Marie-Caroline de Brosses : mes années chez Boivin… et après

[section_title title= »Acte I : L’histoire de la maison Boivin succinctement racontée »]

Acte I : L’histoire de la maison Boivin succinctement racontée

Scène 1 : 1890-1917

René Boivin fit ses classes dans les ateliers de son frère joaillier, comme apprenti puis comme orfèvre, avant d’être reconnu comme un ciseleur de grand talent. C’est grâce à un héritage familial que René Boivin, alors tout juste âgé de 26 ans, put racheter quatre ateliers et les transformer en une maison de joaillerie qui allait connaître le succès que l’on sait pendant très exactement un siècle.

Jusqu’en 1906, la maison Boivin était essentiellement un atelier de production qui fabriquait des bijoux pour la Place Vendôme (Mellerio et Boucheron entre autres). Ce n’est que dans un second temps que s’est développée une clientèle privée. Parallèlement, son goût pour les beaux objets anciens porta René Boivin, artiste érudit typique de cette fin du XIXème siècle, à étendre son activité à celle d’antiquaire.

Lorsque René Boivin décède prématurément en 1917 d’une pleurésie, c’est sa femme, Jeanne (1871-1959) – sœur aînée du célèbre couturier Paul Poiret- qui reprend hardiment les rênes de la maison, secondée par ses deux filles : Germaine et Suzanne.

Scène 2 : 1919-1932

Dès 1919 Madame Boivin engage Suzanne Vuillerne (1900-1983), tout juste diplômée de l’Ecole Nationale des Beaux-Arts de Besançon, en tant que modéliste-dessinatrice. En 1924, celle qui s’appelle désormais Suzanne Belperron (elle a épousé Jean Belperron le 11 juillet 1924) devient co-directrice de la maison. Elle n’a alors que 23 ans.

En 1932, Suzanne Belperron quitte la maison, suivie par une partie de sa clientèle pour travailler avec le négociant Bernard Herz et fonder ce qui deviendra après-guerre sa propre maison de joaillerie. Là débute une autre histoire.

Scène 3 : 1933-1970

Juliette Moutard est le troisième nom associé à la création des bijoux Boivin. Dessinatrice de talent, « grande créatrice » selon Marie-Caroline de Brosses, elle eut le plus long règne au sein de la prestigieuse maison.

Entrée dans la maison Boivin en janvier 1933, elle y resta jusqu’en 1970, soit un peu moins d’une quarantaine d’années. Son travail sut faire évoluer l’esprit Boivin, et Juliette, comme elle se faisait appeler, sut aussi apporter sa touche personnelle.

Scène 4 : 1970-1991

Marie-Caroline de Brosses est la dernière créatrice à avoir été en charge de la création de la maison. Arrivée au cours de l’hiver 1970, elle a dessiné les bijoux de la maison pendant une vingtaine d’années, jusqu’au coup de théâtre final : le rachat de Boivin, en 1991, par Asprey & Garrard. Rachat qui fut rapidement suivi de la fermeture de cette maison centenaire.

L’entretien que Marie-Caroline de Brosses nous a fait l’honneur de nous accorder est riche d’enseignements. Il permet d’appréhender la maison Boivin pour la première fois dans son intégralité. L’histoire de la maison Boivin est connue grâce au magistral ouvrage de Madame Françoise Cailles, René Boivin paru en 1994 aux Editions de l’Amateur. Ce livre, devenu une rareté bibliophilique dont la cote s’est envolée, présente un panorama riche, précis, et très joliment narré de la maison, des créations, des hommes et des femmes qui ont participé à ce succès. Mais son récit s’achève avec Juliette Moutard, et de nombreuses créations de Marie-Caroline de Brosses, illustrant les chapitres IV et V, ne lui sont pas explicitement attribuées.

Cet entretien exclusif est l’occasion aujourd’hui d’ajouter des informations essentielles à la somme de Madame Cailles, de préciser quelques faits, et enfin de permettre une plus juste attribution des pièces.