’Impératrice déchue se défait d’autres bijoux de sa cassette personnelle. La nouvelle vente est orchestrée par Christie, Manson & Wood le 24 juin 1872 à Londres. Elle est présentée en ces termes : “A portion of the magnificent jewels, the property of a distinguished personage” et comprend cent-vingt-trois lots.
La vente la plus spectaculaire des joyaux d’Eugénie reste bien entendu celle de mai 1887, lorsque la IIIème République mit en vente publique les Diamant de la Couronne de France. Les plus belles parures d’Eugénie, chefs-d’œuvres de la joaillerie française du XIXème, furent alors dépecées pour la plupart et irrémédiablement dispersées.
La broche d’Eugénie fut ensuite portée par Madame Ernest Raphael. Cette dernière est représentée en 1905 sur un magnifique portrait de John Singer Sargent (1856-1925).

Maître de l’art du portrait à cette époque, John Singer Sargent donne une valeur de document à ce tableau par la précision du décor et des accessoires qu’il dépeint. Notamment la broche. Madame Ernest Raphael, Flora Cecilia Sassoon de son nom de jeune fille, aurait reçu ce bijou de son père, David Reuben Sassoon, qui était un ami du roi Edouard VII. La broche est restée dans la famille jusqu’en 1983.
Ce tableau fut présenté chez Sotheby's le 22 mai 2002 lors de la vente "American paintings". Vous pouvez zoomer sur le bijou -entre autres- en cliquant sur ce lien. Ce portrait figure également dans le catalogue raisonné Sargent Abroad, Figures and Landscapes écrit par Warren Adelson, Donna Janis, Elaine Kilmurray, Richard Ormond, Elizabeth Oustinoff.
Un tableau
J’ai récemment acquis ce portrait de Miss Peggy Hopkins Joyce peint par Raymond Perry Rodgers Neilson (1881-1964). Ce tableau appartenait à mon ami Fred Leighton, le célèbre joaillier new-yorkais décédé en juillet dernier. Il figurait dans la vente de Sotheby's intitulée "The Jeweler’s Eye: The Personal Collection of Fred Leighton".
Peggy Hopkins Joyce (1893-1957) était une starlette des Années folles. Elle dansait au Ziegfeld Follies, et sa vie personnelle défraya la chronique plus d’une fois. Elle connut six mariages et autant de divorces. Peggy collectionnait les amants, les fourrures et les diamants. Avant Marilyn Monroe, elle aurait pu chanter « Diamonds are a girl's best friends » !
Sur le portrait, de R. Perry Rodgers Neilson elle porte un diamant de 127,01 carats appelé le « Portuguese diamond ». Le nom de ce diamant provient du fait qu’il aurait été extrait au Brésil. Par la suite, il aurait appartenu à la Couronne du Portugal. En réalité, ce diamant provient fort probablement de la mine Premier à Kimberley en Afrique du Sud et aurait été trouvé au début du XXème siècle.
C’est d’ailleurs auprès de la société Joyce Black, Starr & Frost que Peggy Hopkins acquis en février 1928 le « Portuguese diamond ». Elle porte cet incroyable diamant monté sur un tour de cou en platine et serti de diamants. On remarque également ses bracelets et la monture de son solitaire tout aussi caractéristiques des bijoux Art Déco de cette époque.
En 1951, Harry Winston racheta le « Portuguese diamond » de Peggy Hopkins Joyce. Et, en 1963, l’échangea au Smithsonian contre… 3 800 carats de petits diamants ! Ce diamant se trouve toujours exposé dans la galerie Gem du Musée national d'histoire naturelle de Washington.
Crédit photo du visuel de "une" : David Fraga
Patrick Dubuc : l'art lapidaire retrouvé
La beauté exceptionnelle des bijoux et des pierres légués par l’Histoire repose largement sur un art de la taille dont bien des secrets se sont aujourd’hui perdus. C’est ce qui rend l’art de Patrick Dubuc aussi rare : par passion, se formant lui-même, utilisant ses connaissances mathématiques et un œil affûté, il a su retrouver les arcanes de l’art lapidaire employé pour tailler quelques pièces emblématiques. Il a ainsi pu démontrer sa virtuosité avec les répliques des « Vingt plus beaux diamants du Roi-Soleil » présentées récemment à l’Ecole des Arts Joailliers et bientôt au Museum National d’Histoire Naturelle. Rencontre avec ce lapidaire au parcours inattendu.
Comment êtes-vous devenu maître-lapidaire ?
J’ai commencé en 2010 seulement, c’est donc très récent pour moi. J’ai commencé grâce à un voyage en famille aux Etats-Unis, dans le Montana. Nous avions cherché des petits saphirs sur un site géologique autorisé. Parmi les saphirs que nous avions trouvés, un était plus gros que les autres. J’ai pensé que cela serait plaisant de le tailler et c’est ainsi que l’aventure a commencé ! J’ai acheté une machine avant même d’avoir commencé à prendre des cours. J’ai cherché quelqu’un susceptible de m’enseigner à Québec et, comme je n’ai trouvé personne, j’ai appris à l’aide de tutoriels sur internet et par moi-même.
Un investissement de départ important pour une passion naissante !
J’ai été chanceux, j’ai trouvé une machine pas trop dispendieuse, mais il fallait que je la répare. Cela m’a obligé à comprendre comment elle fonctionnait, et à faire tous les ajustements possibles pour l’améliorer, la calibrer. Ces réparations m’ont permis de me familiariser pleinement avec les techniques de taille des pierres.
Quel métier faisiez-vous à ce moment ?
Le même qu’aujourd’hui : depuis une vingtaine d’année je suis enseignant en physique au niveau collégial – ce qui est équivalent à la terminale ou au début d’université en France (mes élèves ont 17-18 ans). Aujourd’hui la taille des gemmes prend de plus en plus de place dans ma vie ; je passe plusieurs heures par semaine à l’atelier, je m’installe avec ma petite musique !
Les mathématiques sont consubstantielles à mon métier de lapidaire. On peut faire de la taille de façon classique, sans avoir besoin alors des calculs mathématiques : on suit une recette, des séquences et on peut faire de très belles pierres.
Mais pour faire des répliques de gemmes historiques, c’est-à-dire de tailles qui ne sont pas symétriques alors là j’ai besoin nécessairement de l’univers des calculs mathématiques. Je n’ai pas le choix !

Des prix sont venus très rapidement récompenser votre travail...
Je me suis inscrit au concours annuel international de « The United States Faceters Guild (USFG) » dès 2013 afin que mon travail soit évalué par des professionnels. La précision est le mot-clef de ce concours. La réussite à ce concours repose sur la précision au niveau de la taille, du polissage et des dimensions de la gemme. Un modèle unique est imposé à tous les participants d’une même classe. On taille la pierre dans notre atelier, à notre rythme, puis on l’envoie par la poste. Le concours est basé sur la confiance, comme le veut la tradition diamantaire. Et dans l’ensemble, ce sont principalement des amateurs éclairés, des passionnés qui y participent.
J’ai été classé second au pré-master de l’USFG en 2013. En 2014 je ne voulais pas de la deuxième place, alors j’ai travaillé fort et suis arrivé 1er au Master, et en 2015 nous étions 1er ex-aequo au Grand Master.
Gagnant de la 2e place PRE-MASTER USFG 2013
--> Ash-er Rond symétrie de 8 en step cut
Gagnant de la 1e place MASTER USFG 2014
--> Heart of nine
Gagnant de la 1e place GRAND MASTER USFG 2015
--> Tumbuka Fulu, sky blue topaz
J’avais fait une petite erreur et ça a baissé ma note à 99, 6352 %. Il y a des années où des tailleurs arrivent à 100% ; participer à ce concours relève d’une quête de la perfection en somme.
Racontez-nous votre rencontre avec le Professeur François Farges.
Je me suis intéressé rapidement au Diamant Bleu de la Couronne de France, chef d’œuvre lapidaire par excellence.
En cherchant des informations et des modèles, je suis tombé sur les travaux de François Farges.
J’ai osé lui écrire. J’avais alors déjà fait des recherches de symétrie et de modèles qui l’ont intéressé et il m’a répondu. Depuis, nous sommes restés en contact.
François Farges m’a envoyé le scan informatique du moulage en plomb du Diamant Bleu, celui-là même qu’il avait retrouvé dans les réserves du MNHN en 2007. Après avoir travaillé sur la modélisation du Diamant Bleu, je me suis intéressé au Tavernier bleu (c'est-à-dire le Diamant Bleu de 115,4 carats tel que Jean-Baptiste Tavernier l’avait rapporté à Louis XIV en 1668. Ce diamant avait alors une taille lasque d’époque Moghole. Par la suite, en 1672 et 1673 il fut retaillé sous la supervision du joaillier ordinaire du roi Jean Pittan en une pierre de 69 carats qu’on appelle aujourd’hui le Diamant Bleu du Roi-Soleil). Pendant plus d’un an je me suis attelé à faire un modèle en trois dimensions de cette pierre.

Le modèle existant alors du Tavernier bleu n’était pas satisfaisant, ni en poids ni en dimension. En informatique, on peut insérer une pierre dans une autre, j’ai donc mis le Diamant Bleu dans le Tavernier bleu et cela ne fonctionnait pas. Jusqu’à ce que je trouve un modèle fidèle au dessin d’Abraham Bosse et qui puisse être logique en termes de masse, de poids et de dimension.
Après le Tavernier bleu, François Farges a voulu que nous passions aux dix-sept autres plus beaux diamants de Louis XIV rapportés d’Inde par Jean-Baptiste Tavernier : l'idée était là, le projet était lancé !

De façon informatique, j’ai commencé à faire chacun des modèles de la planche. Certains étaient relativement faciles et rapides à réaliser. Ils étaient aussi un peu moins intéressants, ainsi des pierres taillées du bas de la planche. D’autres étaient bien plus complexes, la troisième pierre (en haut à droite de la planche) était un véritable défi

J’échangeais par courriel avec le Professeur qui me faisait des retours quant à la plausibilité de la taille de ces diamants anciens moghols. Il faut noter que je n’ai pas accès à des diamants anciens ici !
Puis la grande nouvelle a été au printemps 2015 d’avoir trouvé un mécène : l’Ecole des Arts Joailliers qui permettait la création matérielle de ces reconstitutions.
Entre juin 2015 et Décembre 2016, nous avons fait deux séries de ces Vingt plus beaux diamants de Louis XIV : une pour le MNHN, l’autre pour l’Ecole des Arts Joailliers. J’ai ainsi reconstitué les dix-sept diamants taillés et le professeur Farges a reconstitué les trois diamants du bas de la planche, c’est-à-dire les diamants bruts.


Quel a été le principal défi dans la reconstitution de ces diamants historiques ?

Il y avait un important défi technique puisqu’il fallait faire des pierres asymétriques. J’ai développé une méthode mathématique pour arriver à faire les non-arrondis, ces ajustements manuels que je dois faire pour arriver à suivre les lignes courbes des gemmes. Je me suis fabriqué des petites réglettes en plastique qui me permettent de pouvoir mesurer les longueurs des arêtes. J’ai ainsi une précision et une construction logique de la pierre.
Ma machine avec pièce à main ressemble à celles utilisées pour tailler le diamant.
La grande difficulté dans mon travail de reconstitution de gemmes historiques, c’est d’arriver à reproduire quelque chose qui existe déjà. Si j’avais à construire une pierre nouvelle, j’aurais besoin de calculer, mais je ferai beaucoup d’ajustements à l’œil. J’aurais un modèle préétabli informatiquement ou en dessin, puis je dessinerais des lignes sur la pierre.
Pour ce qui est du Diamant Bleu, si j’avais été lapidaire à l’époque, je me serais sûrement fait des plans du Tavernier bleu (le cristal naturel du diamant sous sa taille moghole, principalement poli). J’aurais fait des essais avant de tailler ce diamant. J’aurais fait un moulage de la pierre, puis lors des premiers essais, j’aurais pris des notes sur les angles. J’aurais fait une première taille sur du plomb ou sur quartz. C’est une supposition d’artiste, de lapidaire qu’aucune donnée scientifique ne prouve aujourd’hui.
Mais cela me paraît logique, même à travers les siècles, de faire un moulage, de tailler ce moulage, avant de travailler le vrai diamant.
L’avantage après avoir relevé un tel défi, c’est que maintenant je peux dessiner ce que je veux ! Il n’y a plus de limitation dans les contours, dans les formes, dans les jeux de facettes d’une gemme à tailler.
Quels sont les qualités requises pour être lapidaire ?

Il faut une bonne dose de passion ! Quand je fais une pierre cela demande énormément de rigueur et de patience pour suivre étape par étape chacune des facettes.
Par où commencez-vous la taille ?
Pour les reproductions des diamants du Roi-Soleil, c’était différent pour chaque pierre. J’ai dû trouver une nouvelle stratégie à chacune d’elles.
Dans l’ensemble, je commence par le feuilletis et je monte vers la table ou la couronne.
La Smithsonian Institution était-elle aussi de cette aventure scientifique?
La trilogie (NB : Trois noms pour un même diamant : le Tavernier bleu tel qu’il fut rapporté par J-B Tavernier, le Diamant Bleu de Louis XIV et le Hope d’un poids de 45,52 carats tel qu’on peut le voir aujourd’hui à la Smithsonian après sa troisième retaille) était un projet de la Smithsonian Institution et nous avons entendu parler du processus de coloration développé par John Hatleberg, un lapidaire de New York. L’objectif de M. Hatleberg et de M. Jeffrey Post était de faire une trilogie ayant la couleur la plus fidèle possible aux pierres de l’époque. Pour ce faire, John Hatleberg a comparé les répliques taillées et colorées avec le diamant Hope à Washington, avec la permission de Jeffrey Post.

Plusieurs essais et erreurs furent nécessaires avant d’obtenir la bonne recette de coloration. Ayant un souci de rigueur et de perfection, nous avons collaboré pour produire de superbes Tavernier Bleu joliment colorés.
Ne pouviez-vous pas tailler directement une pierre colorée ?
Dans le travail de reconstitution des diamants du Roi-Soleil, j’ai remodelé chaque pierre sur un bloc incolore d’oxyde de zirconium (ou zircone cubique CZ). On ne trouve pas de bonne tonalité de « bleu » en oxyde de zirconium, c’est John Hatleberg qui s’est chargé de réaliser une coloration de surface sur la pierre taillée. C’est le meilleur procédé trouvé à ce jour. Il requiert une très grande minutie : une demi seconde de trop et la couche atomique s’épaissit changeant la coloration de la pierre !
D’autres projets dont vous pourriez nous dire un mot ?
Je me lance sur le plus grand diamant vert naturel jamais trouvé à ce jour : le Vert de Dresde, d'un poids de 40,70 carats, pour un client au Qatar. Il s’agit d’un très grand collectionneur de pierres historiques, qui m’a commandé cette année de nombreuses pierres. La problématique provient cette fois-ci de la couleur. Je vais devoir faire concession d’un vert-jaune plus que vert-diamant !

Je travaille aussi pour ce même client sur la réplique du Stuart, un magnifique saphir cabochon facetté de 104 carats qui appartient au Diamants de la Couronne d’Angleterre et se trouve sur le bandeau arrière de la couronne impériale d’apparat de la Reine Elizabeth II.
Il y a encore beaucoup à faire, les tailles anciennes sont magnifiques, elles m’inspirent beaucoup.


Les lapidaires de l’époque avaient un souci d’esthétisme, un souci de beauté. En effectuant la taille de ces pierres anciennes, je tente de m’imprégner de cet esprit où les rondeurs et les courbes donnent un charme inégalé aux pierres. J’espère tailler dans l’avenir de jolis saphirs, rubis, grenats, etc. en lien avec ce que je viens d’expliquer.
Que vous souhaiter en ce début d’année ?
J’ai définitivement trouvé ma voie. Avec les gemmes, j’ai un contrôle total sur ce que je fais, une très grande liberté, et c’est une joie intense.
Tant qu’à faire quelque chose, pourquoi ne pas le faire le mieux possible au lieu de le faire rapidement ?
Ma philosophie est de prendre le temps afin de pouvoir être fier lorsque j’ai le résultat final entre les mains.
***
Patrick Dubuc
info@dubuccreationsgemmes.com
J.-B. Tavernier, Les Six Voyages de Jean-Baptiste Tavernier qu’il a fait en Turquie, en Perse et aux Indes, Paris, 1676, 2 vol.
F. Farges, P. Dubuc & M. Vallanet-Delhom, « Restitution des « vingt plus beaux diamants » de Tavernier vendus à Louis XIV in Revue de l’Association Française de Gemmologie, n° 200 et n°201
MNHN
5è rue Cuvier. 75005 Paris.
Smithsonian National Museum of Natural History
10th St. & Constitution Ave. NW
20560 Washington
Visuel de "une" : L'Oeil de l'Idole. Photo Patrick Dubuc
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